En Wallonie, la résistance s’organise

Christie Morreale (PS) et Adrien Dolimont (MR) - Belga Image
Baptiste Lambert

Sortis groggys des élections, en Wallonie, les partis de l’opposition sortent de leur coquille et commencent à se faire entendre. Il faut dire que la nouvelle majorité MR-Engagés a tendu le bâton pour se faire battre, à plusieurs reprises, déjà. Au niveau syndical, également, la résistance s’organise. Quitte à verser un peu dans la caricature.

Au-delà de la victoire éclatante des partis de Georges-Louis Bouchez et Maxime Prévot, la grande question était de savoir dans quelle mesure le duo aurait les mains libres pour appliquer sa politique. D’aucuns, chez les libéraux et les humanistes, craignaient une résistance, légitime, de l’opposition, mais aussi de l’administration et des forces syndicales. Mettre en place une politique de centre-droit après 40 années de domination socialiste ne peut se faire en un claquement de doigts.

Au PS, Paul Magnette a rapidement admis sa défaite, annonçant une cure d’opposition pour son parti, à l’exception, semble-t-il, de Bruxelles. Dans la foulée, le président du PS a promis une opposition “intelligente et constructive”, mais hier, au Parlement wallon, la désormais cheffe de groupe, Christie Morreale (PS), a plutôt parlé d’une opposition “honnête et proactive”.

Morreale dégaine

Et de fait, il semble que les collaborateurs de la socialiste n’aient pas chômé. Dans une série de tweets, Christie Morreale a dézingué une DPR “floue” qui est “une menace directe sur le pouvoir d’achat des citoyens, en particulier de la classe moyenne”. La socialiste s’est fendue d’une accumulation de chiffres peu flatteurs : ainsi, elle estime le coût de la perte des recettes fiscales et de la réduction du déficit à 2,5 milliards d’euros. Ce qui – interprétation très libre – aurait des répercussions sur une série de coûts : 650 par an pour les titres-services, par exemple, et 550 euros “de frais complémentaires”, soit “1.150 euros de pouvoir d’achat en moins”.

Le PS estime également que la suppression de la quasi-gratuité des TEC pour les 18-24 ans se soldera par un abonnement à 330 par an, bien que la DPR ne mentionne à aucun passage cette suppression. La réduction des droits de succession ? Un leurre : la suppression des chèques-habitat qui l’accompagne aurait, au final, sur 20 ans, des répercussions négatives sur la classe moyenne.

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“On nous annonçait un gouvernement de centre droit, ce sera un gouvernement de droite à 200%. Les politiques proposées sont loin d’être modérées et équilibrées. Nous voyons ici un alignement total sur les politiques de droite avec des mesures conservatrices et d’austérité. Les bénéfices et les efforts sont inéquitablement répartis. Doux avec les puissants, fort avec les faibles, tel semble être le nouvel adage du Gouvernement Dolimont !“, a conclu l’ancienne ministre de la Santé.

Les couacs

L’annonce du casting ministériel a également réveillé l’opposition. Sur la forme, d’abord, avec un gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles anticonstitutionnel, composé uniquement de femmes, qui a obligé le MR et Les Engagés à corriger le tir, quelques minutes à peine après la présentation des nouveaux attelages. Les doubles casquettes se sont multipliées, les compétences de la santé et de l’environnement étant, par exemple, diluées dans plusieurs portefeuilles. D’autres, chez Ecolo, se sont étonnés de voir un homme, Yves Coppieters en l’occurrence, se voir attribuer le portefeuille du droit des femmes.

Plus fondamentalement, la DPR a donné des munitions gratuites à l’opposition, en accordant au “climat” une seule page et en reléguant “l’environnement” au 15e chapitre. Là encore, les Verts ne se sont pas privés : “En ne donnant plus la place centrale au défi climatique, en mettant en péril les investissements croissants nécessaires pour la transition, en supprimant le soutien aux renouvelables et pas aux fossiles, la coalition MR-LE apparaît clairement comme la coalition Bleu pétrole“, a taclé Stéphane Hazée, chef de groupe Ecolo.

De manière plus anecdotique, un passage de la Déclaration de politique communautaire (DPC), est un copier-coller, mot pour mot, d’un discours de l’ancienne ministre de la Culture et des médias Bénédicte Linard (Ecolo). Cette bourde sera vite oubliée, mais elle témoigne d’un certain amateurisme de la nouvelle majorité, qui a, c’est de plus en plus clair, confondu vitesse et précipitation.

On entre dans le vif du sujet

En annonçant la fin des nominations dans le secteur de l’enseignement au profit de CDI, beaucoup sont tombés de leur chaise. “Si on supprime la nomination des profs, on va arriver à une anarchie complète”, estime ce matin le président de la CGSP enseignement, Joseph Thonon, sur LN24. Quelques jours plus tôt, ce dernier indiquait que le monde syndical “n’allait pas se laisser faire”. D’autres, comme Régis Dohogne, ancien secrétaire général de la CSC Enseignement, n’ont pas eu peur de verser dans la caricature, annonçant, avec la fin des nominations, “le retour de la barbarie sociale.

Ainsi, chaque point du programme du MR et des Engagés est scruté de près. Comme la volonté de fusionner les GRD, principalement Ores et Resa, mais aussi plusieurs petites intercommunales. Dans L’Echo, Roger le Bussy, directeur général du Réseau d’énergies de Wavre, se dit étonné, non-concerté et dubitatif : “Fusionner Ores, le plus important et le moins performant, avec les autres ne créera pas un grand GRD unique performant.”

La réplique

Étonnamment, aucune réaction du président du MR, fraichement réélu à 96% des voix. Rendez-vous compte : pas un seul tweet sur les 48 dernières heures. Un nouvel homme ? Le libéral, fort de score électoral, ne semble pas paniquer. La résistance de l’opposition, des syndicats et des administrations n’est pas une surprise.

Au Parlement wallon, le nouveau ministre-président, Adrien Dolimont (MR), ne s’est en tout cas pas laissé faire et a rendu coup pour coup à l’opposition, accusant le PS de vouloir “diviser la société”, en générant de la “psychose”, tout en oubliant “sa responsabilité budgétaire” sur les “50 dernières années”. Sur le climat et l’environnement, le libéral le promet, son gouvernement “s’inscrira dans l’objectif de neutralité carbone en 2050 et un objectif intermédiaire de -55 % de gaz à effet de serre d’ici 2030.”

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