Comment l’Allemagne est devenue la nouvelle Grèce, du point de vue de la BCE

La présidente de la BCE, Christine Lagarde, et le chancelier allemand Olaf Scholz. (Photo by Thomas Lohnes/Getty Images) © Getty Images

L’économie allemande est au ralenti, menaçant toute la croissance européenne. La Banque centrale européenne (BCE) pourrait donc appuyer sur pause, lors de la prochaine réunion, pour ne pas trop endommager la machine économique avec des taux d’intérêt trop élevés. Voire, peut-être, les baisser plus tôt que prévu, dans les mois à venir. La dernière fois que la BCE a baissé ses taux, c’était pour sauver la Grèce (et consorts), lors de la crise de la dette de 2011. L’Allemagne devient donc la nouvelle “Grèce”, l’enfant malade de la zone euro.

Flashback, en 2011. Certains pays européens, dont la Grèce était l’exemple le plus marquant, vivaient une crise de la dette, accompagnée d’une récession. La Banque centrale européenne a décidé de réduire les taux d’intérêt pour relâcher la pression sur ces pays (après les avoir augmentés en début d’année).

Le mouvement des taux en 2011 (taux de dépôt, opérations de refinancement, facilité de prêt marginal), BCE
Les taux d’intérêt de la BCE, depuis l’introduction de l’euro. Données compilées par Trading Economics.

Aujourd’hui, c’est l’Allemagne, première puissance économique du continent, habituellement le pays le plus stable, qui pourrait avoir besoin d’une baisse des taux d’intérêt. C’est que son économie tourne au ralenti. Après deux trimestres dans le rouge, le PIB a fait du surplace entre avril et juin. Pour les trimestres à venir, la situation devrait rester la même. Berlin tire ainsi le PIB de toute la zone euro vers le bas, et pourrait le faire basculer dans le rouge.

Vers une pause dans la hausse des taux d’intérêts ?

L’Allemagne paie aujourd’hui les pots cassés de sa dépendance à l’énergie bon marché russe. Maintenant que le robinet est fermé (ou presque), le pays doit trouver d’autres approvisionnements pour remplacer des quantités énormes de gaz, ce qui a rendu l’économie vulnérable. La Chine, un de ses plus importants partenaires commerciaux, tourne aussi au ralenti. Puis les taux d’intérêt plus élevés pèsent aussi sur l’économie.

Avec des taux moins élevés, l’économie pourrait donc souffler un peu plus. Dans le cadre de la dernière hausse des taux, fin juillet, la présidente de la BCE Christine Lagarde a indiqué, pour une première fois depuis le cycle des hausses, qu’une pause pourrait être possible, lors de la prochaine réunion. Signe que le ralentissement de la zone euro, et de l’Allemagne, commence à inquiéter l’institution monétaire, et qu’elle ne voudrait pas la freiner davantage (et qu’elle pense qu’elle gagne petit à petit la main sur l’inflation).

Le marché s’attend même à ce que les taux puissent être réduits plus vite qu’on ne le pense, rapporte Reuters. La boucle serait ainsi bouclée et l’Allemagne serait ce que la Grèce était en 2011 : l’enfant malade du continent, à qui on doit administrer un cachet.

Là où l’Allemagne n’est pas la Grèce

La comparaison entre les deux pays peut cependant uniquement porter sur cet aspect de responsabilité dans la décision de politique monétaire (pause ou réduction), pour cause de faiblesse et de vulnérabilité. Sinon, les situations économiques sont tout de même bien différentes. L’Allemagne n’est pas au bord d’une crise de la dette, loin de là. En 2011, les taux sur les obligations grecques atteignaient presque les 30%, au plus fort de la crise. Athènes était virtuellement en faillite et nécessitait plusieurs cordes de secours conséquentes, entre autres du FMI et de… l’Allemagne.

À l’heure d’écrire ces lignes, le taux sur le papier de dette allemand à dix ans affiche 2,5%. C’est le plus bas de la zone euro. Berlin n’a donc pas de quoi s’inquiéter de ce côté-là. Pour le bon d’État grec, c’est 3,7%.

Là où la Grèce a rappelé à l’Allemagne de faire… la Grèce

L’année dernière, au plus fort de la crise énergétique, l’Allemagne poussait pour que l’Europe adopte un plan pour réduire la consommation d’énergie. Les Grecs, de bonne guerre, n’ont alors pas manqué à retourner toutes les critiques qu’ils ont dû entendre dans les années 2010 aux Teutons : qu’ils vivaient au-dessus de leurs moyens, qu’il fallait instaurer l’austérité, que ce ne serait pas à eux de faire des efforts et de se serrer la ceinture à cause des faiblesses d’un autre pays qui a tout fait pour se mettre dans cette crise lui-même…

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