Le gouvernement fédéral rencontrera cet après-midi les gouvernements régionaux en comité de concertation, notamment pour examiner la réforme du chômage, l’un des dossiers majeurs de la politique menée par la coalition Arizona.
La limitation des allocations à deux ans suscite déjà de vives réactions, en raison de son impact attendu sur les finances des CPAS, appelés à jouer un rôle de filet de sécurité pour une partie des personnes exclues du chômage.
Selon une information publiée mercredi par L’Echo, la Wallonie a transmis en début de semaine une note au comité de concertation (“codeco”) dans laquelle elle souligne, entre autres, un décalage entre la première vague d’exclusions du chômage prévue pour début 2026, et les compensations financières envisagées par le fédéral pour les CPAS.
D’après le quotidien économique, ce signal traduit une inquiétude croissante du gouvernement wallon (MR-Engagés), jusque-là discret sur le sujet, bien que la réforme soit portée au fédéral par les mêmes partis. Une analyse également partagée par la RTBF, qui évoque une véritable “offensive” de la Wallonie et de Bruxelles, préoccupées par les répercussions de la réforme sur les finances de leurs pouvoirs locaux.
“Nous ne demandons pas un report”
Au cabinet du ministre-président wallon Adrien Dolimont (MR), on relativise cependant la portée de la note : “Il ne s’agit ni d’une offensive contre le fédéral, ni d’une remise en question de la réforme”, insiste-t-on ce mercredi. Il s’agirait simplement d’un relevé des questions à approfondir autour de cette réforme, comme convenu. “Nous ne demandons pas un report”, précise Adrien Dolimont, interrogé à ce sujet sur LN24. La Wallonie attend en revanche des précisions “le plus rapidement possible”, notamment de la part de l’Onem, afin de pouvoir mettre en œuvre l’accompagnement des publics concernés par les effets de la réforme.
Toujours selon L’Echo, la note évoque une hypothèse selon laquelle un tiers des personnes exclues du chômage se tournerait vers les CPAS, ce qui représenterait un surcoût net de l’ordre de 90 millions d’euros pour les CPAS wallons dès 2026. Ce montant inclut quelque 70 millions liés au financement local du revenu d’intégration, dont les CPAS assument en moyenne 70 %. Or, à ce stade, aucune compensation budgétaire fédérale ne serait prévue pour cette échéance.
Autre point soulevé par le gouvernement wallon, également relayé mercredi matin par la RTBF : le financement fédéral supplémentaire du RIS serait conditionné à la mise en place d’un “projet individualisé d’intégration sociale” pour chaque personne exclue. Un processus qui nécessitera du temps. “Cela signifie que le calcul de la dotation fédérale destinée aux CPAS pourrait n’intervenir qu’en fin d’année 2027, voire être reporté à l’exercice budgétaire suivant”, précisent les deux médias sur base de la note.
À Bruxelles, où le gouvernement est toujours en affaires courantes, les inquiétudes sont clairement exprimées. Le ministre Bernard Clerfayt, en charge notamment de l’Emploi et des Pouvoirs locaux, a détaillé mercredi matin sur BX1 les demandes formulées au fédéral dans sa propre note adressée au Codeco. La Région souhaite en premier lieu un étalement de la mise en œuvre de la réforme. “Tout appliquer au 1er janvier 2026, c’est impossible pour les services administratifs, pour l’Onem, les CPAS, Actiris, etc.” Le ministre DéFI rappelle d’ailleurs que l’Onem lui-même a récemment tiré la sonnette d’alarme : “Tous les indicateurs techniques laissent penser que son système informatique ne sera pas prêt pour janvier 2026, alors même que les règles sont encore en discussion.”
Protéger les chercheurs d’emploi en formation
La Région bruxelloise insiste également sur la nécessité de protéger les chercheurs d’emploi engagés dans un parcours de formation : “Les exclure serait absurde et ne favoriserait en rien leur insertion professionnelle.”
Selon les dernières estimations, environ 29 000 chercheurs d’emploi pourraient être exclus du chômage en janvier 2026 en Région bruxelloise, dont 10 000 à 11 000 se tourneraient vers les CPAS, entraînant une hausse de 28 % de la charge pour ces centres. “Cela représente autant de personnes pour lesquelles il faudra mener des enquêtes sociales, ce qui est irréalisable en une seule fois”, fait valoir le ministre sur BX1. Bruxelles réclame donc une “indemnisation correcte” pour ses CPAS, qui devront également recruter du personnel supplémentaire. “Pour nos CPAS, les coûts seraient de l’ordre de 120 millions d’euros, alors que le fédéral annonce un budget global de 400 millions pour l’ensemble du pays.”
À noter qu’avant la réunion du Codeco, ce mercredi après-midi, le Premier ministre recevra Matthias Diependaele et Adrien Dolimont, ministres-présidents flamand et wallon. Interrogé mardi à la Chambre, Bart De Wever a assuré ne pas vouloir exclure Bruxelles de ce dialogue entre le fédéral et les Régions, tout en précisant attendre que la Région-capitale dispose d’un gouvernement de plein exercice.