Le retour du PS protecteur et sauveur de la Belgique sauvera-t-il sa campagne?

Paul Magnette bat le rappel dans tous les médias. BELGA PHOTO LAURIE DIEFFEMBACQ
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

A la peine dans les sondages, le président socialiste, Paul Magnette, revient avec les vieilles recettes: sauver la Belgique, augmenter les salaires, éviter les coupes sombres du MR et de la N-VA… Mais quelque chose a changé durant cette campagne. Cela passera ou cela cassera.

Le PS est en difficulté. Troisième parti à Bruxelles dans les sondages, au coude-à-coude avec le MR en Wallonie, il pourrait perdre son statut de premier parti francophone, le 9 juin. En outre, son allié de coeur, Ecolo, est à la traîne. Même le PTB s’essoufle. La dynamique est favorable au centre-droit, MR et Engagés. C’est toutefois loin d’être fini: l’électeur est souverain et, surtout, il reste 30% d’indécis, au bas mot.

Qui plus est, on connaît la capacité de mobiliser du parti socialiste, susceptible de mettre en ordre de bataille toutes ses fédérations, ses sections et des relais syndicaux ou mutuellistes. Son président, Paul Magnette, multiplie les interventions pour battre le rappel et mettre en garde contre les “dangers” qui nous guettent. Tant dans son face-à-face contre Bart De Wever, mercredi soir, qu’à la RTBF, jeudi, le bourgmestre de Charleroi a multiplié les avertissements.

Mais cela fonctionnera-t-il?

Les vieilles recettes

Le discours est classique. Un: la N-VA est là pour scinder le pays et son allié naturel pour ce faire serait le MR, Georges-Louis Bouchez ayant même “négocié un accord” sur le plateau de la VRT avec Jan Jan Jambon (N-VA), ministre-président flamand. Si l’on passe sur l’exubérance du propos, la stratégie du PS est bien de remettre l’avenir de la Belgique au coeur de la dernière ligne droite de la campagne. Face à De Wever, Magnette a même relancé la vieille rengaine: “Si vous partez, la Wallonie et Bruxelles continueront la Belgique.” Le président de la N-VA, médusé, s’est demandé publiquement si le PS n’était pas lui-même le fossoyeur du pays.

C’est un revival des dernières campagnes, mais cela pourrait avoir son effet. “Et soudain, la fin de la Belgique redevient un thème brûlant de la campagne“, titrait le Tijd au lendemain du débat. Sauf que de nombreuses voix, modérées également, considèrent que la Belgique ne fonctionne pas de façon optimale et qu’il est temps de changer.

Deux: le souvenir du gouvernement MR/N-VA, qui a gouverné de 2014 à 2019 avec l’Open VLD et le CD&V, est ravivé à chaque instant comme étant celui qui a désinvesti massivement dans les structures publiques. S’il est exagéré, le propos est aussi complété d’une mise en garde contre les coupes sombres annoncées par le MR et la N-VA après le 9 juin, notamment 6 milliards dans la sécurité sociale.

Paul Magnette répète, aussi, un élément de langage fort: “Le PS n’entrera pas dans un gouvernement sans une hausse des salaires de 300 euros”. Il promet bien sûr de revaloriser les soins de santé et de garantir les pensions ad vitam. Comment? On ne trouve guère d’autres éléments de langage que la possibilité d’aller chercher “5 à 6 milliards de plus” dans les poches des plus riches. Qui est vraiment dupe?

Un autre contexte

Ce double discours pourrait permettre au PS de grignoter quelques suffrages susceptibles de préserver son leadership francophone. Mais cela pourrait aussi… provoquer l’effet inverse, tant quelque chose semble avoir changé da-urant cette campagne. La tonalité du président du PS est sans doute la plus “populiste” de cette fin de campagne. Même le MR de Georges-Louis Bouchez paraît, par moments, modéré, le Montois se contentant de “rester dans les rails” de ce qu’il a semé – et qui semble porter.

Dans les électorats de classes moyennes, l’injustice sociale, le fait de travailler dur pour donner de l’argent aux “assistés”, les questions d’insécurité et d’immigration sont en train de tailler des croupières dans le récit socialiste. Du moins, ce sont là les analyses des politologues et les retours de terrain évoqués du côté libéral, tandis que les Engagés profitent de ce positionnement à gauche toute (dans les mots, du moins) pour rivaliser avec le PS au centre.

L’autre contexte, ce sont encore les propos de Bart De Wever qui résonnent de façon étonnante en Wallonie, la difficulté des verts de part et d’autre, ainsi que le travail de fond du PTB qui mine la capacité de mobilisation syndicale. Quant à Paul Magnette lui-même, il se dit qu’il joue gros et qu’on pourrait l’évincer si le résultat est mauvais, alorsqu’il rêve du Seize. C’est d’autant plus imaginable que le PS est écartelé avec les fédérations bruxelloise et liégeoise qui sont ouvertement ulcérées.

Pour le PS, cela ressemble bien à un avertissement en retour: cela passe ou cela casse. Et dans ses rangs, au sommet, on doit en être conscient.

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