Entre janvier 2026 et juillet 2027, près de 194.000 personnes perdront leurs allocations de chômage en Belgique suite à la réforme du gouvernement Arizona. Portrait d’une réforme qui touche prioritairement les publics les plus vulnérables.
L’image du chômeur de longue durée, âgé et inactif depuis des années, ne correspond pas à la réalité de la première vague d’exclusions des allocations. Au niveau national, la moitié des 21.723 personnes qui perdront leurs allocations dès janvier 2026 ont moins de 30 ans et bénéficient d’allocations d’insertion, a récemment rapporté L’Echo.
Le cas wallon est particulièrement frappant, selon les derniers chiffres de l’Onem consultés par le quotidien économique. Sur les 13.886 exclus wallons de la première vague, près de six sur dix (58 %) sont des jeunes de moins de 30 ans, soit 7.726 personnes. Les chômeurs de très longue durée sont en réalité minoritaires : les plus de 45 ans ne représentent qu’un tiers des exclus.
Au niveau national, parmi les exclus figurent également près de 6.000 personnes en situation de handicap (incapacité de travail d’au moins 33 %) et 37.000 seniors de 55 ans et plus.
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Six personnes sur dix ont des origines migratoires
Selon les informations du Soir, six personnes sur dix ayant perçu une allocation de chômage en 2023 ont des origines migratoires. Cela signifie que leur père ou leur mère a une autre nationalité, ou qu’elles-mêmes sont nées avec une autre nationalité, qu’elles aient conservé ou non cette nationalité.
Les données de la Banque Carrefour de la Sécurité sociale (les dernières données disponibles datent de fin 2023) consultées par Sud Presse vont dans le même sens : 80.470 des futurs exclus du chômage, en 2026 et 2027, sont d’origine belge, soit 41,5 % du total… voire 43 % si l’on ne tient pas compte de 8.726 personnes répertoriées comme « inconnues », spécifie SudPresse.
Sur les autres 57 % (105.000 personnes), la plus grosse cohorte est européenne. Plus de 54.000 personnes, dont près de 15.000 sont originaires des pays voisins (France, Luxembourg, Allemagne, Pays-Bas) et 18.000 du sud de l’Europe (Italie, Espagne, Portugal). Viennent ensuite près de 40.000 personnes originaires d’Afrique (dont 25.000 du Maghreb et 6.000 du Congo, Burundi et Rwanda), près de 9.000 d’Asie, et environ 2.300 d’Amérique latine, détaille Sud Presse.
En Wallonie : un déficit de qualification marqué
En Wallonie, neuf exclus sur dix n’ont pas dépassé le niveau du secondaire, révèlent les données de l’Onem consultées par L’Echo. Plus précisément, 41 % n’ont aucun diplôme du secondaire et 50 % s’arrêtent à ce niveau. Seuls 8,6 % possèdent un diplôme du supérieur.
Concernant la répartition par genre, les hommes sont légèrement plus nombreux (54 %) parmi les exclus wallons de la première vague.
À Bruxelles : un profil différent
Près de 42.000 chercheurs d’emploi bruxellois seront concernés par la limitation des allocations de chômage entre janvier 2026 et juillet 2027, selon Actiris. La grande majorité (36.000 personnes) perdront leurs droits dès les sept premiers mois de 2026, car les quatre premières vagues touchent principalement les chômeurs de très longue durée.
Les exclus bruxellois sont proportionnellement plus âgés et plus qualifiés que l’ensemble des chercheurs d’emploi inscrits chez Actiris. Un tiers ont 50 ans ou plus (contre 26% du total des chercheurs d’emploi bruxellois). 25% sont hautement qualifiés (contre 19% du total).
Environ 7.000 des 10.000 exclus diplômés du supérieur ont entre 25 et 49 ans. 64% des seniors exclus (environ 9.000 sur 14.000) sont sous-qualifiés – sans CESS ou détenteurs d’un diplôme étranger non reconnu en Belgique.
Les femmes bruxelloises plus vulnérables
Si Actiris note un relatif équilibre au niveau du volume global (55% d’hommes, 45% de femmes), les différences de profils sont marquées et révèlent des vulnérabilités spécifiques.
Les femmes sont plus diplômées. Elles représentent 54% des exclus détenteurs d’un diplôme supérieur, 47% des détenteurs du CESS, contre seulement 40% des infra-qualifiés.
Mais elles sont aussi plus précaires. Les femmes sont proportionnellement plus nombreuses à relever du statut de cohabitante (53%) ou de cheffe de ménage (50%), là où les hommes sont sur-représentés dans la catégorie des isolés (66%). Les femmes sont relativement plus représentées dans la catégorie d’âge intermédiaire (48% de femmes parmi les 25-49 ans) que parmi les jeunes en fin de droit (43% parmi les moins de 25 ans) ou les plus âgées (40% parmi les 50 ans et plus).
Six vagues d’exclusions jusqu’en 2027
À partir du 1er mars 2026, le droit au chômage sera limité à 24 mois au lieu d’être illimité dans le temps. Les exclusions du chômage s’étaleront sur 18 mois, en six vagues successives. La première, dès janvier 2026, touchera les chômeurs de très longue durée (plus de 20 ans) et les jeunes en allocations d’insertion. Les suivantes concerneront progressivement les chômeurs de moyenne durée, puis ceux ayant un passé professionnel plus court. D’ici juillet 2027, 193.904 personnes seront effectivement exclues du chômage.
Record d’exclus en Wallonie
La géographie des exclusions est sans appel : les 100 communes les plus touchées se trouvent toutes en Wallonie ou à Bruxelles. Liège, Charleroi, Seraing, Verviers figurent en tête de liste. Au total, la Wallonie concentre près de la moitié (46%) des futurs exclus du pays (88.561 personnes sur 193.904).
En Wallonie, un tiers des exclus (33 %) sont isolés, c’est-à-dire sans aucun revenu complémentaire potentiel d’un membre du ménage. On compte aussi 28 % de chefs de ménage et 39 % de cohabitants.
À Bruxelles, certaines communes verront plus de 4 % de leur population privée d’allocations. Saint-Josse, Molenbeek, Saint-Gilles et Schaerbeek sont particulièrement touchées.
En comparaison, en Flandre, la première commune concernée, Anvers, n’arrive qu’à la 140e place avec seulement 1,8 % de sa population touchée.