Rudy Aernoudt
“La fin de la Belgique pourrait bien être économique”
Le gros problème de la Belgique, ce sont ses déficits budgétaires, les plus importants d’Europe, qui se traduisent par une énorme dette publique.
Le mois de mars sera celui de la dernière chance pour une réalisation majeure de la coalition Vivaldi, avec à l’ordre du jour les réformes de la fiscalité et du système de retraite. Cependant, de par mon expérience en tant que chef de cabinet, je sais que la fièvre électorale pousse la plupart des partis à penser à leur intérêt personnel plutôt qu’au bien commun. Les chances que la montagne accouche d’une souris sont donc extrêmement élevées. Pourtant, les réformes sont cruciales pour la survie de la Belgique.
Le gros problème de la Belgique, ce sont ses déficits budgétaires, les plus importants d’Europe, qui se traduisent par une énorme dette publique. Vous pouvez réduire vos dettes de trois manières : les laisser s’évaporer partiellement par l’inflation – ce qui se produit également dans une mesure limitée -, les rembourser ou les transmettre aux générations futures. Ce que nous faisons aujourd’hui, c’est faire peser la dette sur les épaules des générations futures, en appauvrissant nos enfants et petits-enfants.
Stagnation en 2023
Nous n’avons pas profité des bonnes années économiques pour réduire les dettes. Au contraire, elles ont continué à augmenter. Avec des taux d’intérêt nuls, la dette était gratuite.
Mais comme toute chose gratuite, cela ne dure pas longtemps. Le taux d’intérêt de la Banque centrale européenne est passé de zéro à 2,5 % et selon les attentes, il devrait encore augmenter pour atteindre 3,25 % dans le courant de l’année. Les emprunts sont donc de plus en plus coûteux, même pour le gouvernement. En effet, l’inflation reste élevée, estimée à 6,2 % pour 2023. En revanche, la croissance économique flirte avec la croissance zéro et est estimée à 0,2 %. Techniquement, nous ne nous retrouvons pas en récession mais plutôt en stagnation (croissance stagnante et inflation).
La fin de la Belgique pourrait bien être économique.
Il est désormais possible d’alimenter l’économie grâce aux investissements publics. Cette politique dite keynésienne est également appelée deficit spending.
Mais ce n’est plus possible en Belgique car nous avons déjà les déficits les plus élevés d’Europe. En outre, l’impact du gouvernement est déjà beaucoup trop important. La Commission européenne a calculé que l’impact du gouvernement sur l’économie belge était de 55,6 %.
Gigantesque, et supérieure de 10 points de pourcentage à la moyenne européenne. Des études montrent que le niveau optimal d’intervention de l’État dans des pays comme la Belgique se situe entre 35 et 42. Nous avons déjà largement dépassé cet optimum et la réduction du gouvernement est donc le meilleur choix économique, en dehors de toute idéologie.
Une restructuration est la seule solution
La dette publique s’élève aujourd’hui à 520 milliards d’euros et augmente de 507 euros par seconde. La dette s’élève à 106 % du produit intérieur brut. Chez nos voisins du Nord, il est de 49 %.
Mais avec les déficits publics les plus importants d’Europe, ces dettes continuent d’augmenter. Avec des réformes structurelles des retraites et du marché du travail, nous passerons à 80 % d’ici 2050, selon les simulations de l’OCDE. Sans réforme, la dette atteindra, oui, 180 % du PIB en 2050. Nous pourrons alors dire que la Belgique est virtuellement en faillite et qu’elle peut déposer le bilan.
Non, la fin de la Belgique ne sera pas communautaire, mais sans réformes structurelles, elle pourrait être économique. Cela implique un appauvrissement collectif. N’est-ce pas une motivation suffisante pour essayer de mettre de côté pour un temps l’intérêt de son parti en faveur du bien commun, même un an avant les élections ?
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