Les dix travaux de Di Rupo: les entreprises et les investissements publics (6/10)
Les gouvernements belges n’investissent pas suffisamment pour maintenir le niveau du stock de capital public. Le traitement en parent pauvre de l’immobilier nous coûte de plus en plus cher. “Parent pauvre” est le terme qui convient à la façon dont les gouvernements de ce pays gèrent les investissements publics. Au début des années 80, la Belgique consacrait encore 4,5% de son PIB à la construction de ports, de routes et d’autres infrastructures.
Ces dépenses ont été victimes de l’assainissement des finances publiques dans les années quatre-vingt. En dix ans, les investissements publics ont dégringolé à moins de 2% du PIB et continuent à fluctuer à ce niveau. L’année passée, le taux d’investissement public s’est chiffré à un misérable 1,7% du PIB, bien en dessous des 2,3% de moyenne de la zone euro. La Belgique, le pays qui a le plus intérêt à jouer la carte de sa situation centrale, investit le moins dans ce domaine.
Les 7 milliards d’euros investis par les gouvernements belges ne suffisent pas à faire face à l’usure naturelle de l’infrastructure existante. Selon les chiffres de la Banque Nationale, entre 1990 et 2003, les investissements publics nets étaient presque inexistants alors que la majorité des pays européens ajoutent en moyenne un petit 1% à leur infrastructure. Durant la décennie écoulée, la situation a à peine changé.
En d’autres termes, notre stock de capital stagne depuis des années. Les trous dans les routes sont encore réparés, mais les grands investissements en nouvelles infrastructures se font attendre et les investissements destinés à en augmenter la valeur sont très difficiles à trouver. L’infrastructure de base en déclin est un autre poison insidieux qui infecte la compétitivité de l’économie belge.
“Un manque d’investissements publics peut menacer l’infrastructure, en particulier le réseau de transport et de communication” a averti la Banque Nationale. Une étude économique démontre qu’une bonne infrastructure joue un rôle décisif dans l’attractivité de l’économie belge. L’infrastructure est également cruciale pour les prestations économiques des régions les plus dynamiques.
Il y a du pain sur la planche et certainement pas uniquement pour le gouvernement fédéral. Les compétences et les moyens relatifs aux investissements publics ont été éparpillés suite à la succession de réformes de l’état. Le gouvernement fédéral est toujours compétent pour les investissements publics dans l’aviation et les chemins de fer, avec une dotation à la SNCB de 3 milliards d’euros comme plus grand poste de dépenses.
Les régions sont quant à elles responsables du cadre économique large, ce qui implique surtout des investissements publics en infrastructure routière et en recherche et développement.
Et les communautés doivent veiller au capital humain par le biais de l’enseignement même si ces dépenses ne sont pas inscrites en tant qu’investissement public dans la comptabilité de l’état.
Finalement, les villes et les villages jouent également un rôle clé dans les investissements purement publics. Les gouvernements locaux prennent environ 40% de tous les investissements publics en compte, avec un cycle d’investissements reflétant le cycle électoral.
Traditionnellement, les investissements au niveau local se multiplient 18 à 6 mois avant les élections locales pour retomber ensuite.
Les communes n’arrivent pas à suivre par manque de moyens et d’investissements publics. Ce n’est pas une question financière, mais plutôt une conséquence de choix politiques. Avec des dépenses publiques qui s’élèvent à plus de la moitié du PIB et qui dépassent de loin la moyenne européenne, la Belgique pourrait investir davantage afin d’accumuler un bonus compétitif.
Ces dernières décennies, les gouvernements successifs ont choisi de consacrer l’accroissement de ressources fiscales à la sécurité sociale en partie motivés par le vieillissement qui augmente les coûts des pensions et de la santé publique. Ces quinze dernières années, les dépenses publiques ont grimpé plus rapidement que le PIB alors que les investissements publics ont stagné.
D’autres tâches de base du gouvernement fédéral, telles qu’une justice qui fonctionne bien, ou des administrations efficaces, risquent d’en pâtir.
Trop peu d’investissements en R&D
Il est noble d’investir en personnes plutôt qu’en briques, mais sans bonne infrastructure de base et compétitivité ce choix est surtout difficile à financer. Cet handicap peut être vaincu en lançant des produits qualitatifs et innovateurs, mais ici aussi nous menaçons d’encourir du retard. La Belgique investit 0,6% du PIB en moyens publics en recherche et développement, ce qui n’atteint pas les 0,65% de la moyenne européenne et reste loin des investissements de nos concurrents et partenaires commerciaux les plus importants, l’Allemagne, la France et les Pays-Bas, qui investissent entre 0,8% et 0,9% en R&D.
Les entreprises publiques: d’effroyables à exemplaires
L’état joue un rôle important en tant qu’un entrepreneur public. Les entreprises publiques dont l’état est plus ou moins propriétaire comblent un certain nombre de manques sur le marché. La SNCB, bpost, Belgacom et Brussels Airport sont les entreprises publiques les plus connues. Il est remarquable que ce soit les entreprises soumises à la concurrence privée qui réussissent à engranger d’importants bénéfices en efficacité. Dans ce domaine, le parcours de bpost devenu une entreprise performante et prête à entrer en bourse est exemplaire.
À l’opposé, il y a le groupe SNCB qui constitue un triste exemple d’inefficacité et de stagnation politique. Si une entreprise comme la SNCB peut difficilement être privatisée à cause de son monopole naturel, cela ne signifie pas pour autant que l’état ne doive pas justifier ses dépenses. Le long blocage autour des nominations démontre que les motifs politiques dominent encore trop souvent le souci de faire fonctionner les entreprises publiques de façon efficace.
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