Guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis : déjà un impact sur la BCE ?

La préidente de la BCE, Christine Lagarde. REUTERS/Kai Pfaffenbach © REUTERS

Le marché s’attend à une nouvelle baisse des taux en mars. Mais la nouvelle guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine peut-elle changer la donne ?

Avec les nouvelles taxes d’importation américaines contre la Chine, et les répliques de Pékin, la guerre commerciale entre les deux pays vient de prendre un nouveau tournant. L’Europe pourrait également bientôt être visée par de nouvelles taxes américaines… mais l’affrontement entre les deux superpuissances économiques pourrait aussi déjà avoir un impact sur l’Europe. Ainsi que sur la politique monétaire et les taux d’intérêt.

Concrètement, la baisse des taux que le marché attend à la réunion de mars pourrait être remise en question. C’est ce que laisse entendre le gouverneur de la Banque d’Italie,  Piero Cipollone, auprès de Reuters. “La hausse des prix de l’énergie et les tensions commerciales mondiales poussent la BCE dans différentes directions, et il n’y a donc pas lieu de s’engager sur une mesure spécifique pour l’instant”, explique-t-il.

US vs. Chine… et l’Europe ?

Les taxes d’importation pourraient faire repartir l’inflation à la hausse, notamment par une perturbation des chaines d’approvisionnement. Dans ce cas, la BCE serait tiraillée : d’un côté, l’économie au ralenti depuis deux ans a besoin de taux bas pour redémarrer. De l’autre côté, une nouvelle hausse de l’inflation pourrait demander une hausse des taux, pour calmer l’envolée des prix.

L’inflation n’est d’ailleurs pas le seul risque pour l’Europe. Il y a effectivement aussi celui du ralentissement. D’un côté, si les États-Unis et/ou la Chine, clients importants de l’Europe, sont affaiblis par la guerre commerciale, cela se sentira dans les exportations européennes. Puis la Chine essayerait de trouver d’autres débouchés pour les produits qu’elle ne peut plus vendre aux États-Unis, inondant alors l’Europe et noyant les entreprises européennes.

Le hic, c’est que cette guerre commerciale plonge le monde dans l’incertitude. Certains économistes décrivent les politiques de Trump de “laboratoire économique” : on ne sait pas vraiment prédire vers où elles peuvent mener.

Vers un rythme plus lent ?

Le rythme des baisses de la BCE pourrait donc ralentir. Elle a réduit les taux lors de toutes ses réunions depuis septembre (quatre fois d’affilée donc), après une première baisse en juin. Mais le cycle de baisses n’est pas encore arrivé à son terme, assure l’Italien.

“Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il est encore possible d’ajuster les taux à la baisse”, continue-t-il, “Nous sommes presque arrivés à notre objectif… et nous sommes toujours en territoire restrictif.” L’objectif est une inflation à 2%, de manière stable. Elle est actuellement à 2,5%, après un rebond surprise en janvier.

“La compréhension globale de la direction que nous prenons est là, les fondamentaux n’ont pas changé, donc je ne m’attends pas à un grand changement de direction. Cette convergence avec l’objectif d’inflation est cohérente avec une trajectoire de baisse des taux d’intérêt”, détaille-t-il.

Mais tous ne sont pas pessimistes pour la réunion de mars. Pour Mathieu Savary, stratégiste européen en chef chez BCA Research par exemple, la baisse des taux pourrait continuer sur sa lancée, de réunion en réunion. “La BCE maintient son cap et ne voit pas de raison de réévaluer sa politique jusqu’à ce que le taux de dépôt atteigne 2 % en juin, ou son estimation de la neutralité. Au-delà, nous prévoyons deux ou trois baisses supplémentaires : la croissance des salaires retombera à 2 %, les bénéfices des entreprises s’affaiblissent et, surtout, la politique commerciale des États-Unis reste un frein majeur à l’activité économique européenne”, commente-t-il.


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