Xavier Mezquita, CEO en politique: “En arrivant dans ce milieu, je me suis dit: ‘What the f..!’”
Le CEO de Signium Belgium s’est engagé au MR de Schaerbeek pour changer les choses. Il a découvert un monde avec ses propres codes, volontairement trop complexe et pas assez précautionneux de l’argent des contribuables. Rebelle, il entend persévérer.
Xavier Mezquita est Managing director de Signium Belgium. Il s’est engagé en politique, au MR de Schaerbeek, voici deux ans et demi. La lecture du dossier de Trends Tendances consacré à ces “trop rares entrepreneurs en politique” lui a donné envie de réagir. Car son expérience lui inspire des réflexions critiques, tout en lui donnant envie de s’investir pour changer les choses. Il s’en explique.
Notre dossier sur “ces trop rares patrons en politique” a attiré votre attention?
J’ai reçu un mail avec ce titre et cela m’a titillé, en effet. En le lisant, j’ai trouvé cela intéressant, mais incomplet au vu de mon expérience.
Dans la vie professionnelle, vous êtes chasseur de têtes?
Signium Belgium est, à la base, un cabinet d’executive search que j’ai créé il y a 28 ans. Elle fait partie d’un réseau international qui est dans le top 10-12 au monde. Nous avons traversé les crises, dont celle du Covid qui était sérieuse, après la crise financière de 2008. Je vais avoir 61 ans cette année, nous décrochons de gros contrats. Tout n’est pas rose, mais il y a de la place pour un travail de qualité, en toute humilité.
Comment avez-vous décidé de vous lancer en politique?
C’est de la faute de mes enfants. Souvent, en les conduisant à gauche ou à droite, ils me voyaient râler en voiture et ils m’ont dit: “Fais quelque chose!”. J’y ai réfléchi et mon voisin m’a proposé de rejoindre le MR de Schaerbeek, il y a deux ans et demi: j’ai accepté. Cela aurait pu être les Engagés ou DéFI, en tout cas une formation de centre-droit. J’ai découvert un mode que je ne connaissais pas et je me suis dit, si vous permettez l’expression: ‘What the f…!’.
Dans quel sens?
Je suis tombé dans un univers peu organisé, avec très peu de notion de la productivité, du time management, du project management… Avec le président de la section locale, Yvan de Beauffort, qui est très volontariste, nous y avons travaillé et nous avons pu construire quelque chose.
Les responsables politiques exercent un métier merveilleux: avec votre argent et le mien, ils sont censés contribuer au bonheur de l’humanité et au bien-être des citoyens. Que l’on soit de gauche ou de droite, c’est fantastique. Mais je me suis demandé, en arrivant dans ce monde, s’ils ne se sont pas amusés à complexifier au maximum toutes les structures, surtout à Bruxelles, soit pour y placer des copains, soit pour faire en sorte que l’on ne puisse pas démonter ces organisations.
Cela induit un sentiment que le mode politique tourne sur lui-même. On a terni son image.
C’est votre sentiment?
Oui. La complexité est contre-productive. Vous avez la commune, la Région, le fédéral, les très nombreuses structures parapubliques… et tout le monde ne sait pas très bien qui décide quoi. A Bruxelles, il y a 89 députés régionaux dont le salaire est entre 10 000 et 15 000 euros bruts, sans oublier les jetons de présence pour les à-côtés. Cela a-t-il du sens pour une Région de 1,2 million d’habitants? Je pose la question, je n’y réponds pas!
Ce qui m’a surpris aussi, c’est l’ego démesuré de ces nombreux mandataires. J’ai fréquenté des ministres comme Alexander De Croo ou Didier Reynders qui sont des hommes d’Etat, mais les plus petits mandataires ont une prétention extraordinaire, sans avoir les mêmes compétences. Mon métier, c’est précisément d’évaluer les compétences: je fais le diagnostic assez rapidement.
En tant qu’entrepreneur, je prends un risque pour ma crédibilité en me lançant en politique, pour mon image ou pour mon entreprise. Par contre, tous les responsables politiques professionnels ne prennent aucun risque, tant c’est devenu un métier en soi. Dans certains pays nordiques, on limite le nombre de mandat, c’est un système très intéressant.
Pourquoi avoir persévéré, en dépit de ce constat?
Si je me suis engagé, c’est parce que je ne supporte pas les gens qui parlent, qui râlent et qui ne font rien. Un de mes leitmotiv, c’est de dire que si on dit que l’on fait quelque chose, on le fait, sinon on se tait. Je rentre tout doucement dans ce microcosme qui est ce qu’il est, avec la volonté d’essayer de changer les choses.
Vous pouvez l’écrire: je vise l’échevinat de la mobilité à Schaerbeek! Il y a une évolution des villes d’Europe qui est tout à fait saine et honorable, mais la façon dont cela se passe à Bruxelles avec Good Move est contre-productive. Je dénonce la part importante de mensonges et de propagande de la part de certains partis politiques. Quand j’entends la ministre régionale dire que la ville est plus paisible et qu’il y a moins d’accidents, je m’excuse, mais ce n’est pas vrai. Je me suis fait renverser, il y a dix jours par un vélo près du Sablon, j’étais par terre, mais je me suis fait engueuler par le cycliste! C’est inacceptable, on a permis tout et n’importe quoi dans cette ville.
Il y a près de 12 milliards de dette, mais on entend le ministre dire que les Bruxellois doivent se serrer la ceinture. Il faut que cela s’arrête! La ville se paupérise et on oublie qu’il faut créer de la richesse avant de la partager. L’exode des classes moyennes et des entreprises est préoccupant. Je suis assez rebelle, vous vous en rendez compte, mais mon engagement en politique, c’est faire en sorte que l’argent des impôts soit utilisé de façon intelligente. Or, actuellement, ce n’est pas le cas!
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