La marche en avant de l’extrême droite, menace pour la démocratie et l’économie

Marine Le Pen et Tom Van Grieke en 2019. BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le Vlaams Belang et le Rassemblement national visent les 30% aux élections de juin. Leur programme n’est pas très favorable à une économie de marché ouverte, ni à une Europe unie. Voici pourquoi cela représente un triple danger.

Les démocrates peuvent commencer à s’inquiéter, tout comme les milieux économiques. En Flandre et en France, l’extrême droite marche désormais avec confiance vers les élections du 9 juin prochain (un scrutin multiple chez nous, seulement européen chez nos voisins).

En fin de semaine dernière, un nouveau sondage a fait l’effet d’une bombe en Flandre, les résultats du coup de sonde instantané De Standaard/ VRT plaçant le Vlaams Belang à 27,8%; tandis que la N-VA passerait sous les 20%. Le parti de Tom Van Grieken vise désormais les 30% et le coup de massue pour se rendre si pas incontournable, à tout le moins problématique pour la formation des majorités.

30%, c’est le résultat que l’on promet en France au Rassemblement National de Marine Le Pen, désormais bien installé comme seule alternative d’opposition au “macronisme”. Dimanche, à Marseille, le lancement de la campagne du RN ressemblait déjà à une grande fête “bleu-blanc-rouge” aux cris de “On va gagner” et “Marine présidente”, même si les présidentielles n’auront lieu qu’en 2027.

Un triple danger

Ces victoires annoncées reflètent à la fois un air du temps – marqué le désaveu citoyen et la crainte mêlée d’un régressement économique et identitaire – et une forme de “paresse démocratique”, pour reprendre les termes du politologue Carl Devos dans Le Soir. Avec l’accoutumance médiatique à la présence de l’extrême droite en Flandre et en France, ces partis semblent appelés à gouverner. Et se sont dotés d’une apparence respectable, même si la menace réelle. A trois niveaux, au moins.

Démocratiquement, l’extrême droite reste peu soucieuse de l’Etat de droit et reste ancrée dans une logique de “préférence nationale” susceptible de donner lieu à des dérives. Elle surfe sur une vague populiste anti-migratoire, comme en témoigne la ligne dure de l’AfD en Allemagne (avec son plan d’expulsion massive des immigrés), un parti dont le RN et le Vlaams Belang sont les alliés. Plus directement, un score massif de ces partis rendra la gouvernance déjà complexe de nos pays encore plus difficile.

Economiquement, tant le Vlaams Belang que le Rassemblement National sont historiquement des partis… plutôt ancrés du côté de la gauche radicale. Leur populisme induit une générosité sociale peu consciente des enjeux budgétaires. Les milieux patronaux, en Flandre singulièrement, s’inquiètent d’ailleurs de cette marche en avant. En raison du blocage politique que cela peut provoquer, mais aussi des choix économiques que cela entraînerait. Le Vlaams Belang a d’ailleurs entamé une opération de séduction auprès du patronat pour tenter d’effacer cette image.

Enfin, sur le plan géopolitique, l’Europe a bien du souci à se faire. Si le terme de Frexit a disparu du disours du RN, si l’indépendance de la Flandre n’est plus brandie par le Vlaams Belang, leur logique reste nationaliste. Dimanche, à Marseille, Marine Le Pen a d’ailleurs tenu un discours vigoureux sur ‘l’Europe des nations”, avec une tonalité très anti-européenne telle qu’on la retrouve chez le Hongrois Viktor Orban. Sur le plan du conflit en Ukraine, on n’a guère entendu, dans son chef, de résistance à l’égard de la Russie de Vladimir Poutine – qui avait financé son parti par le passé.

Or, face aux défis de l’Europe, du renouveau industriel à la transition éneegétique en passant par la défense de nos intérêts sur la scène internationale, jamais nous n’avons eu autantv besoin de l’Europe. Vanter la force des Etats en Europe est un leurre face à des géants comme les Etats-Unis, la Chine, l’Inde et la Russie.

Ce triple danger, dit-on, finira bien par être géré au lendemain du scrutin. Mais avec des scores fleuves comme ceux que l’on annonce, la marche en avant de l’extrême droite risque d’être plus qu’un avertissement ou un vote sanction de plus. Ce sera un poison dont on ne mesure peut-être pas assez les effets.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content