La Belgique et la France en difficulté face à la réforme des règles budgétaires européennes

Le Président français Emmanuel Macron et le Premier ministre Alexander De Croo (de dos) font face à la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen le 30 juin 2023 à Bruxelles. © Getty images

Quel chantier qu’est celui sur la réforme budgétaire de l’UE. Celle-ci se retrouve coincée entre la réalité budgétaire de pays endettés et l’intransigeance de l’Allemagne.

Le 26 avril dernier, la Commission européenne a proposé un nouveau cadre budgétaire pour l’Union européenne, la qualifiant de “la plus complète des règles de gouvernance économique de l’UE depuis la crise économique et financière.” Principal objectif : réduire les niveaux d’endettement public de manière “réaliste.” 

L’idée est d’adapter les plans de réduction de la dette à chaque État membre ayant dépassé la limite des 60% du PIB. A savoir qu’aujourd’hui, les niveaux de dette publique ont atteint une moyenne de 90% du PIB dans l’ensemble de l’Union. Ces plans devront s’étaler sur quatre ans, jusqu’à sept si et seulement si le pays en question peut fournir des garanties suffisantes en termes d’investissement et de réformes structurelles.

Si ces plans devaient être jugés seulement sur l’analyse de viabilité de la dette (AVD, basée sur la croissance, les projections d’inflation, les coûts liés au vieillissement de la population…) pays par pays, sous la pression de l’Allemagne qui craint trop de laxisme, d’autres critères se sont ajoutés. Il faudrait ainsi maintenir le plafond du déficit public en dessous des 3%, et réduire ce déficit de 0,5% du PIB par an au minimum pour tout pays dont le déficit annuel dépasse la limite des 3%.

6 milliards d’euros d’économie par an pour la Belgique

Bruegel, un Think Thank européen spécialisé en économie, a souhaité tester ce nouveau règlement, estimant qu’une approche basée sur l’AVD serait selon eux préférable. L’organisation a ainsi produit un document de 70 pages évaluant les implications d’ajustement budgétaire pour tous les pays de l’UE dont la dette est supérieure à 60% ou dont le déficit est supérieur à 3% du PIB.

L’étude de Bruegel montre que pour une période d’ajustement de quatre ans, la Belgique, tout comme la France, devrait ajuster son solde primaire structurel à 1,1% du PIB chaque année entre 2025 et 2028.

Pour la Belgique, cela signifierait une réduction des dépenses ou une augmentation des impôts d’environ 6 milliards d’euros par an (et 30 milliards pour la France). Cette situation serait similaire pour l’Italie, la Slovaquie, la Slovénie, et la Bulgarie. Des ajustements “complètement irréalistes” selon Jeromin Zettelmeyer, directeur de Bruegel et l’un des auteurs de l’étude, alors auditionné par la commission des affaires économique du Parlement européen.

Dans le cas où la Belgique et la France pourraient prétendre à un allongement de sept ans de la période d’ajustement (2025-2031), on descendrait à un solde primaire structurel de 0,6% du PIB par an pour la première, et 0,4% pour la deuxième. Soit environ 3,3 milliards d’euros par an de réductions de dépenses ou d’augmentations d’impôts pour la Belgique. C’est environ 11 milliards pour la France. 

Dans les résultats de leurs recherches, les auteurs du document ont constaté que le cadre proposé nécessiterait un ajustement budgétaire “ambitieux” : en moyenne, plus de 2% du PIB à moyen terme, en plus de l’ajustement déjà prévu pour 2023-2024. Toutefois, Bruegel indique que pour la plupart des pays très endettés, ces exigences sont inférieures à celles qu’implique le cadre actuel.

Enfin, les auteurs du document estiment que la méthodologie de l’AVD de la Commission est “raisonnable”, mais qu’elle mériterait d’être revue. Ils préconisent que cette révision se fasse par un groupe d’experts indépendants en consultation avec la Commission, les États membres et d’autres parties prenantes, et approuvée par le Conseil. Ils recommandent également d’approuver la proposition de la Commission une fois les “aspects ambigus” clarifiés; la sauvegarde de la dette et les autres sauvegardes supprimées ou modifiées; la procédure de déficit excessif (au dessus des 3%) réformée; et un processus de révision de la méthodologie de l’AVD initié. Rien que ça.

Les institutions de l’Union européenne souhaitent finaliser la procédure d’ici la fin de l’année, afin que les plans spécifiques à chaque pays puissent être élaborés en 2024.

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