18.000 “Vitaers” contre l’Etat belge
L’instruction avance dans l’affaire Vitae, du nom de cette plateforme crypto gérée depuis Anvers que nos autorités soupçonnent d’être une arnaque mondiale. Mais s’ouvre désormais un nouveau front judiciaire.
Trois mois se sont écoulés depuis que la justice belge a bloqué l’accès au réseau social Vitae.co, privé de liberté certains de ses dirigeants et entamé une instruction. Les autorités craignent que ce média social expérimental, rémunérant ses milliers de membre-testeurs avec la cryptomonnaie Vitae, cache une fraude à la Ponzi d’envergure internationale. Au terme des vacances judiciaires, l’enquête aurait repris, mais le parquet fédéral ne commente pas l’affaire.
De leur côté, sans accès à leurs profils et leurs cryptos, les utilisateurs de Vitae auraient essuyé, impuissants, un véritable krach. Le cours de leurs jetons numériques s’est effondré sous le poids des ennuis judiciaires, des dizaines de millions d’euros de valeur disparaissant.
Fin juillet, le token Vitae se maintenait encore au 614e rang du classement mondial des cryptomonnaies dressé par CoinMarketCap. Désormais, plus aucune donnée n’apparaît, plus aucune position n’est attribuée, et seuls quelque 10.106 internautes ont ajouté ledit token à leur liste de surveillance.
Seulement voilà, la vision du juge d’instruction Philippe Van Linthout, partagée par le cabinet gantois De Groote-De Man qui accompagne des victimes belges et étrangères de Vitae, ne rencontre pas l’unanimité. “Nous n’avons jamais été trahis, ni escroqués ni volés. Si nous avons subi des dommages, c’est parce que notre accès à nos portefeuilles électroniques a été bloqué en raison du gel de la plateforme par les autorités belges”, ont déclaré 11 membres très engagés dans le projet Vitae.
Ces derniers se sont entourés du cabinet liégeois Elegis, une association rassemblant plus de 80 avocats en Belgique qui intervient indistinctement tant pour des multinationales, des pouvoirs publics (Enodia-Nethys), que pour des particuliers. Les “Vitaers” ont testé avec ledit cabinet la validité juridique de leur raisonnement. Après analyse, Elegis s’est engagé à entreprendre les actions appropriées. Autrement dit: attaquer la justice belge.
> Lire à ce sujet: Affaire Vitae: la mécanique d’une arnaque crypto-mondiale
Procédure de dédommagement
Contacté par nos soins, Hans Van de Wal, l’avocat d’Elegis spécialisé notamment en droit pénal financier, indique avoir mis en demeure l’Etat belge pour signaler que 18.000 personnes qu’il représentait réclament compensation. Ses milliers de clients, parmi lesquels 350 Belges, estiment que l’Etat doit les dédommager pour les conséquences graves des “mesures disproportionnées prises par le juge d’instruction”. Me Van de Wal reste sans nouvelles à l’heure d’écrire ces lignes.
L’avocat va donc adresser une citation à comparaître à l’Etat, demandant la réouverture du réseau Vitae et le déblocage des portefeuilles cryptos mais surtout l’indemnisation de ses clients qui seraient de facto victimes de l’instruction. “Pour moi, ce n’est pas important si les prévenus et les inculpés sont coupables ou pas. Nous avons un système avec une monnaie interne et, d’un jour à l’autre, l’accès est bloqué arbitrairement. Légalement, le gel d’avoirs, la saisie de biens, ne peuvent toucher que les individus ciblés par l’investigation. [Mes clients n’ont] donc pas à souffrir des retombées de l’enquête, [ils] n’y jouent aucun rôle”, a expliqué Me Van de Wal.
En parallèle, l’avocat va également adresser une requête au juge Van Linthout pour demander la levée de cet acte d’instruction par lequel les membres de Vitae s’estiment lésés.
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