IA et droits d’auteur: les prochaines années s’annoncent rock’n’roll
Préparez-vous pour une bataille mondiale autour des droits d’auteur, “deepfakes” et bien d’autres choses encore. Le Tennessee vient d’adopter la loi Elvis qui protège les artistes, mais d’autres affaires risquent d’influencer le développement de l’IA.
Mots, images, musique et maintenant vidéo : l’IA générative semble être un outil quasi magique pour créer des contenus originaux et en quantité illimitée. Pourtant, aux yeux de ses détracteurs, il s’agit d’une arnaque. Une arnaque, qui dévore les œuvres créées par l’homme et protégées par des droits d’auteur pour en recracher de pâles imitations dérivées. Qui a raison ? En 2025, une combinaison de litiges et de législations commencera à apporter des réponses.
Commençons par les litiges. Des représentants de presque toutes les industries créatives ont déposé des plaintes pour violation du droit d’auteur contre des entreprises d’IA générative qui utilisent leur matériel, sans paiement ni autorisation, afin d’entraîner leurs modèles. La plupart de ces actions se déroulent aux États-Unis : OpenAI et Microsoft sont poursuivis par le New York Times, Anthropic est poursuivie par Universal Music Group… Et en Grande-Bretagne, Stability AI est poursuivie par Getty Images.
Tous nient avoir commis des actes répréhensibles et bon nombre de ces litiges pourraient être réglés à l’amiable. Mais si les plaignants ne cèdent pas aux accords, des précédents juridiques seront établis Ò et ceux-ci pourraient façonner l’industrie technologique pour les années à venir.
Jusqu’à présent, aucun pays ne semble disposé à devenir un “Far West” réglementaire.
Plus de questions que de réponses ?
Pendant que les tribunaux délibèrent sur les lois existantes, les législateurs vont débattre de nouvelles réglementations. En particulier sur les deepfakes, qui utilisent l’IA pour insérer la ressemblance d’une personne dans une photo ou une vidéo existante, souvent de nature pornographique. Ce phénomène inquiète, pêle-mêle, parents, célébrités ou encore politiques. En mars, l’État américain du Tennessee a adopté la loi “Ensuring Likeness Voice and Image Security” (Elvis). Celle-ci vise à protéger les artistes-interprètes contre l’utilisation illégale de leur image ou de leur voix. La Californie a quant à elle adopté des lois pour mettre fin aux deepfakes politiques.
La loi sur les droits d’auteur pourrait également être réformée. L’Union européenne, le Japon, Israël et Singapour ont déjà introduit des exceptions pour permettre l’utilisation de matériel protégé par le droit d’auteur, sans autorisation ni paiement, dans la formation des modèles d’IA, du moins dans certaines circonstances. Dans la Silicon Valley, certains craignent que les investissements technologiques ne quittent les États-Unis au profit de juridictions plus souples. Pourtant, jusqu’à présent, aucun pays ne semble disposé à devenir un “Far West” réglementaire.
Le compromis qui se dessine est que les entreprises technologiques devront trouver des moyens de permettre aux détenteurs de droits d’auteur de refuser que leurs contenus soient utilisés pour entraîner des modèles d’IA. Elles devront également faire en sorte que les outils d’IA traitent mieux les concepts abstraits sans régurgiter du matériel protégé par le droit d’auteur. Par exemple, être capable de dessiner un super-héros sans reproduire des images de Superman. Cela pourrait toutefois s’avérer plus facile à dire qu’à faire. Ne soyez pas surpris si, au cours de l’année à venir, l’IA génère davantage de questions que les régulateurs ne peuvent apporter de réponses.
Par Tom Wainwright, rédacteur en chef technologie et médias de “The Economist”
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