Les prix de l’énergie freinent encore l’économie européenne
La flambée des prix de l’énergie continue de nourrir l’inflation et de freiner l’économie européenne, même si ses fondamentaux restent solides, a estimé jeudi la Commission européenne qui prévoit une embellie conjoncturelle à partir du printemps.
Bruxelles a revu nettement en hausse sa prévision d’inflation dans la zone euro pour 2022, à 3,5% (contre 2,2% anticipé jusqu’ici), et en baisse sa prévision de croissance économique, à 4% (contre 4,3%). “Les prix de l’énergie devraient rester élevés plus longtemps que prévu, freinant plus longuement l’économie et entraînant des pressions inflationnistes plus fortes”, a expliqué l’exécutif européen.
Après avoir été frappée en 2020 par les effets de la pandémie de Covid, l’activité économique a fortement rebondi à partir du printemps 2021. Mais elle a subi un ralentissement marqué depuis la fin d’année, sous l’effet conjugué de la hausse des prix de l’énergie, d’une résurgence des contaminations avec les variants Delta puis Omicron, ainsi que des perturbations des chaînes d’approvisionnement dans l’industrie.
Cette situation pèse sur la croissance début 2022, mais “les vents contraires devraient s’estomper progressivement“, selon le commissaire européen à l’Economie, Paolo Gentiloni. “Nous prévoyons une accélération de la croissance dès le printemps. Les pressions sur les prix devraient rester fortes jusqu’à l’été, après quoi l’inflation devrait diminuer”, a-t-il déclaré.
Jugeant les fondamentaux économiques “solides” en Europe, la Commission a revu en hausse sa prévision de croissance pour 2023 à 2,7% (contre 2,4%) dans les 19 pays partageant la monnaie unique. Concernant la hausse des prix, l’exécutif européen table sur un “pic d’inflation” au “taux record” de 4,8% sur un an au premier trimestre 2022, avant un repli dans la deuxième moitié de l’année. L’inflation resterait encore au-dessus de 3% (en progression sur un an) au troisième trimestre, puis baisserait à 2,1% entre octobre et décembre.
L’office européen des statistiques a publié un taux d’inflation record à 5,1% sur un an en janvier, très largement au-dessus de l’objectif de 2% de la Banque centrale européenne (BCE). Bruxelles prévoit que l’inflation passera sous cet objectif seulement “dans le courant de l’année prochaine”, tablant sur 1,7% pour 2023.
– Risques élevés –
Le renchérissement des prix représente un casse-tête pour de nombreux ménages modestes qui peinent à boucler leurs fins de mois, mais aussi pour la BCE qui se retrouve sous pression pour relever ses taux d’intérêt afin de contenir les pressions inflationnistes au risque de casser la croissance. Le Conseil des gouverneurs de la BCE “examinera très attentivement” lors de sa réunion de mars les nouvelles prévisions d’inflation et de croissance en zone euro, avant toute décision sur l’évolution de sa politique monétaire, a expliqué lundi la présidente de l’institution Christine Lagarde.
Elle avait surpris les observateurs la semaine dernière en changeant de ton sur l’inflation, soulignant que les risques d’un maintien de prix élevés sur le court terme s’étaient renforcés, n’écartant plus la possibilité de monter ses taux directeurs d’ici la fin de l’année.
Les pressions inflationnistes sont moindres en France que chez ses grands partenaires européens. Bruxelles prévoit 2,8% dans l’Hexagone en 2022 et 1,7% en 2023, après 2,1% l’an dernier. En Allemagne, la hausse des prix atteindrait 3,7% cette année. Elle serait à 3,6% en Espagne et 3,8% en Italie, contre 3,9% pour l’UE dans son ensemble.
En matière de croissance, la France et l’Allemagne devraient faire jeu égal cette année avec une hausse du PIB de 3,6%, contre 4% pour l’UE. L’Espagne (+5,6%) et l’Italie (+4,1%) rattraperaient leur retard après une récession bien plus sévère en 2020.
Les incertitudes entourant les prévisions économiques “restent élevées”, a toutefois souligné M. Gentiloni. En particulier, l’inflation pourrait augmenter davantage que prévu si les hausses de prix se répercutent sur les salaires, augmentant encore les coûts des entreprises. Mais un tel phénomène “n’est pas perceptible pour l’instant”, a rassuré M. Gentiloni, lors d’une conférence de presse.
Les tensions géopolitiques autour de l’Ukraine constituent un autre risque important. La Russie est en effet de loin le premier fournisseur de gaz de l’Europe et une confrontation militaire avec Moscou pourrait propulser les prix de l’énergie vers des sommets jamais atteints.
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