Vers une majorité de centre-droit: une opportunité pour revitaliser l’économie, selon Pieter Timmermans (FEB)
Suite au scrutin électoral de ce 9 juin, Pieter Timmermans, administrateur délégué de la Fédération des Entreprises de Belgique (FEB), explique les défis et les opportunités économiques qui attendent notre pays. Il souligne l’importance des réformes économiques et de la cohésion régionale pour renforcer la compétitivité de nos entreprises et assurer un développement durable.
Pour la première fois, la tendance centre-droit semble prédominer au nord, au centre et au sud du pays. Cette orientation met davantage l’accent sur le développement économique et le soutien aux entreprises. Quelle est votre réaction, à chaud ?
Jusqu’à présent, la politique belge se focalisait principalement sur la répartition des ressources disponibles plutôt que sur leur augmentation. Aujourd’hui, il semble que nous soyons enfin prêts à adopter une approche plus proactive : développer l’économie d’abord, puis redistribuer les bénéfices. Cette tendance est une indication claire que les citoyens souhaitent un changement de politique, tant au nord qu’au sud du pays.
Pensez-vous que cette nouvelle orientation politique en Wallonie et en Flandre puisse entraîner des changements socio-économiques significatifs ?
Absolument. Vendredi dernier, le gouverneur de la Banque Nationale a exposé plusieurs défis cruciaux. Nous faisons face à un déficit budgétaire, une perte de compétitivité de nos entreprises, particulièrement dans l’industrie. Chaque jour, il y a une entreprise qui délocalise, qui restructure. L’industrie traverse une période compliquée à cause de cette perte de compétitivité. Nous avons un besoin urgent de réformes fiscales et de l’emploi. Une politique structurelle sur les pensions est également nécessaire pour gérer le coût croissant du vieillissement. Ces enjeux nécessitent une cohérence politique accrue pour avancer efficacement.
Concrètement, qu’attendez-vous des dirigeants pour soutenir l’entrepreneuriat et les entreprises ?
Pour renforcer la compétitivité de notre économie, notamment industrielle, la modération salariale est essentielle. En 2022, nous avons perdu 4 à 5 % de compétitivité en raison de l’inflation. Il est crucial de maîtriser la croissance des dépenses budgétaires. Une réforme fiscale doit être accompagnée d’une réforme du marché de l’emploi, incluant la limitation des allocations de chômage dans le temps et une réintégration progressive des malades de longue durée. Il faut également réduire la bureaucratie pour permettre aux entreprises de se concentrer sur leur croissance. Un des freins à l’entrepreneuriat est la lourdeur administrative. Lorsque qu’une personne dans votre entreprise doit consacrer du temps à remplir des formulaires au lieu de contribuer à sa croissance, cela devient problématique.
Vous mentionnez également la nécessité de réformes des pensions. Quels sont les enjeux dans ce domaine ?
Le vieillissement de la population a un impact significatif sur notre budget. Il est crucial de ralentir la croissance des dépenses liées aux pensions par des réformes structurelles, comme la mise en place d’un système unique de pensions. Un débat sur la péréquation des pensions du secteur public est aussi nécessaire. Ces réformes doivent être envisagées sur le long terme pour avoir un effet durable.
Ces réformes n’ont pas été mises en œuvre lors de la précédente législature. Qu’est-ce qui vous donne de l’espoir pour l’avenir ?
Ce n’est pas seulement un espoir, c’est une nécessité. Le gouverneur de la Banque Nationale a déjà mis en garde, et la Commission européenne émettra probablement le même avertissement la semaine prochaine. Ensuite, les agences de notation et les marchés financiers risquent de s’en mêler. Je tiens absolument à éviter l’intervention de ces derniers, car cela entraînerait une révision négative pour la Belgique.
Le défi climatique est également un enjeu majeur, malgré la déroute des écologistes. Comment concilier les objectifs climatiques avec la réindustrialisation et la compétitivité économique ?
L’erreur stratégique des écologistes et du Green Deal européen a été de se concentrer uniquement sur la transition écologique, oubliant la nécessité d’une politique industrielle. Les employeurs ne sont pas contre la transition écologique, mais elle doit être réaliste et faisable. Il faut également accélérer les processus de délivrance de permis pour des projets comme les éoliennes en Mer du Nord pour assurer une transition efficace. Ce n’est pas normal qu’un permis mette des années à être délivré.
Comment voyez-vous la coopération entre les différentes régions pour renforcer l’économie belge ?
La tendance sous-jacente est similaire entre la Flandre, Bruxelles et la Wallonie, ce qui est prometteur pour une meilleure collaboration. Cela devrait permettre une voix plus unifiée au niveau européen, notamment sur des dossiers comme le climat.
Quel message souhaitez-vous adresser aux fraîchement élus ?
Ils doivent absolument passer rapidement à l’action. Nous devons éviter qu’après l’été, les facteurs externes que je viens d’évoquer se mettent à dicter nos actions. La formation rapide d’un gouvernement enverrait un signal fort aux marchés financiers et éviterait que ces facteurs ne nous dictent nos actions, ce qui réduirait notre liberté de manœuvre.
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