Le service Apple TV vient de décrocher les droits de retransmission de la Formule 1 aux États-Unis pour une durée de cinq ans. Une annonce qui confirme une tendance lourde: les géants technologiques s’invitent désormais sur les circuits et dans les stades, en tentant de mettre les chaînes traditionnelles hors-jeu. En Europe, la partie ne fait que commencer…
C’est une victoire lourde de sens. En raflant les droits de diffusion de la Formule 1 aux États-Unis pour les cinq prochaines saisons, Apple TV s’installe dans un domaine jusqu’ici dominé par les chaînes sportives traditionnelles. Montant estimé de la transaction: quelque 750 millions de dollars, soit environ 150 millions de dollars par saison, alors que la chaîne sportive ESPN, propriété de Disney, ne déboursait ‘‘que’’ 85 millions de dollars par an, jusqu’à présent.
Redistribution des cartes
Après Amazon qui avait diffusé certains matchs de Premier League au Royaume-Uni entre 2019 et 2022 (avant de se retirer du dernier cycle de droits) et YouTube qui s’offre désormais la diffusion de certaines compétitions sportives, le mouvement s’accélère du côté des plateformes. Le sport, jadis chasse gardée des télévisions classiques ou des grands réseaux câblés, devient une nouvelle vitrine pour les plateformes de streaming.
Et ce n’est pas un hasard. Le sport reste l’un des rares contenus capables de fédérer des millions de spectateurs en direct, une denrée rare à l’heure du “tout à la demande”. Pour Apple, Amazon, Netflix ou Disney, ces droits ne sont pas donc seulement un moyen d’attirer ou de fidéliser un certain nombre d’abonnés. C’est aussi une arme stratégique pour retenir l’attention du grand public dans un marché saturé et d’ancrer ainsi la marque de façon durable dans les réflexes audiovisuels.
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De plus en plus d’abonnements
Face à ces offensives, les acteurs historiques de la télévision accusent le coup. En Europe, les droits sportifs constituent depuis toujours un pilier des grilles de programmation et une source majeure d’abonnements pour les opérateurs. Or, la montée en puissance des géants du numérique risque bien de bouleverser de plus en plus cet équilibre fragile.
Les coûts explosent, les exclusivités se raréfient et la logique du “tout payant” pourrait bien s’imposer au final. Les téléspectateurs, eux, voient poindre une multiplication des abonnements: un pour le foot, un autre pour la F1, un troisième pour le tennis… L’époque du “tout sport sur la même chaîne” semble bel et bien révolue.
L’UEFA, de son côté, planche déjà sur le prochain cycle de diffusion de la Ligue des Champions à partir de la saison 2027-2028. Et dans les couloirs de l’institution, certains murmurent que les grandes plateformes américaines pourraient bientôt s’inviter à la table des négociations. Une première, mais sans doute pas une dernière.
Des géants à l’affût
Chez nous, la récente crise entre les opérateurs télécoms et le groupe DAZN qui détient les droits de la Pro League en dit long sur la fragilité du modèle actuel. Entre conflits de distribution, droits éclatés et interfaces multiples, le téléspectateur devient la variable d’ajustement d’une guerre économique entre diffuseurs… qui pourrait bien profiter aux géants technologiques.
Aujourd’hui, la Formule 1 américaine bascule chez Apple TV. Demain, pourquoi pas la Ligue des champions sur Netflix, Amazon Prime ou le même Apple TV qui détient aussi les droits du soccer aux Etats-Unis ? Si la tendance se confirme, la télévision sportive telle que nous la connaissons depuis de longues années risque peut-être de finir dans les paddocks de l’histoire…