Les débuts de la 5G aux Etats-Unis

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Attendue par le monde de la tech comme le messie, la 5G est enfin arrivée – ou du moins, les opérateurs ont commencé à la déployer, en utilisant essentiellement les infrastructures existantes. Mais le processus va prendre plusieurs années, surtout dans un pays aussi immense que les Etats-Unis.

La 5G américaine existe en plusieurs parfums. En très haute fréquence, les utilisateurs peuvent escompter des vitesses très rapides – de l’ordre d’un Gigaoctet par seconde – mais il vaut mieux se trouver juste à côté de l’antenne, car les ondes dites “millimétriques” ne se propagent pas loin et sont limitées par toutes sortes d’obstacles (les murs, la pluie…).

Verizon a pris le parti de déployer ce type de 5G, en commençant par quelques aires très restreintes dans une trentaine de centre-villes. Ces réseaux s’apparentent plutôt à de l’internet fixe, très haut débit, sans passer par la fibre.

Plus les fréquences sont basses, mieux elles se diffusent. Les opérateurs qui utilisent le spectre basse-fréquence de la 5G couvrent donc plus de territoire, mais fournissent des vitesses nettement moins élevées.

C’est l’option choisie par T-Mobile, qui assure pouvoir desservir, potentiellement, 200 millions de personnes dans plus de 5.000 villes. A des vitesses seulement 20% plus rapides que sur la 4G, selon les experts du secteur.

“T-Mobile, c’est le plus gros déploiement, parce qu’ils utilisent les mêmes antennes que leur réseau 4G”, note Eliane Fiolet, cofondatrice d’Ubergizmo, un site sur les tendances technologiques. “Ils n’ont pas installé une nouvelle infrastructure.”

At&T, autre grand opérateur américain, propose une “5G E” (4G améliorée), une 5G tout court, disponible dans une vingtaine de villes, et une 5G+, la très haute fréquence seulement pour les entreprises, dans des zones délimitées.

Sprint, enfin, s’est positionné sur les moyennes fréquences, des ondes qui intéressent aussi AT&T et Verizon car elles représentent un bon compromis entre la surface couverte et les performances.

Les prémices du commencement

“On est encore au tout début de la 5G”, rappelle Steve Koenig vice-président de la Consumer Technology Association (CTA), qui organise le salon annuel de la tech à Las Vegas (7-10 janvier 2020). “Les réseaux restent très limités en termes de couverture et de puissance.”

Sans compter qu’il faut avoir un smartphone compatible. En 2019, 1,6 million de téléphones 5G ont été vendus aux Etats-Unis, d’après la CTA. Elle table sur 20 millions en 2020 et 133 millions en 2023.

Dans le monde, plus de 40 opérateurs ont commencé le déploiement, dans une vingtaine de pays. En tête, la Corée du Sud, mais aussi la Chine et le Japon, qui accueille les Jeux Olympiques en 2020.

“En Asie, ils ont fait un super boulot de coordination et de marketing vis-à-vis des consommateurs”, remarque Jefferson Wang, spécialiste de cette nouvelle génération de téléphonie mobile chez Accenture. “Les opérateurs ont lancé les réseaux 5G ensemble, plusieurs smartphones 5G étaient disponibles et surtout il y a des applications spécifiques pour la 5G. A ce stade, aux Etats-Unis, il n’y a pas d’usage spécifique, à part la meilleure connectivité.”

Après les téléphones viendront de nombreux autres objets connectés, comme les ordinateurs portables et les tablettes.

“Ce sera génial de pouvoir être connecté partout, sans devoir trouver du wifi”, remarque Mikako Kitagawa, analyste chez Gartner. “Mais tout dépend du prix de ce service. Les ordinateurs avec la LTE (4G améliorée, ndlr) n’ont pas marché parce que c’était trop cher.”

La 5G ou le rêve de la tech, si proche et si lointain

A la grand-messe des gagdets hi-tech de Las Vegas, la 5G est sur toutes les lèvres, mais sur bien peu d’appareils. Le Consumer Electronic Show (CES) va néanmoins apporter du carburant à l’imagination, la nouvelle génération de téléphonie mobile ayant le potentiel de modifier en profondeur nos façons de circuler, de produire ou de nous soigner.

Etat des lieux non exhaustif des applications actuelles et futures de la 5G.

