“L’indexation automatique des salaires est un mur pour les entreprises, un débat doit s’ouvrir”
“On ne sait rien faire face à cette indexation, sauf à poser un geste qui serait très agressif en dénonçant les conventions collectives. La moitié de la Belgique serait dans la rue.”
En cette fin d’année, Trends Tendances pose des questions très concrètes pour trouver des solutions à la crise énergétique et économique.
Comment réagir à l’indexation automatique des salaires? Les entreprises peuvent-elles ajuster elles-mêmes cette indexation pour certains revenus?
“L’indexation des salaires est un mur qui se présente à de nombreuses entreprises en janvier 2023, mais il y a des murs que l’on peut traverser, souligne Pierre-Frédéric Nyst, président de l’Union des classes moyennes (UCM).
Je rappelle tout d’abord que ce mécanisme de l’indexation des salaires est mondialement reconnu par toutes les instances internationales. Cela permet de préserver le pouvoir d’achat, ce qui est bon pour tout le monde.
Mais quand la machine économique ne fonctionne plus de façon optimale, on a tendance à se crisper de tous côtés. Les syndicats estiment que cette indexation ne rend pas plus riche, parce que ce ne serait jamais qu’un effet de rattrapage de l’inflation. Nous, en tant qu’employeurs, nous disons que cela nous rend plus pauvres: cela représente un vrai coût. Le risque, c’est évidemment que le débat, faussé, ne parte en sucette.
A nos yeux, il ne doit pas y avoir de tabou, on doit mettre le dossier sur la table pour trouver des solutions. Le piste la plus agressive, c’est un saut d’index, ce que préconisait initialement la Voka ou la FEB. Nous avons refusé parce que c’est d’une violence inouïe.
Nous avons plutôt proposé de donner, par exemple, un montant forfaitaire nominal à chaque travailleur: c’est une piste, qui vaut ce qu’elle vaut. Nous avons même été plus loin en réfléchissant au fait de fixer un montant maximum – de 4000 euros par exemple – au-delà duquel il n’y aurait pas d’indexation automatique.
Toutes ces pistes ont été rejetées. Le Parti socialiste a dit qu’il s’agissait d’un fétiche, un Saint Graal qu’on ne peut pas toucher.
Mais un tel débat sur l’indexation doit s’ouvrir!
Le Comité pour les libertés syndicales au sein de l’OIT (Organisation internationale du travail) a rendu un avis sur la loi de 1996 (qui régit la modération salariale en fonction de la compétitivité vis-à-vis des pays voisins) en disant que cela va à l’encontre de ces libertés syndicales. C’est leur métier, d’accord. Mais si la loi de 1996 empêche les syndicats de réclamer des augmentations salariales, alors je rétorque que l’indexation automatique des salaires, par identité de motif, empêche les patrons de faire leur boulot.
Remettons tout à plat. Pour être clair, si la norme salariale devient indicative, alors l’indexation doit devenir indicative, elle aussi. Négocions!
Par ailleurs, pour l’instant, les entreprises n’ont pas toutes la capacité d’ajuster elles-mêmes cette indexation automatique des salaires. Cela est dicté par les conventions collectives. Pour que cela ne s’applique plus, il faudrait qu’au moins une organisation patronale dénonce la convention collective. Un préavis de trois mois s’impose, cela ne pourrait donc pas s’appliquer pour l’indexation prévue par la CP200 en ce début d’année 2023, mais ce pourrait être le cas pour mars.
On ne sait donc rien faire face à cette indexation, sauf à poser un geste qui serait très agressif en dénonçant les conventions collectives. La moitié de la Belgique serait dans la rue.
Certaines entreprises ont communiqué sur le fait qu’elles n’indexeraient pas les plus hauts salaires, c’est vrai. Cela ne peut se faire que dans le cadre d’un accord signé avec les travailleurs, si l’on parvient à convaincre parce que l’entreprise va très mal, par exemple. Alors, tout est toujours possible, mais c’est très loin d’être la majorté des cas.
Je le répète: il faut oser ouvrir un débat plus large sur cette indexation et sur le mécanisme qui la sous-tend, parce qu’un de ses effets, c’est également de nourrir l’inflation. C’est le serpent qui se mord la queue.”
Des solutions à la crise
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