Le diagnostic médical par un robot, ce n’est pas pour demain !

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La firme technologique IBM a dépensé pas moins d’un milliard pour s’offrir un acteur de l’imagerie médicale. Une étape pour booster son super ordinateur Watson qui se présentera à terme comme le robot qui diagnostiquera les malades. Mais voici pourquoi on est encore loin du compte.

Merge Healthcare. Cette entreprise vous était probablement inconnue jusqu’à apprendre que “Big Blue” allait débourser pas moins d’un milliard de dollars pour mettre le grappin dessus. Cette entreprise américaine est spécialiste de l’imagerie médicale logée dans le cloud et revendique 7.500 établissements parmi ses clients.

Cette acquisition n’est, en fait, qu’une demi-surprise car IBM met depuis quelques temps déjà le cap sur le secteur de la santé. Avec pour étendard, son super-ordinateur Watson. Ce dernier est capable de traiter un nombre incalculable de données, d’apporter une réponse à une question et même de la justifier. Selon IBM il “comprend le langage réel utilisé par chacun de nous pour communiquer et échanger. Il est même capable de comprendre les jeux de mots, les ambiguïtés ou l’ironie”. A terme, IBM entend faire de Watson la machine suprême qui diagnostiquera, seule, les maladies des patients que traitera l’ordinateur !

L’imagerie, essentielle pour le diagnostic

“Cette acquisition est dans l’ordre le plus logique des choses pour IBM, analyse le docteur Laurent Alexandre, spécialiste de renom de la technomédecine et auteur de plusieurs ouvrage sur les progrès de la science médicale. Pour compléter Watson, l’analyse des images est essentielle. Car un ordinateur peut avoir un avantage important par rapport à l’analyse des images par un être humain. Ceci grâce à la connaissance des bibliothèques d’images. C’était déjà le principe avec Deep Blue, l’ancêtre du super-ordinateur Watson qui jouait aux échecs, qui avait appris toutes les parties d’échec possibles. Aujourd’hui, un radiologue ne peut avoir en tête les 500 derniers millions de scanners réalisés… Alors que c’est théoriquement possible avec Watson. Ce rachat est donc une étape normale pour IBM qui se positionne de plus en plus dans la santé… et, c’est aussi un pas de plus dans l’intelligence artificielle.”

Depuis le début de l’année, il est vrai, “Big Blue” met un focus très particulier sur ce créneau. Après avoir créé une unité “santé” sous l’ombrelle Watson, la firme a, en effet, racheté une série de sociétés spécialisées parmi lesquelles Phytel, active dans les logiciels et services online pour le personnel médical, et Explorys, concentrée sur l’analyse de données cliniques. Sans oublier des investissements dans Pathway Genomics (conseil personnalisés en fonction de l’ADN)… et des partenariats clés. Comme celui annoncé avec Apple, le créateur de l’iPhone, qui devrait transmettre à IBM (après les avoir anonymisées) les données santé des utilisateurs de l’Apple HealthKit.

Diagnostique autonome ? “Pas pour demain”

Reste qu’on est encore très loin du scénario de Watson qui diagnostique seul les patients. Pour le docteur Laurent Alexandre, c’est très clair : “Watson n’en est qu’au tout début du processus. Et il faudra encore des années avant d’avoir un diagnostic médical autonome. Il ne fait aucun doute que l’issue du diagnostic est un diagnostic réalisé par une machine. Mais il faudra encore au moins 15 ans. Le gros souci est la vérification. On est encore loin d’avoir, en médecine, ce que l’on peut avoir prochainement dans l’automobile avec la Google Car, à savoir une voiture autonome qui soit moins dangereuse que la conduite humaine. Watson a de plus en plus de partenariats, c’est vrai, mais cela reste du beta testing, de l’expérimental. Et il faudra plusieurs années encore avant que tout cela ne soit réellement commercialisé. D’ici peu de temps, on peut imaginer que Watson rende des services dans le monde médical… mais pas encore qu’il réalise ce dont on parle beaucoup ; le diagnostic médical autonome. A terme, cela arrivera et ce sont des perspectives vertigineuses… Mais il y un frein à surmonter : en médecine, il y a beaucoup de nuances qu’un ordinateur peut avoir du mal à percevoir. Un exemple : si je parle d’angine, s’agit-il d’une angine de poitrine pré-infarctus ou d’une angine de gorge, soit un virus. Ce n’est pas du tout la même chose et si avec la voix un médecin peut faire la différence, ce n’est pas le cas pour une machine.”

IBM et le big data de la santé

Pour IBM, il est toutefois capital d’afficher son ambition dans la santé. La firme, plus que centenaire, est à la recherche d’un nouveau souffle. Certes, elle se porte encore très bien : en 2014 son chiffre d’affaires atteignait 92 milliards de dollars (plus que Google !) pour un bénéfice net de 12 milliards ! Malgré tout, sa croissance s’érode fortement et IBM est plutôt en décroissance : un an plus tôt on parlait d’un chiffre d’affaire de 98 milliards pour 16 milliards de bénéfices…

Dans le contexte du big data, le secteur médical génère de plus en plus de données. Selon une étude d’IBM, d’ici quelques années, chaque être humain génèrera pas moins d’un million de gigabits de données au cours de sa vie. A titre de comparaison, un iPhone stock entre 16 et 128 Gb… Autant dire que la création de données dans l’univers de la santé est gigantesque. Elles proviennent tout à la fois des hôpitaux et du corps médical…mais également les nombreux objets connectés (nombre de pas, tension, battements cardiaques, poids, etc…). Une matière première idéale pour faire tourner les solutions d’IBM.

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