Le divertissement en tête

Dans le monde, une vingtaine de pays ont déployé des réseaux 5G, selon Qualcomm. Le fabricant américain de puces estime que 2,4 milliards d’abonnés peuvent théoriquement utiliser la 5G, selon l’endroit où ils se trouvent – et s’ils ont un téléphone adapté.

“Beaucoup de smartphones 5G vont être dévoilés au CES, ainsi que des ordinateurs portables et des tablettes”, estime Mikako Kitagawa, analyste chez Gartner. “Mais il faudra peut-être attendre le printemps ou l’été pour qu’ils soient disponibles.”

Les amateurs de jeux vidéo et de série seront les premiers gagnants: télécharger un film en 4K prendra quelques secondes, même sans wifi.

“A court terme, les vidéos vont gagner en résolution. Puis la 5G permettra de créer des contenus plus immersifs. Sur le long terme, elle peut aider à réaliser des hologrammes qui seront plus interactifs”, énumère Jefferson Wang, spécialiste de la 5G chez Accenture.

En Corée du Sud, pays le plus avancé au monde en utilisation de la 5G, les abonnés “peuvent par exemple avoir un rendez-vous virtuel avec une star de la K-pop (pop coréenne, ndlr)”, mentionne-t-il.

Finie la nausée

“La 5G va entrer dans une phase commerciale”, assure Steve Koenig, vice-président de la Consumer Technology Association, qui organise le show annuel. “Il y aura beaucoup d’appareils compatibles, comme des lunettes à réalité augmentée”.

La réalité augmentée, gourmande en bande passante, permet de projeter des images sur un lieu réel, comme par exemple un meuble virtuel dans son salon ou du maquillage sur son visage, via un smartphone.

La 5G devrait aussi faire décoller la réalité virtuelle (VR). Jusqu’à présent, les casques immersifs n’ont pas conquis la grande consommation, notamment à cause de leur prix et des problèmes de nausée.

“La 5G va réduire la latence et donc les nausées, démultiplier les possibilités en termes d’applications et permettre de connecter plusieurs appareils à la fois”, considère M. Wang.

Mais il va encore falloir au moins deux ans avant que ces réalités augmentée ou virtuelle ne prennent corps dans nos quotidiens, selon les experts.

Santé, mobilité, données

La 5G, c’est la promesse (ou la menace) du tout connecté, avec une explosion de la circulation des données, en termes de volume et de vitesse.

Elle doit faciliter le développement des voitures sans conducteurs, qui pourront échanger des données entre elles – et potentiellement avec le mobilier urbain – sans passer par les serveurs.

SK Telecom, un opérateur sud-coréen, a prévu de présenter au CES un service de cartographie qui collecte et analyse en temps réel les informations sur la circulation, grâce à des capteurs installés sur les voitures. Le but est de construire l’infrastructure nécessaire au bon fonctionnement des voitures autonomes dans Séoul.

Côté santé, “la 5G permet des choses très sophistiquées, comme la chirurgie à distance, qui nécessite des très hauts débits et une latence ultra faible”, explique John Smee, vice-président de Qualcomm responsable de la recherche sur la 5G.

“Mais on voit aussi les médecins avec des tablettes et bientôt la réalité augmentée pour avoir toutes les informations à portée de main quand il faut prendre des décisions. C’est le meilleur des deux mondes”, ajoute-t-il.

Monde “post-smartphone”

L’internet des objets se matérialise déjà, mais la 5G doit lui apporter une autre dimension. “On va assister à une prolifération des appareils connectés, au-delà du smartphone”, prédit John Smee.

Au CES, la start-up coréenne Linkflow propose de tester sa dernière “caméra-collier”, qui permet de filmer ses vacances en 360°, voire de les diffuser en direct, via la 5G.

Un autre exposant, Innowave, a équipé d’une puce 5G son traqueur miniature, qui peut servir à “localiser sa voiture sur le parking ou son enfant en mouvement”.

Selon Jefferson Wang, nous allons passer de l’ère de la convergence, où le smartphone sert aussi bien d’ordinateur que de lecteur de musique, à celle de la divergence, où d’autres objets et accessoires connectés nous évitent de regarder constamment l’écran dans nos mains.

“Le smartphone sera toujours essentiel, mais certaines fonctions vont pouvoir en être extraites et incarnées par de nouveaux produits”, analyse-t-il. “Ils vont nous emmener vers un monde post-smartphone.”

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