Et si l’intelligence artificielle découvrait la première trace de vie extraterrestre ?

Photo du ciel et de la Voie lactée
La Voie lactée apparaît au-dessus du rocher de Sigiriya, site classé au patrimoine mondial, à Dambulla, au Sri Lanka. © Thilina Kaluthotage/NurPhoto via Getty Images
Vincent Genot
Vincent Genot Coordinateur online news

Face au flot d’images venues du ciel, les astronomes cherchent de nouveaux alliés. Et si c’était une intelligence artificielle qui, la première, décelait un signe de vie au-delà de la Terre ?

Lapalissade ultime : « l’univers, c’est grand ». Dès lors, comment y détecter une anomalie, un changement, une brusque apparition ? Pour y parvenir, les télescopes modernes scrutent le ciel sans relâche, générant chaque nuit des millions d’images et d’alertes. La prochaine génération d’instruments, comme le télescope de l’observatoire Vera C. Rubin, au nord du Chili, produira à elle seule près de 20 téraoctets de données toutes les 24 heures. Une masse d’informations tout simplement impossible à analyser de manière exhaustive à l’échelle d’une vie humaine.

Partant de ce constat, des chercheurs de l’Université d’Oxford, de Google et de l’Université Radboud, aux Pays-Bas, ont cherché à savoir si un modèle d’intelligence artificielle généraliste, tel que Gemini, pouvait les aider à trier ces images — et surtout à expliquer ce qu’il observe. Leurs conclusions ont été publiées dans la prestigieuse revue Nature et sur le site de l’Université d’Oxford.


Avec à peine une quinzaine d’images d’exemple et quelques instructions simples, les chercheurs ont transformé Gemini en véritable assistant astronomique virtuel. Le modèle a appris à distinguer les phénomènes cosmiques authentiques des perturbations dans les clichés, avec une précision de 93 %. Après un premier retour d’expérience de douze astronomes, ce taux est même monté à 96,7 %. Autre prouesse : à chaque analyse, l’IA fournissait une explication claire, compréhensible en langage naturel.


Sur le site de l’Université d’Oxford, le professeur Stephen Smartt, du département de physique, souligne qu’il travaille depuis plus de dix ans sur le traitement rapide des données issues des relevés du ciel. « Nous sommes constamment confrontés au tri entre les événements réels et les signaux parasites… La précision du large language model (LLM) à reconnaître les sources avec un minimum de guidage, sans entraînement spécifique à la tâche, est remarquable. Si nous parvenons à le déployer à grande échelle, ce pourrait être une véritable révolution pour le domaine de l’astronomie, et un nouvel exemple de la manière dont l’IA peut favoriser la découverte scientifique. »

Quand l’IA s’auto-évalue

Dans une autre expérience, les chercheurs ont demandé à Gemini d’évaluer lui-même la fiabilité de ses réponses à travers un « score de cohérence ». Le modèle devait attribuer à chaque analyse un degré de confiance : plus le score est bas, plus le risque d’erreur est élevé. Grâce à ce système, Gemini peut signaler automatiquement les cas douteux, permettant aux astronomes de concentrer leur attention sur les signaux réellement prometteurs.


Dans un communiqué, Turan Bulmus, co-auteur de l’étude chez Google, explique que comme « cette méthode ne nécessite pas d’entraînement complexe ni d’énormes quantités de données, ça la rend beaucoup plus largement applicable à de nouveaux instruments et domaines de recherche ».

Le programme Seti@home
Le programme Seti@home tournait sur les ordinateurs des particuliers lorsqu’ils se mettaient en veille. © D.R.

SETI@home


L’idée d’associer l’intelligence collective à la quête de vie ailleurs n’est d’ailleurs pas nouvelle. Dès 1999, le programme SETI@home, lancé par l’Université de Californie à Berkeley, invitait des millions d’internautes à prêter la puissance inutilisée de leur ordinateur à la science. Chaque machine analysait une portion du ciel enregistrée par les radiotélescopes, à la recherche d’un signal anormal. Une forme précoce d’intelligence distribuée, qui annonçait déjà la collaboration entre humains et algorithmes dans l’exploration du cosmos.

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