Vive l’indexation automatique ?
Comme le montre la Banque nationale, l’indexation automatique des salaires a permis à l’économie belge de mieux résister en 2023. Mais elle n’a pas que des effets positifs.
Ce lundi, la Banque nationale a confirmé les grandes tendances de ses projections précédentes. Après les 3% de croissance engrangés en 2022, année de redémarrage après le choc de la crise sanitaire, cette année devrait se terminer sur une croissance moyenne de 1,5%. Elle serait suivie par 1,3% l’an prochain, soit un rythme proche de celui du potentiel de notre économie.
En soi, c’est une performance, surtout quand on compare ces projections à celles des pays voisins. Les perspectives de croissance de la zone euro sont en effet plus faibles : 0,6% attendu cette année et 0,8% seulement l’an prochain.
Vive l’indexation automatique !
Ce qui soutient le dynamisme de l’économie belge, c’est deux choses. D’une part, un investissement des entreprises en croissance de 8,6% cette année et de 4,3% l’an prochain. Les économistes de la BNB sont un peu circonspects face à ces chiffres qu’ils n’expliquent pas vraiment. Ils ne peuvent émettre que des conjectures : peut-être que les tensions sur le marché du travail et les marges assez fortes accumulées ces dernières années ont incités les entreprises à accélérer leur digitalisation, dans un monde ou, en moyenne, les machines ont tendance à devoir obsolètes plus rapidement ?
Mais le grand moteur de soutien, c’est la consommation des ménages, qui a progressé de 1,4% cette année et devrait afficher 1,7% de hausse l’an prochain. Cette dynamique est portée par l’indexation automatique des salaires, qui a gonflé les revenus des Belges et les portent à consommer davantage que les voisins.
Les prévisions des années suivantes montrent en revanche un retournement de tendance. La zone euro devrait monter en puissance et afficher une croissance de 1,5% en 2025 et 2026. Mais la Belgique devrait faire moins bien, avec une croissance de 1,2% et 1,3% pour la même période. Et là encore, c’est en raison de l’évolution des salaires : dans les pays voisins, le rattrapage salarial après une bouffée d’inflation se fait en retard par rapport à notre pays.
Typiquement belge
« C’est quelque chose qui est particulier à l’économie belge, et particulièrement aujourd’hui, explique Pierre Wunsch, le gouverneur de la Banque nationale. Avec l’indexation automatique des salaires nous avons aussi une politique budgétaire qui a tendance à être très favorable en période de crise, poursuit-il. Et typiquement, lorsque l’économie redémarre, le redémarrage a tendance à être un peu moins fort en Belgique ».
Mais l’indexation automatique a un autre impact. Car si elle soutient la demande domestique, elle accentue aussi la perte de parts de marché de nos entreprises à l’exportation. « Les pertes de parts de marché sont en partie inévitables parce que la croissance mondiale est supérieure à la croissance belge. Mais la partie la plus préoccupante est que nous avons à certains moments des pertes de compétitivité », note Pierre Wunsch.
Travail à la marge
Alors bien sûr, la compétitivité ne se résume pas à l’écart salarial, mais quand même : l’indexation automatique des salaires est un handicap. En moyenne, en raison de l’écart de croissance potentielle entre notre pays et le monde, la part de marché des entreprises belges se réduit de 0,8% par an. Mais avec la forte hausse des salaires, plus rapide chez nous que chez nos voisins, la perte de part de maché va s’élever à 1% cette année et 1,9% l’an prochain.
Est-ce à dire qu’il faut relancer le débat sur l’indexation ? Pierre Wunsch ne le pense pas « L’indexation est là pour rester ». Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas du travail possible à la marge. « Il y a eu des périodes où, lorsque des gouvernements précédents ont pris des mesures pour restaurer la compétitivité, nous avons regagné des parts de marché ou en tout cas nous en avons perdu moins que ce qui était « naturel » de perdre », rappelle le gouverneur de la BNB.
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