La guerre contre l’inflation et contre le chômage n’est pas gagnée en Belgique

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Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Les dernières prévisions du Bureau du Plan montrent de faibles créations d’emplois, une inflation bien supérieure à l’objectif de 2% et un taux de chômage en hausse pour cette année. Cela, sans tenir compte de l’impact des mesures du nouveau gouvernement.

Le Bureau du Plan a publié ses prévisions économiques pour cette année – la Banque nationale le fera lundi – et elles annoncent une petite montée en régime de l’économie belge qui, après avoir engrangé une petite croissance de 1% l’an dernier devrait passer à 1,2% en 2025. Mais, mais, mais ….

Ces prévisions ne tiennent pas compte des derniers événements, belges (les décisions prises par le nouveau gouvernement)  et étrangers (les premiers jours de la présidence de Trump et leur impact sur le commerce mondial), – et elles sont donc à prendre avec des pincettes.

Les ménages consomment plus que leurs revenus

Pour le plan, « la consommation des ménages reste le principal moteur de la croissance cette année, tandis que la croissance des investissements des entreprises s’accélère légèrement. En outre, la progression du PIB en 2025 est moins freinée par les exportations et les investissements en logements des ménages enregistrent une timide reprise. En revanche, la consommation et les investissements des pouvoirs publics progressent beaucoup plus lentement qu’en 2024 ».

Le point le plus intéressant dans ces prévisions est la dynamique de consommation des ménages, une consommation « qui croît plus rapidement que le pouvoir d’achat », note le Bureau du Plan.  L’an dernier, les revenus disponibles des Belges (corrigé de l’inflation) ont presque stagné (ils enregistrent une hausse de 0,4% et devraient progresser de 0,8% cette année), handicapés par la faiblesse des créations d’emplois et la fin des mesures de soutien liées à l’énergie. Mais les dépenses de consommation ont augmenté de 1,8% en 2024. Pour financer ces dépenses, les ménages ont donc puisé dans leur épargne, et ils continueront à le faire cette année. Le Plan table sur un taux d’épargne qui  tomberait à 12,2% cette année, alors qu’il était à 14,1% en 2023 et 13% l’an dernier.

La guerre contre l’inflation n’est pas gagnée

Sur le plan de l’inflation, la guerre n’est pas encore gagnée, et la hausse des prix ne sera pas encore stabilisée à 2% cette année. En janvier 2025, l’inflation a même rebondi à 4,1%, poussée par la hausse des prix des titres-services (surtout en Région flamande), des tarifs de distribution et de transport d’énergie (électricité et gaz) et par la hausse du prix de l‘eau. « Les effets à la hausse de ces facteurs sur l’inflation ne disparaîtront qu’en janvier 2026 », souligne le Bureau du Plan, qui table sur une inflation (indice national des prix à la consommation) de 2,8% cette année, soit à peine plus faible que les 3,1% constatés l’an dernier. L’indice santé progresserait de 3,0%, contre 3,3% en 2024.

Un chômage en hausse

Les prévisions concernant l’emploi sont également intéressantes, car elles fixent l’effort que devra faire le nouveau gouvernement, qui s’est fixé comme objectif d’atteindre un taux d’emploi de 80% pour les 20-64 ans. Le petit rebond prévu par le plan cette année devrait se traduire, toutes choses restant égales, c’est -à-dire sans tenir compte des mesures du gouvernement, par une petite augmentation des créations d’emplois, même si la dynamique de ces dernières années n’est pas spécialement élevée : les créations d’emplois sont passées de 95.500 en 2022 à 39.600 en 2023 et à 13.500 en 2024. Cette faiblesse est imputable au secteur marchand, « où la croissance de l’activité a fortement ralenti à mesure que le mouvement de rattrapage post-Covid s’est estompé, alors que la croissance de la productivité s’est accélérée l’an passé », note le Plan qui table sur une petite réaccélération cette année, avec 23.900 créations d’emplois. Mais cela ne devrait pas faire bouger le taux d’emploi des 20-64 ans, qui devrait se maintenir à 72,2%. « L’essentiel de l’augmentation de l’emploi concerne en effet les personnes âgées de 65 ans et plus, compte tenu du relèvement de l’âge légal de la pension et de la nouvelle hausse du nombre de pensionnés occupant un flexi-job », explique le Plan.

Tâche herculéenne pour l’Arizona

La tâche du gouvernement se complique encore avec l’augmentation de la population active, qui devrait gonfler de 48.800 personnes cette année, portée par « la forte augmentation de la participation des plus âgés suite au relèvement de l’âge légal de la pension à 66 ans ».

Le plan estime donc que, toutes choses restant égales, la croissance de l’emploi n’absorbera qu’une partie de la hausse de la population qui va se présenter sur le marché du travail,  ce qui devrait entraîner une nouvelle hausse du taux de chômage, qu’on le calcule selon le concept administratif (dans ce cas, il passerait de 9,2% en 2024 à 9,5% cette année), ou selon le taux harmonisé européen d’Eurostat (il passerait de 5,7% en 2024 à 6,1% en 2025).

Cela montre la tâche herculéenne qu’il faudra déployer pour atteindre les 80% de taux d’emploi au terme de la législature.

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