L’axe MR/N-VA se resserre avant des discussions budgétaires en forme de stress test pour l’Arizona

Prime Minister Bart De Wever and MR chairman Georges-Louis Bouchez pictured during the congress of french liberal party MR, Sunday 14 September 2025 in Walibi, Wavre. BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK
Baptiste Lambert

L’invitation surprise de Bart De Wever au congrès de rentrée du MR n’est pas anodine. Au-delà de tout ce qui rassemble désormais le parti libéral et la N-VA, les deux formations vont devoir se serrer les coudes en vue des discussions budgétaires. Georges-Louis Bouchez met une pression considérable en projetant un nouvel effort de 20 milliards d’euros.

Une lune de miel pour une autre. Si la relation entre le MR et Les Engagés se dégrade à vue d’œil, les liens qui se tissent entre le MR et le parti nationaliste vont en grandissant. D’abord sur le fond, comme aime le rappeler Georges-Louis Bouchez, “le MR et la N-VA ont 95% de leur programme en commun”.

À l’exception de l’institutionnel, il est vrai que les deux formations politiques se sont accordées sur quasiment tous les dossiers de l’Arizona : la réforme du marché du travail, la réforme des pensions, la réforme fiscale, l’asile et la migration et enfin la délicate question du conflit israélo-palestinien. Cette dernière a clairement montré une ligne de démarcation dans la coalition fédérale.

20 milliards supplémentaires

Un autre dossier sera encore plus déterminant : les discussions budgétaires reprennent, mais la trajectoire se dégrade. À l’effort initial de 23 milliards d’euros, le président du MR ajoute un effort supplémentaire de 20 milliards d’euros. Dans La Dernière Heure, ce week-end, Bouchez explique tenir ses chiffres du Bureau du plan. “Si certains viennent avec d’autres chiffres, ça veut dire qu’ils changent l’objectif. Moi, je reste en conformité avec l’objectif”, assure le Montois.

En juin dernier, dans ses perspectives économiques, le Bureau du Plan faisait effectivement part d’une dégradation du déficit plus importante que prévu. Après avoir tablé sur un déficit de 3% en 2029, le gouvernement fédéral a visé les 3,7% en fin de législature. Selon le BFP, ce devrait plutôt être de l’ordre de 5,5%.

En cause, des effets retour trop optimistes et des recettes en baisse suite à la réforme fiscale à venir. Entre autres, le BFP suivait les constatations de Banque nationale et du Conseil supérieur de l’emploi : le taux d’emploi de 80% ne devrait pas être au rendez-vous.

Baisse des dépenses

Sans surprise, c’est du côté de la baisse des dépenses qu’il faut jeter un œil, selon le libéral. Il y a encore du gras, notamment au niveau des dépenses de personnel de l’Etat. Selon Georges-Louis Bouchez, toute une série de tâches peuvent désormais être traitées par l’IA. Ce matin sur LN24, il s’en prend aussi aux mutuelles : “On pourrait libérer une partie du personnel qui pourrait accompagner les personnes pour retourner à l’emploi plutôt que d’encoder du matin au soir des fiches de remboursement.”

Plus fondamentalement, le président appelle à un changement de paradigme : l’Etat, comme il le répète souvent, n’a pas vocation à s’occuper de tout et prend trop de place. Il faut repenser le tout : “Notre système est terminé. Ce mode de financement de la Sécurité sociale avec les cotisations des travailleurs, l’augmentation annuelle des dépenses, l’administration qui à la taille qu’elle a… c’est fini !”, indique-t-il encore dans La DH.

“Ces 20 milliards doivent pour 60 à 65% être consacrés en réductions de dépenses“, a confirmé le libéral, en Congrès de rentrée, à Walibi, ce dimanche, aux côtés de Bart De Wever. Le reste, explique-t-il, doit venir “d’un accroissement de notre croissance”. Comment ? “Avec les réformes déjà prises”, affirme-t-il avec aplomb.

Il est vrai que les réformes de l’accord de Pâques (reforme du chômage, surtout) nous conduisent dans un nouveau monde dont il est difficile, même pour les institutions de référence, de prédire les conséquences. En outre, les estimations du mois de juin précèdent l’accord d’été qui a entériné la réforme du marché du travail (heures supp’, préavis, horaires en accordéon), la réforme des pensions et la réforme fiscale.

Autrement dit, le doute d’une embellie économique est encore permis.

L’affrontement

Ce qui ne fait pas beaucoup de doute, c’est que de nouvelles baisses des dépenses ne font clairement pas partie des priorités des Engagés, du cd&v et de Vooruit. Sur La Première, la semaine dernière, Maxime Prévot, vice-premier ministre de l’Arizona, a remis en doute l’objectif de 3% de déficit, le qualifiant “d’excessif”.

Ce dimanche, dans De Zondag, Jean-Luc Crucke, ministre de la Mobilité, qualifie l’effort supplémentaire de 20 milliards d’euros demandé par Bouchez “de cinéma”. “Il dit quelque chose de différent chaque jour. Je n’écoute pas ça. Je me concentre sur la voie convenue par le gouvernement.”

Voilà qui préfigure un nouvel affrontement. Et en ce sens, le rapprochement du MR et de la N-VA à ce moment crucial de l’Arizona n’est pas anodin. Il est clair que la N-VA s’inscrit dans l’objectif du MR de plutôt viser les dépenses publiques que l’augmentation de la pression fiscale. Mieux, Jan Jambon a plaidé dimanche sur VTM pour des baisses d’impôts, pour stimuler la consommation, comme les accises, par exemple. A contrario, la marge pour des impôts supplémentaires est très limitée, selon lui.

L’ampleur de l’effort semble toutefois différer entre le MR et la N-VA. Les nationalistes avancent un retour à un déficit de 3% en deux temps, avec un premier objectif intermédiaire de 4,5% en 2029, ce qui correspond déjà à un effort de 12 milliards d’euros. Une ouverture parait donc possible puisque les Engagés plaident également pour un retour à l’équilibre en 2032.

Pas pressé

Mais on peut compter sur Bouchez pour maintenir la pression. Et il n’est pas pressé. “Pour moi, l’objectif est plus important que la date. La seule vraie date, la date limite, c’est le 31 décembre 2025.” Et tant pis si l’Europe attend un objectif pour la mi-octobre. “La Commission européenne, vous leur racontez une histoire et après,
vous modifiez quand même votre budget et vous lui racontez une autre histoire. C’est un peu du cirque, en fait. Parce qu’on va négocier avec eux et qu’ils ne sanctionnent jamais”, avance le libéral dans La DH.

Pour Bouchez, il faut profiter de ces quatre mois pour repenser le budget de l’Etat de fond en comble.

Ce qu’on sait, c’est que la nouvelle nomenclature des critères de Maastricht s’attarde surtout sur le niveau des dépenses primaires. Or l’écart entre les objectifs de réduction des dépenses (3,6% en 2025, 2,5% en 2026 et 2027, puis 2,1% en 2028 et 2029) et la réalité en 2029 est pour le moment évalué à près de 9 milliards d’euros. C’est le seuil minimum sur laquelle l’Arizona doit s’entendre.

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