La France veut mobiliser l’épargne pour lutter contre le réchauffement climatique : qu’en est-il en Belgique ?

Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Alors qu’en Belgique les politiques veulent contraindre les banques à augmenter les taux d’épargne, la France discute d’un nouveau livret d’épargne pour sauver le climat.

En Belgique, les épargnants doivent déjà se contenter d’un taux d’intérêt de base de 1 % sur leur compte d’épargne. Pour l’instant, la banque en ligne MeDirect offre le taux d’intérêt le plus élevé sur un compte d’épargne réglementé, à savoir 1,2 %. En plus du taux d’intérêt, les épargnants peuvent empocher une prime de fidélité supplémentaire s’ils laissent leur argent dans la même banque pendant plus d’un an. Il n’existe aucun compte d’épargne dans notre pays où la somme des intérêts et de la prime dépasse 2,5 %.

Ce faible taux d’épargne irrite de nombreux hommes politiques, mais la plupart des propositions sont rejetées par les régulateurs bancaires parce qu’elles présentent des risques pour la stabilité du système bancaire. En septembre, un bon d’État, d’une durée d’un an et assorti d’un taux de retenue à la source réduit (15 % au lieu de 30 %), sera mis en circulation pour concurrencer le compte d’épargne. Avec son propre compte de dépôt électronique, le gouvernement belge ne veut pas faire face à cette concurrence, car son taux d’intérêt a été plafonné à 2,5 % brut en avril. Il ne reste donc que 1,75 % net.

Les livrets d’épargne français rapportent plus

Les Français font les choses différemment. Depuis février, les épargnants français bénéficient d’un taux d’intérêt de 3 % sur le Livret A et le Livret de développement durable et solidaire (LDDS)). Toutefois, ces comptes d’épargne sont plafonnés et il n’est possible d’ouvrir qu’un seul compte de chaque type. Un maximum de 22 950 euros peut être déposé sur le Livret A, tandis qu’un maximum de 12 000 euros peut être déposé sur le LDDS. L’argent de ces comptes d’épargne est centralisé à la Caisse des dépôts et consignations et est utilisé pour le logement social et la rénovation urbaine. Il existe également un livret d’épargne populaire (LEP), destiné aux personnes à faibles revenus, dont le taux d’intérêt est doublé (6 %).

Le 21 juillet, juste avant la pause estivale, le Parlement français a décidé de créer un quatrième instrument pour booster l’épargne. Le plan d’épargne avenir climat (PEA climat) vise à mobiliser l’épargne privée pour financer la transition vers une industrie française plus verte. Les parents pourront ouvrir le plan d’épargne pour leurs enfants à la naissance. Les enfants ne pourront pas retirer l’argent avant leur dix-huitième anniversaire.

A quoi ressemble le plan d’épargne climat français ?

À l’origine, l’idée était que l’État rajoute de 50 à 500 euros à chaque ouverture d’un tel plan d’épargne climatique. Cette idée n’a cependant pas été retenue dans le texte de loi final en raison du coût élevé pour l’État français. Il n’y a pas non plus de taux d’intérêt garanti, mais le législateur part du principe que le rendement sera plus élevé que celui du livret A car il s’agit d’un placement sur plusieurs années. Il n’y a pas non plus de garantie de capital comme pour le livret d’épargne. L’idée est que les gestionnaires placent l’argent de manière de plus en plus prudente pour les enfants qui approchent de l’âge de 18 ans, afin de garantir le capital.

66 milliards d’euros par an seraient nécessaires pour réduire à zéro les émissions de gaz à effet de serre de la France d’ici 2050. Pour la seule industrie, il faudrait environ 50 milliards d’euros d’investissement par an, dont 30 milliards rien que pour les sites qui polluent le plus. Pour cette transition, le gouvernement français souhaite mobiliser l’épargne des Français. Une épargne estimée à plusieurs milliers de milliards d’euros, avec plus de 500 milliards d’euros sur les livrets d’épargne réglementée et 1 900 milliards d’euros sur les contrats d’assurance-vie. Avec le PEA climat, le gouvernement français espère capter 1 milliard d’euros pour les solutions climatiques.

Comment les Belges peuvent-ils mettre leur argent au service de l’écologie ?

En Belgique, les livrets d’épargne représentent environ 300 milliards d’euros. Seules deux banques, VDK et Triodos, proposent en Belgique des livrets d’épargne qui répondent aux critères du label belge Towards Sustainability, un label pour les produits d’épargne ou d’investissement durables. Comme en France, les intérêts des livrets d’épargne sont exonérés d’impôt jusqu’à 980 euros par personne. Au-delà de ce plafond, un précompte mobilier de 15 % est en principe dû sur les intérêts. C’est toujours moins que le taux d’imposition normal de 30 %.

Fonds d’investissement et produits d’assurance durables

Les Belges disposent d’un peu moins de 280 milliards d’euros de produits d’assurance et de 260 milliards d’euros de fonds d’investissement. Les personnes qui souhaitent investir leur argent dans la lutte contre le changement climatique disposent d’un choix plus large. Sur le site web Towards Sustainability, les gens peuvent effectuer des recherches et filtrer par type de produit en fonction de critères qu’ils jugent importants, tels que l’exposition maximale aux combustibles fossiles.

Obligations vertes

De plus en plus d’entreprises émettent également des obligations vertes pour financer des projets ayant un impact positif sur le climat ou l’environnement. Les particuliers qui souhaitent investir peuvent souscrire directement ou investir par l’intermédiaire de fonds qui investissent dans des obligations contribuant à financer l’écologisation de l’économie. Ils peuvent être facilement trouvés sur le site web Towards Sustainability, en effectuant une recherche avec le terme green bond.

Une étude réalisée par la Banque Nationale de Belgique à la fin de l’année dernière a montré que notre pays est quelque peu à la traîne par rapport aux pays voisins, où le choix est plus large et où les obligations vertes représentent une part plus importante des portefeuilles d’obligations. Outre les obligations vertes, il existe également des obligations sociales ou durables, dont les fonds sont investis dans des projets ayant un impact social ou des objectifs à la fois verts et sociaux.

Pas d’incitations fiscales

Contrairement à nos voisins du sud, il n’existe pas encore d’incitations fiscales dans notre pays pour encourager les assureurs, les gestionnaires d’actifs ou les fonds de pension à adopter une politique d’investissement plus durable. Les épargnants n’ont pas non plus d’incitation financière pour des produits d’épargne ou d’investissement verts.

Outre les livrets d’épargne, le gouvernement belge encourage aussi fiscalement les Belges à épargner pour une pension complémentaire par le biais de l’employeur (deuxième pilier de la pension) ou à épargner pour leur propre compte (troisième pilier de la pension). Pour le deuxième pilier de la pension, plus de 100 milliards d’euros ont été investis. Pour le troisième pilier, c’est deux fois moins. Si la plupart des gestionnaires de fonds de pension se préoccupent un peu de la durabilité, il reste de la marge. D’autant plus qu’il n’est pas toujours évident pour ceux qui reçoivent leur capital de savoir à quoi a servi leur argent.

Les conditions météorologiques extrêmes de ces dernières semaines prouvent pourtant qu’il y a un grand besoin d’investissement.

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