Panneaux solaires, compteurs digitaux… Faut-il toujours croire les politiques?
Pas toujours. Pour la première fois, un tribunal vient de reconnaître qu’un ministre en fonction a trompé l’opinion.
C’est un peu comme dans un conte de fées. Il suffit de placer des panneaux solaires pour voir son compteur électrique tourner à l’envers et, dès lors, sa facture d’énergie réduite. Convaincu de la justesse de son idée, Bart Tommelein, alors ministre en charge de l’Energie, prend son bâton de pèlerin et multiplie les promesses. Lorsque fin 2018, ce dernier troque son portefeuille ministériel contre l’écharpe maïorale d’Ostende, la Limbourgeoise Lydia Peeters prend la relève. Séduits, des milliers de particuliers couvrent leurs toitures de panneaux solaires, piochant si nécessaire dans leurs économies pour en financer le placement.
Emportés par leur enthousiasme, tous deux ont ignoré les mises en garde du Conseil d’Etat ainsi que celles, pourtant réitérées, du régulateur flamand de l’énergie (VREG). Le compteur digital pointait en effet à l’horizon avec, dans son sillage, la crainte de perdre au change. Les anciens compteurs effectuent certes en permanence la balance entre électricité consommée et électricité produite mais contrarient grandement la volonté du gouvernement flamand d’inciter le consommateur producteur à consommer directement l’énergie produite plutôt que de l’injecter dans le réseau. D’où la mise en place progressive de compteurs numériques qui, mesurant les flux entrants et sortants, permettent une double facturation considérée par le consommateur comme moins avantageuse. Les élections de 2019 approchant, le gouvernement flamand décide que les personnes qui installeront des panneaux solaires jusqu’en 2020 inclus bénéficieront encore pendant 15 ans des avantages du compteur inversé, même si elles possèdent déjà un compteur digital. Près de 140.000 installations sont placées en 2020. Un record. Quinze jours plus tard, la Cour constitutionnelle annule ce règlement qui porte indéniablement les traces de la précipitation dans laquelle il a été conçu. Tous les consommateurs ne sont pas traités d’identique manière et, en la circonstance, le gouvernement flamand a manifestement outrepassé les règles répartitrices de compétences, empiétant à la fois sur celles du fédéral et sur celles du régulateur.
Plus de 100.000 propriétaires de compteurs digitaux sont directement touchés.
Promesses non tenues
Plus de 100.000 propriétaires de compteurs digitaux sont directement touchés. “Sous la législature précédente, des promesses ont été faites mais n’ont pu être tenues”, est bien forcée de reconnaître Zuhal Demir, la nouvelle ministre en charge de l’Energie qui, pour calmer l’indignation grandissante, octroie à ces derniers une compensation financière directe. Les autres, au nombre d’un demi-million, recevront une offre de compensation lorsqu’ils changeront de compteur. Pas vraiment satisfaits, des milliers de propriétaires se tournent vers la justice qui vient de leur donner raison. Dans leur communication, estime le tribunal de première instance de Bruxelles, Bart Tommelein et Lydia Peeters auraient dû préciser que d’autres instances (en l’occurrence la Cour constitutionnelle) devaient encore marquer leur accord. Une victoire morale, indubitablement, mais sans plus dans le mesure où le tribunal ne leur a accordé aucune indemnité financière.
Guillaume Capron
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