Rudy Aernoudt
Gestion: Pays-Bas – Belgique, 7-0
J’ai décidéde participer aux traditionnels tops et flops de fin d’année en organisant un petit match entre les Pays-Bas et la Belgique, deux pays dont l’amour vache se reflète jusque dans l’humour. Les blagues des Belges portent souvent sur le caractère économe de leurs voisins. Et les Néerlandais ont surnommé la Belgique l'” Absurdistan “…
Ces clichés cachent-ils une part de vérité ? Le gouvernement néerlandais totalise 16 ministres et secrétaires d’Etat. En Belgique, nous avons six gouvernements pour 62 postes de ministres et de secrétaires d’Etat : quatre fois plus pour une population moindre ! Les ministres néerlandais ont leur propre administration mais aucun cabinet. Chaque ministre belge dispose d’un cabinet employant jusqu’à 85 personnes, soit environ 4.500 cabinettards. Reste à comparer si cela entraîne une gestion plus efficace des ressources publiques.
Match économique Pays-Bas – Belgique. L’excédent budgétaire des Pays-Bas s’élève à + 1,8 %, soit 12 milliards d’euros. La Belgique s’est quant à elle creusé un déficit de 2 %, soit 7,8 milliards d’euros. Point ! 1-0
Grâce à l’excédent budgétaire des Pays-Bas, le ratio dette/PIB du pays diminue de 350 euros par seconde et s’établit désormais à 66 % du PIB. Chaque Néerlandais endosse aujourd’hui une dette publique de 24.000 euros. En raison du déficit budgétaire belge, le ratio dette/ publique sur PIB du pays augmente de 470 euros par seconde et s’établit désormais à environ 100 % du PIB. Chaque Belge endosse aujourd’hui une dette publique de 43.500 euros. 2-0.
Le rôle de l’Etat dans l’économie (dépenses publiques/PIB): 42 % aux Pays-Bas, contre 52 % en Belgique. 3-0.
Des études ont démontré que plus le rôle que joue l’Etat dans l’économie est élevé, plus l’esprit d’entreprise du pays est faible (on parle d’une corrélation de -63 %). Est-ce le cas ici ? Le Global Entre- preneurship Monitor a calculé que, sur 100 personnes aux Pays-Bas, 10 sont impliquées dans des activités entrepreneuriales. Chez nous, ce chiffre est de 4. Et dans les 62 pays étudiés, les Pays-Bas se classent au premier rang en termes d’entrepreneuriat féminin. La Belgique occupe la 60e place du classement. 4-0.
L’entrepreneuriat a une corrélation négative significative avec les dé- penses publiques, mais aussi une corrélation positive (+ 61 %) avec la croissance économique. En d’autres termes, moins l’Etat s’implique dans l’économie, plus la croissance économique est élevée. La croissance économique des Pays-Bas est de 2,8 %, soit le double de celle de la Belgique qui ne s’élève qu’à 1,4 %. 5-0.
N’oublions pas les impôts. Pour comparer, prenons un exemple concret : une personne célibataire sans enfant. Aux Pays-Bas, l’OCDE a calculé qu’elle payera en moyenne 30 euros d’impôts par tranche salariale de 100 euros. La charge fiscale personnelle la plus élevée de tous les pays de l’OCDE est celle imposée aux célibataires belges : ceux-ci paient en moyenne 40 euros d’impôts par tranche salariale de 100 euros. 6-0.
Heureusement, on peut se consoler en rappelant que les Pays-Bas et la Belgique ont tous deux relevé l’âge de la pension à 67 ans. Exact. Mais attention ! Les Néerlandais partant à la retraite perçoivent une pension légale nette moyenne de 105 % (oui, vous avez bien lu) du dernier salaire. En Belgique, ce chiffre est de 63 %, 7-0 : victoire des Pays-Bas par KO.
Et les clichés ? En ce qui concerne l’épargne des Pays-Bas, la partie du revenu disponible épargnée est de 16,8 % contre 11,5 % en Belgique. Ceux qui se moquent de la radinerie batave peuvent donc continuer. Mais ils ne devraient pas oublier de souligner l’absurdité de la Belgique : un pays où l’Etat ne cesse d’intervenir dans l’économie, où les pensions sont très faibles, où le taux d’imposition est le plus élevé… mais qui peut se vanter d’avoir le plus de ministres et des cabinets gigantesques.
Certains pointeront la mentalité néerlandaise. Le protestantisme est, par exemple, beaucoup plus tolérant à l’égard de la richesse que le catholicisme. Il y a 115 ans, le sociologue Max Weber déclarait qu’il y avait un lien entre le protestantisme et l’émergence du capitalisme, pour lequel il faut non seulement travailler dur mais aussi être économe afin de pouvoir investir.
La sécularisation de la société nous permettra peut-être de prendre les Pays-Bas comme référence. Cela signifierait : réduire la dette (via des excédents budgétaires) et le nombre de ministres, abolir les cabinets, réduire l’impact du gouvernement sur l’économie, simplifier la structure de l’Etat, réduire les impôts, augmenter les pensions et stimuler l’esprit d’entreprise. Impossible ? Nos voisins y arrivent bien. Pourquoi les Belges devraient-ils continuer à accepter de faire pénitence pour des décennies de mauvaise gestion de la dette et d’administration exécrable ?
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