Ivan Vandermeersch
Quo vadis E-privacy?
Les négociations du trilogue sur le règlement relatif à la vie privée dans le secteur des communications électroniques sont une opportunité pour permettre une plus grande cohérence avec le RGPD et les futures règles de l’UE dans le marché unique numérique. Ce 10 février 2021, le Conseil de l’Union européenne a confirmé le mandat de négociation sur le règlement relatif à la vie privée dans le secteur des communications électroniques.
Le premier projet de règlement “Vie privée et communications électroniques” a été publié en janvier 2017 et le Parlement avait approuvé son projet de texte de négociation en octobre 2017. Après près de quatre ans et huit présidences de l’UE, le compromis des États membres de l’UE a tenté de trouver un équilibre entre une protection solide de la vie privée des personnes et la promotion du développement de nouvelles technologies et de l’innovation. L’accord représente donc un pas de plus vers l’établissement de règles communes et actualisées pour les utilisateurs finaux et les entreprises.
De fortes divisions
Les propositions de la Commission, les amendements du Parlement et la position commune du Conseil seront maintenant examinés lors de réunions dite de “trilogue” avec les représentants des trois institutions qui cherchent à négocier un accord ou un compromis. Ensuite les 3 institutions devront marquer leur accord sur le texte final.
Pourtant, les changements de dernière minute apportés au texte et l’abstention de certains pays lors du vote final au sein du conseil montrent que de fortes divisions entre les pays de l’UE persistent.
Du pain sur la planche
En tant que telle, la version compromise du projet de proposition comprend de nombreuses dispositions restrictives, qui pourraient avoir un impact crucial sur le secteur du marketing direct, ainsi que sur la publicité, les médias, les services numériques et l’innovation future. En particulier, des contraintes juridiques excessives seront directement ressenties par les PME européennes qui sont déjà en difficulté en raison de la pandémie, tout en essayant de survivre sur un marché de plus en plus axé sur les données.
Jusqu’à la version finale, la directive actuelle continuera de s’appliquer aux personnes concernées par ses dispositions. La directive contient des règles d’application générale, par exemple sur les cookies et le marketing direct, et des règles spécifiques aux fournisseurs de services et de réseaux de communications électroniques. Le règlement aura l’avantage d’apporter une plus grande harmonisation des règles applicables dans tous les pays de l’union européenne. Un point d’attention reste l’utilisation de cookies statistiques ou analytiques sur les sites web qui sont absolument nécessaires d’un point de vue économique, pratique et technique.
Les nouvelles technologies impactent la discussion
Les négociations entre les trois institutions sont susceptibles de se heurter à des obstacles importants, notamment en ce qui concerne les autorisations d’accès au contenu et aux métadonnées des communications électroniques ainsi que les dispositions relatives à la conservation des données.
Cohérence des législations
D’autres difficultés liées à la conclusion d’un accord viendront probablement de la nécessité d’examiner l’impact du règlement relatif à la vie privée dans le secteur des communications électroniques sur d’autres initiatives législatives en cours dans l’UE qui auront une incidence sur le marché unique numérique, notamment la loi sur les services numériques (DSA- Digital Services Act), la loi sur les marchés numériques (DMA -Digital Markets Act), la loi sur la gouvernance des données et les nouvelles règles sur l’intelligence artificielle.
Une plus grande cohérence et des synergies avec les garanties solides et l’approche fondée sur le risque du RGPD, ainsi qu’avec d’autres initiatives législatives actuellement en cours dans l’UE sont donc fondamentales pour faire des années 2020 la décennie numérique de l’Europe. Ceci concerne entre autres la loi sur les services numériques et la loi sur les marchés numériques.
Dans ce contexte, il est important pour la BAM et FEDMA que l’objectif du règlement “Vie privée et communications électroniques” et l’opportunité qu’il représente soit gardée à l’esprit tout au long des prochains trilogues.
Une lourde responsabilité pèse sur les épaules du législateur européen.
La nouvelle société qui sera après le Covid 19 sera digitale et le citoyen est en train de se muter en “Homo Digitalis”. Le défi pour les autorités Européennes est de pouvoir sauter dans le train dans lequel se trouvent les Etats-Unis et la Chine.
L’Europe a toujours été un précurseur en matière de protection des données personnelles, inspirant plusieurs autres juridictions du monde, entre autres avec le RGDP. La Commission européenne régule également les transferts internationaux à partir de de l’Union Européenne. Elle détermine aussi les pays qui ont un niveau approprié de protection des données, sur base d’une décision d’adéquation, permettant ainsi le transfert de données depuis de l’Union Européenne vers ces pays qui ont des lois nationales estimées assurer un niveau de protection des données personnelles comparable à celui de l’UE.
Avec ce nouveau règlement il s’agira de maintenir cette position de précurseur et d’inspirateur orientant ainsi le développement numérique mondial.
Dans ce contexte il y a lieu d’arriver à une législation e-Privacy adéquate qui n’entrave pas le développement numérique du vieux continent, voire mondial.
Par Ivan Vandermeersch
Secretary General Belgian Association of Marketing (BAM)
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