Les rêves brûlés de Conner, les espoirs de Bart et le rêve éveillé de Paul

Bart De Wever et Paul Magnette en septembre 2022. BELGA PHOTO BENOIT DOPPAGNE
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Tandis que Vooruit panse ses plaies après le dérapage raciste de son ex-président, De Wever lorgne vers le Seize, mais doit surtout lutter contre le Belang. Magnette commence à rêver en couleurs. Mais les Régions pourraient dicter le ton.

Conner Rousseau, étoile filante de Vooruit, avait tous les atouts pour devenir un très jeune Premier ministre après les élections du 9 juin . Il avait redonné des lettres de noblesses à son parti en l’unifiant, donné un autre ton à la politique en Flandre et permis au socialisme de repasser la barre des 15%. Surtout, il avait noué une relation à la fois constructive et rivale avec la N-VA de Bart De Wever, susceptible de composer un axe flamand pour dicter le tempo fédéral. Une nuit d’ivresse et un dérapage raciste sidérant en ont décidé autrement.

La nouvelle présidente intérimaire, Melissa Depraetere, est une proche de Conner Rousseau. Elle s’est fait un nom à la tête du groupe de la Chambre, mais sa notoriété reste à construire. Jeune et ambitieuse, elle a tout pour prolonger la mission de son ami Conner, mais il faut d’abord éteindre l’incendie. Après avoir défendu leur président démissionnaire sur tous les canaux, parlant de chasse aux sorcières, les ténors socialistes flamands reconnaissent désormais que ses mots étaient bien racistes et que la boisson ne les justifiait pas. Tout en affirmant qu’il pourrait jouer un rôle à l’avenir…

En attendant, voilà qui est susceptible de rebattre les cartes à sept mois des élections. Même s’il sera intéressant de voir le score promis par Vooruit après cet épisode… dont l’impact pourrait être surprenant au nord du pays.

L’espoir de Bart, le rêve de Paul

Dans la presse flamande de ce mardi, on réveille la perspective de voir Bart De Wever briguer le 16, rue de la Loi. Pour autant que cela permette une avancée en terme de contenus, sans appliquer le programme du PS “comme le fait aujourd’hui Alexander De Croo”, murmerait-on au sein du parti. Ce dessin est toutefois compliqué, d’autant que la N-VA a pour priorité de combattre le Vlaams Belang, que les sondages annoncent peremier parti de Flandre à plus de 25%. Dans un tel contexte, et sauf big-bang institutionnel, jouer la carte belge n’est pas le plus aisé pour elle.

Surtout, certains au sein de la N-VA… ne verraient pas d’un mauvais oeil une coalition avec un Vlaams Belang débarrassé de ses éléments les plus extrémistes. Bart De Wever lui-meme a déjà dit qu’il était impossible de travailler avec Tom Van Grieken… dans l’état actuel de ses troupes.

Si la déconvenue de Conner Rousseau irrite le PS francophone, elle pourrait toutefois doper le rêve éveillé du prétendant le plus “évident”: Paul Magnette, président du PS. Son parti se porte bien dans les derniers sondages, la famille socialiste devrait être la première du pays (forcément, la N-VA ne peut y prétendre) et le bourgmestre de Charleroi n’a pas caché qu’il saisirait une opportunité à laquelle il avait renoncé en au profit d’Alexander De Croo. D’ailleurs ,il cherche à être présent tout en… se préservant: ne refuse-t-il pas de participer aux savonneux débats entre présidents de parti en affirmant vouloir la parité des sexes?

Et si les Régions dictaient le ton?

Pour Paul Magnette, le rêve reste toutefois suspendu à plusieurs hypothèques. Un, devenir Premier d’un gouvernement fédéral avec la N-VA (ce qui semble inéluctable) nécessiterait d’importante concessions. Deux, Paul Magnette affirme également sa volonté de mettre en place la majorité la plus progressiste possible, un pcte avec la N-VA ne s’inscrit pas dans ce choix. Trois, dans le jeu complexe de notre pays, être favori à ce poste de Premier ministre est souvent un désavantage: les derniers locataires du Seize n’appartenaient-ils à un parti qui ne dominait pas?

Surtout, les Régions pourraient dicter le ton. Après les élections du 9 juin, le scénario le plus plausible reste que les Régions décident en priorité de composer leur majorité: autour de la N-VA en Flandre, du PS en Wallonie, voire du MR à Bruxelles. L’hypothèse est d’autant plus crédible que les présidents de parti voudront donner un signal à leurs électeurs dans la perspective… des élections communales d’octobre, qui joueront un rôle important.

Dans les faits, on aurait alors une sorte de Belgique confédérale avant la lettre. Les espoirs des uns et des autres prendraient alors l’allure d’un nouveau marathon pour tenter de fédérer le pays.

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