Amid Faljaoui
Le libéralisme expliqué par son pire ennemi: Donald Trump
On ne dit pas assez merci dans ce monde de brutes. Alors allons-y: merci Donald Trump!
Merci, cher Donald, d’avoir démontré à la planète entière — sans le vouloir, bien sûr, ce serait trop beau — que la mondialisation, même bourrée d’imperfections, restait tout de même préférable à une guerre commerciale menée à coup de tweets capricieux.
Grâce à toi, cher Donald, nous savons désormais ce qu’il en coûte de jouer avec les droits de douane comme un enfant joue avec des allumettes dans une usine de feux d’artifice. À force de dresser des murs tarifaires un peu partout, le commerce mondial commence à ralentir, l’inflation repointe son nez (celle qu’on croyait morte et enterrée quelque part entre 2010 et 2020), la croissance s’essouffle, et le monde s’est découvert allergique aux frontières économiques.
Dette publique
Perdant-perdant, voilà le modèle que tu as promu. Bravo ! Les prix augmentent, les usines ralentissent leur cadence, les entreprises freinent leurs investissements, les exportateurs hurlent de douleur et… qui trinque ? Les classes populaires, évidemment. Celles que tu prétends défendre à grands coups de casquette rouge. Mais bon, on ne va pas t’en vouloir : tu viens d’offrir au monde la meilleure démonstration “par l’absurde” et in vivo de ce que les économistes libéraux essaient d’expliquer depuis trente ans. Merci Donald.
Mais ce n’est pas tout. Le professeur Donald a aussi donné un petit cours surprise sur… la dette publique.
Rappel des faits : le 9 avril dernier, notre showman décide de reporter une partie de ses droits de douane (sauf sur la Chine, faut pas exagérer quand même, il faut bien un ennemi de connivence). Pourquoi ? Révélation : ce n’est pas par bonté d’âme, ni par souci de stratégie économique fine. C’est juste que le marché obligataire lui a mis une baffe. Une très grosse baffe.
Même le président des États-Unis peut se faire corriger par un tableau Excel géant appelé “marché obligataire”.
En clair, les taux d’intérêt sur la dette américaine ont flambé, envoyant un petit mot doux à la Maison Blanche façon Mafia : “Tu veux jouer avec l’économie ? Très bien. Mais sache que nous, les marchés, on peut te faire plier en 48h chrono.” Résultat des courses : Trump a reculé. Et voilà la dette publique qui, soudain, redevient un problème sérieux. Incroyable, non ?
Un bazar monstre
Finies, les phrases magiques du style proférées par le PS, le PTB en Belgique ou LFI en France, du genre : “On ne rembourse jamais la dette”, “Y’a qu’à faire comme pendant le Covid”, ou encore “La dette, c’est une invention néolibérale”. Non. Là, même la première puissance mondiale s’est fait recadrer par le marché. Comme un ado par ses parents quand il veut sortir en semaine : “Non Donald, tu ne fais pas ce que tu veux.”
Et là encore, malgré lui, merci Donald ! Tu viens d’envoyer un message à tous les partisans d’une dette magique, illimitée, sans conséquences. Non, on ne peut pas tout financer. Non, les marchés ne sont pas des bisounours en costard. Et oui, une hausse de taux peut tout gripper : l’investissement des entreprises, le crédit immobilier des ménages, la croissance pour tous.
En somme, cher Donald, tu auras réussi ce que peu d’hommes politiques ont fait avant toi : expliquer l’économie mondiale avec clarté… en foutant un bazar monstre.
Libéralisme VS populisme
Alors vraiment, merci Donald. Merci d’avoir prouvé que le libéralisme, même mal foutu, vaut mieux qu’un populisme fiscal de comptoir. Merci d’avoir rappelé que la dette publique, c’est pas Monopoly. Et surtout, merci d’avoir démontré que même le président des États-Unis peut se faire corriger par un tableau Excel géant appelé “marché obligataire”, comme Liz Truss en a fait l’amère expérience en 2022. Souvenez-vous, à l’époque, l’ancienne premier Ministre de la Grande-Bretagne n’est pas restée plus de 44 jours au pouvoir. Elle avait d’abord sacrifié son ministre des finances pour cacher sa bourde, avant que son parti ne la sacrifie quelques jours plus tard sur l’autel du Dieu “marché obligataire”. Un Dieu qui ne tweete pas, ne s’exprime pas, mais se contente de froncer les sourcils pour se faire écouter.
Allez, sans rancune Donald. Et à bientôt pour ton prochain cours d’économie involontaire. Et merci à mon ami Philippe Manière de l’agence de communication Vae Solis (Paris) de m’avoir inspiré – aussi involontairement – ce “point final”.
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