La baisse de la productivité, problème majeur, grand oublié de la Belgique et de l’Europe
Le sujet est largement ignoré du débat public, mais il est pourtant un des principales clés du redressement économique de nos pays. Or, la productivité ne croît plus de façon suffisante depuis le début des années 2000. Trois actions sont possibles.
Dans l’euphorie des Jeux olympiques, les propos de l’économiste Patrick Artus, aux Echos, passeront sans doute inaperçus. Ils mettent toutefois le doigt sur un problème majeur. “Depuis 2017, la création de richesses en France ne résulte que de la hausse du taux d’emploi. En revanche, la productivité du travail a chuté a fortement chuté.” Or, durant la campagne des législatives, chez nos voisins, le sujet a été largement ignoré.
“Quand on regarde le tableau économique d’ensemble, tout démarre pourtant par la production, constate, dans le même quotidien, Denis Ferrand, directeur général de l’institut Rexecode, proche du patronat. Penser d’abord la redistribution, c’est ne pas tenir compte de la façon dont s’organisent les flux économiques.” Cela rejoint les mots du patronat en Belgique: “Avant de redistribuer le gâteau, il faut le faire grossir“, disait encore le week-end dernier, au Soir, Pieter Timmermans, administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB).
Une baisse constante
Chez nous, l’avènement de majorités de centre-droit au fédéral et en Wallonie devrait mettre le sujet davantage sur la table. Le problème est toutefois aussi criant qu’en France. Le dernier rapport du Conseil national de la productivité, en décembre dernier, le rappelait à suffisance.
“La croissance de la productivité a systématiquement diminué au cours des 5 dernières décennies, soulignait-il. Dans les années 70, lorsque la Belgique réalisait des gains de productivité en intégrant les technologies américaines, la croissance de la productivité atteignait encore 4,5 % par an en moyenne. Depuis les années 2000, elle n’est plus que de 0,8 % par an en moyenne.”
“La phase de rattrapage étant désormais terminée, il convient de déplacer la frontière technologique, ce qui constitue un défi bien plus grand, poursuivait l’instance. En outre, la croissance de la productivité peut s’attendre à être fortement freinée par le changement climatique, notamment parce que les investissements dans le capital productif et l’innovation sont sacrifiés au profit d’investissements dans la transition climatique et l’adaptation au changement climatique.”
Attention, danger.
Trois réponses
“Les politiques visant à stimuler la productivité sont peut-être plus importantes aujourd’hui que jamais“, estimait dès lors le Conseil. En soulignant que des solutions existent, de tois ordres.
Premièrement: “Assurer une offre suffisante de main-d’œuvre qualifiée”. “Ce défi nécessite une action dans plusieurs domaines, soulignait le rapport. Par exemple, il est important de remédier aux pénuries de main-d’œuvre et à l’inadéquation des compétences, notamment en renforçant l’activation des groupes défavorisés sur le marché du travail. La formation est essentielle de manière générale. (…) Mais il importe également de renforcer la formation en continu.”
Deuxièmement: “Garantir des investissements publics suffisants”. “La croissance de la productivité nécessite également des investissements suffisants dans des infrastructures de qualité, souligne le Conseil. En Belgique, les investissements publics demeurent faibles depuis de nombreuses années. En conséquence, on observe même une tendance à la baisse du stock de capital net des administrations publiques exprimé en % du PIB depuis les années 1990, ce qui nuit à la qualité de l’infrastructure publique et pèse également sur les investissements privés. Ceci alors que les transitions écologique et numérique exigent une augmentation des investissements, y compris publics.” La soutenabilité des finances publiques reste un souci, mais une mobilisation de l’épargne, par exemple, pourrait y contribuer.
Troisièmement: “Stimuler l’innovation”. “La Belgique est considérée comme un leader de l’innovation au niveau européen, mais il importe de comprendre pourquoi la forte augmentation des dépenses de R&D de ces dernières années ne s’est traduite que par une faible croissance de la PTF, au niveau macroéconomique du moins, dit le rapport. En effet, au niveau des entreprises, les dépenses de R&D sont fortement concentrées dans un nombre limité d’entreprises qui présentent généralement un niveau de productivité élevé.” Bref, il faut généraliser la démarche.
Comme on le dit vulgairement, il n’y a plus qu’à…
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