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Le retour de l’État édredon

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

À force d’avoir le nez sur l’actualité du jour, on en oublierait d’observer les grandes tendances ; on serait comme ce serpent qui, lorsqu’il mue, est aveugle. C’est justement l’intérêt de l’ouvrage de François Lenglet, mon confrère de TF1 et de LCI, qui sort un livre sur la crise actuelle.

Ce qui m’a intéressé et que je partage avec vous, c’est qu’il constate que la génération actuelle est en demande de davantage de protection. Après plusieurs décennies de libéralisme, on le voit chaque jour, la population est moins demandeuse de liberté, mais de davantage de protection de la part de l’État édredon. La génération des baby-boomers, celle qui est pensionnée maintenant ou au cimetière, elle, avait une soif de liberté totale. Les baby-boomers se sont révoltés contre leurs parents, nous dit François Lenglet, parce que ceux-ci étaient marqués par les guerres et recherchaient l’ordre et la sécurité. Résultat, leurs enfants, les grands-parents d’aujourd’hui, sont à l’origine de Mai 68 et de ses libertés extrêmes.

Mais c’est aussi cette génération qui a libéralisé l’économie au fur et à mesure qu’elle venait au pouvoir et sur le marché du travail, mais comme le fait encore une fois remarquer François Lenglet : “l’excès de liberté ramène immanquablement à une demande d’ordre, qui elle-même au bout des quelques décennies, se caricature et se dénature au point de réveiller le besoin de liberté”. Ce que mon confrère veut dire par là, et il n’y a qu’à regarder autour de nous pour s’en convaincre, c’est que chaque génération prend le contrepied de celle qui la précède avec l’illusion de construire un monde nouveau; alors que faisant le contraire de ses parents, elle retombe en réalité dans les erreurs de ses grands-parents.

En clair, l’histoire économique, et l’histoire tout court, ne serait qu’une rotation des idées et des hommes, et la seule chose à retenir, c’est que c’est durant ces transitions (comme celle que nous vivons maintenant avec la transition énergétique) qu’il faut être prudent, car ce sont ces périodes de rotation, de transition qui sont les plus dangereuses. C’est en fait le monde ancien qui craque alors que le monde nouveau n’arrive pas encore à s’imposer.

Il semblerait que nous soyons en pleine rotation d’un monde à un autre, et c’est là où j’ai un scoop à vous annoncer : l’histoire montre selon François Lenglet que ces transitions durent en moyenne une vingtaine d’années. Pourquoi ? Parce qu’une transition ne se fait pas d’un coup sec, elle est ponctuée de crises, de soulèvements et de conflits. C’est normal personne ne change de gaité de coeur, ni vous, ni moi, ni les entreprises, ni les États. Personne ne change uniquement sous l’effet de la bonne volonté. Ce sont même les élites, contrairement à ce qu’on pense, qui ont le plus de mal à changer, car ce sont elles qui ont le plus à perdre.

Mais il y a bonne nouvelle, je vous disais qu’historiquement une transition d’une société vers une autre prenait en moyenne 20 ans. Si on part du principe que notre transition a démarré avec la crise financière, donc en 2008, cela signifie que nous avons déjà 15 ans de transition derrière nous. En d’autres mots, nous avons déjà passé les trois quarts de cette transition sans nous en rendre compte. Voilà ce sont sans doute des propos giflant, mais ils ont le mérite de nous faire réfléchir. Et vous, vous en pensez quoi ?

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