La justice va-t-elle torpiller la réforme du chômage?

Manifestation contre l'Arizona du 14 octobre 2025. BELGA PHOTO JAMES ARTHUR GEKIERE
Caroline Lallemand

Le front commun syndical et plusieurs organisations de la société civile ont introduit une requête en annulation assortie d’une demande de suspension devant la Cour constitutionnelle contre la réforme du chômage. Ils dénoncent “une offensive sans précédent contre la sécurité sociale belge”. Cette action juridique pourrait bien faire dérailler l’un des piliers du gouvernement Arizona.

C’est un coup judiciaire qui pourrait menacer la réforme du chômage de l’Arizona. Mercredi, le front commun syndical (CSC, FGTB et CGSLB), épaulé par la Ligue des droits humains, la Ligue des familles et Vie Féminine, a déposé une requête en annulation devant la Cour constitutionnelle. Leur cible ? La réforme et ses mesures transitoires, dont le principe même de limitation dans le temps des allocations.

La demande ne se limite pas à une simple contestation : elle est assortie d’une suspension, ce qui signifie que la Cour pourrait geler l’application de la réforme en attendant de se prononcer sur le fond. Un scénario qui ferait voler en éclats l’un des projets phares du gouvernement Arizona.

« Régression sociale »

Pour les requérants, la question ne fait aucun doute : cette réforme viole plusieurs principes constitutionnels fondamentaux. Ils invoquent le principe de confiance légitime, le droit à la sécurité sociale garanti par l’article 23 de la Constitution qui consacre le droit de chacun à mener une vie conforme à la dignité humaine, ainsi que les principes d’égalité et de non-discrimination contenus dans les articles 10 et 11 de la Constitution. Selon eux, rien dans les débats parlementaires ni dans les réponses du ministre de l’Emploi David Clarinval (MR) ne justifie une telle “régression sociale”.

Six mois pour trouver un emploi… ou l’exclusion

Au cœur de la contestation : un dispositif jugé brutal. Les demandeurs d’emploi les plus éloignés du marché du travail ne disposeraient que de six mois – voire trois mois et demi en pratique – pour retrouver un travail, sans accompagnement crédible ni responsabilisation des employeurs. Passé ce délai, c’est l’exclusion du système.

Les syndicats et associations pointent du doigt les populations qui seraient les premières victimes. La réforme frapperait particulièrement les groupes déjà vulnérables : personnes âgées, jeunes, femmes, personnes en situation de handicap ou peu qualifiées. Mais aussi des travailleurs actifs comme les employés ALE ou ceux à temps partiel avec allocation de garantie de revenus.

Des arguments gouvernementaux jugés incohérents

Les requérants dénoncent également les contradictions du gouvernement. Comment justifier la réforme par des contraintes budgétaires tout en étendant la défiscalisation des heures supplémentaires ? Comment prétendre stimuler le retour à l’emploi quand les flexi-jobs profitent surtout à ceux qui travaillent déjà ? Comment viser 80% de taux d’emploi d’ici 2029 tout en augmentant le quota d’heures de travail étudiant ?

Pour les opposants, cette réforme ne se contente pas de modifier des règles techniques : elle “brise le pacte social sur lequel repose la société belge depuis 80 ans”. Le risque ? Précariser durablement des dizaines de milliers de personnes, fragiliser leurs familles et creuser les inégalités.

La balle est désormais dans le camp de la Cour constitutionnelle. Sa décision pourrait bien déterminer l’avenir de cette réforme controversée – et, par ricochet, la crédibilité du gouvernement Arizona sur l’un de ses chantiers prioritaires.

Suivez Trends-Tendances sur Facebook, Instagram, LinkedIn et Bluesky pour rester informé(e) des dernières tendances économiques, financières et entrepreneuriales.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire