Le Conseil d’État épingle l’exit tax prévue par le gouvernement : quelles conséquences ?

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Sébastien Buron
Sébastien Buron Journaliste Trends-Tendances

Le Conseil d’État recale la nouvelle exit tax de l’équipe fédérale, qu’il juge juridiquement fragile. Selon lui, la Belgique conserve son pouvoir d’imposition sur les actionnaires résidents, même en cas de transfert de siège de la société à l’étranger. L’avis rendu ne devrait toutefois pas avoir d’impact sur l’exit tax relative à la taxe sur les plus-values.

Le Conseil d’État vient de rendre un avis critique à l’égard de la nouvelle exit tax (taxe à la sortie) introduite dans le projet de loi-programme, destiné à mettre en œuvre une taxe à la sortie applicable en cas de transfert de siège à l’étranger d’une société belge, ou lors d’une opération assimilée, rapporte ce mardi L’Echo.

Pouvoir d’imposition

Selon le Conseil d’État, la condition pour mettre en place le dispositif ne semble pas être remplie. Motif ? La Belgique ne perdrait en réalité pas son pouvoir d’imposition, du moins vis-à-vis des actionnaires résidents. Par exemple, si une société belge transfère son siège vers le Luxembourg, les distributions ultérieures (dividendes, bonis de liquidation, etc.) resteraient imposables en Belgique pour les actionnaires qui y résident.

L’explication ? “Si la Cour de justice de l’Union européenne admet que les exit taxes peuvent être considérées comme des entraves à la liberté d’établissement, elles ne peuvent néanmoins être justifiées que si elles permettent de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre États membres. Autrement dit, il faut que l’État d’origine soit effectivement empêché d’exercer son pouvoir d’imposition sur les revenus concernés du fait du transfert”, indique Denis-Emmanuel Philippe, avocat associé chez Bloom Law.

Taxe sur les plus-values ?

Le revers enregistré par l’Arizona pourrait-il avoir des conséquences sur le dispositif de la nouvelle taxe sur les plus-values. Un dispositif dont on sait qu’il prévoit aussi l’instauration d’une nouvelle exit tax destinée à empêcher l’évitement du nouvel impôt : en cas de transfert de résidence, les plus-values sur les actifs financiers du contribuable qui émigre seront censées être réalisées, ce qui déclenchera la taxation des plus-values au taux de 10 %. 

Comme le fait observer Denis-Emmanuel Philippe, il convient de ne pas confondre les deux taxes à la sortie envisagées actuellement par le gouvernement. “Le Conseil d’Etat ne s’est pas encore prononcé sur l’exit tax accompagnant la taxation des plus-values sur actifs financiers. A mon avis, si cette dernière taxe à la sortie entrave la liberté européenne d’établissement, elle peut parfaitement se justifier par le fait que la Belgique sera à l’avenir (après le déménagement du contribuable) effectivement empêchée d’exercer son pouvoir d’imposition sur les plus-values.”

Pour Denis-Emmanuel Philippe la raison est évidente : “Le contribuable quitte ici l’orbite fiscale belge. Toute la question est de savoir si cette taxe à la sortie est bien proportionnée. Suivant la première mouture du projet de loi-programme, le contribuable peut demander d’étaler le paiement de l’exit tax sur 5 ans. Ce qui signifie qu’en cas de déménagement, le contribuable serait tenu de payer l’exit tax par tranches sur 5 années, même s’il n’a pas encore réalisé de plus-value sur ses actifs financiers. Ceci peut engendrer des problèmes de liquidités : c’est ce qu’on appelle dans le jargon ‘tax without cash’. Pour éviter tout problème sur le terrain de la proportionnalité, il est probable que la mouture définitive prévoira plutôt un système permettant de ne payer l’exit tax qu’en cas de réalisation effective d’une plus-value après le déménagement”, ajoute le fiscaliste.

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