À Bruxelles, le temps joue plus contre le PS que contre le MR

Georges-Louis Bouchez - BENOIT DOPPAGNE / Belga image
Baptiste Lambert

Ne nous comprenez pas mal : on suppose que tous les acteurs autour de la table espèrent conclure un budget dans les plus brefs délais, et puis enchainer vers un gouvernement. Mais la montre joue plutôt en faveur des libéraux. Georges-Louis Bouchez n’est pas forcément pressé pour arriver à ses fins.

Hier soir, le président du MR a réexpliqué sa méthode à la sortie d’une réunion sans accord. Le libéral ne veut pas se limiter aux discussions budgétaires et a établi un calendrier qui court jusqu’au 11 novembre, jour de commémoration de l’Armistice. S’entremêleront des réunions techniques et des sessions en plénière, entre les six partis concernés : MR, PS, LE, Groen, Vooruit et Open Vld. Georges-Louis Bouchez aimerait que tout le monde s’accorde sur une note de politique générale qui mènerait in fine à un gouvernement.

Une méthode critiquée

Le Montois, qui a pris le relais de David Leisterh, s’est imposé comme formateur et entend imposer sa méthode. “À un moment donné, vous ne pouvez pas indiquer des rendements budgétaires sur la Fonction publique, par exemple, si vous ne connaissez pas les mesures précises qui sont derrière. Je ne souhaite pas mettre de rendement budgétaire s’il n’y a pas une mesure très concrète qui y est accolée, car cela renverrait la discussion au prochain gouvernement et ce n’est pas le but“, a expliqué Bouchez à Belga.

Du côté du PS, Ahmed Laaouej a déjà fait part d’une certaine frustration sur ce déroulé des négociations. Pour lui, c’est d’abord le budget, puis le gouvernement. “Un accord de gouvernement qui ne reposerait pas sur un accord de budget reviendrait à bâtir un château sur du sable”, a-t-il commenté en quittant la réunion. Le socialiste a aussi répété un message qu’il veut faire passer depuis la démission de David Leisterh : 85% du boulot est accompli.

Il n’est pas le seul à critiquer la méthode Bouchez. Au siège de l’Open Vld, Frederic De Gucht est autour de la table pour discuter budget et a montré une certaine frustration en fin de semaine dernière. Mais sur LN24, hier matin, il a quelque peu nuancé. “Il est important de parfois élargir les discussions. Pour savoir quel plat on mange. Il est important, à côté du texte, d’avoir des chiffres. Quand on prend une mesure, il faut avoir des chiffres derrière. Mais notre priorité reste le budget. ” 85% de l’accord est-il dans la poche ? “Non. On n’est même pas d’accord sur le chiffre de départ : l’effort budgétaire à réaliser.”

La pression s’accentue

En coulisses, les frustrations sont plus grandes. “On ne s’attendait pas à grand-chose, on n’a pas vu grand-chose“, a confié un initié à La DH. Un autre observateur se montre circonspect : “Bouchez ne donne pas l’impression de vouloir réussir”.

Personne autour de la table ne veut battre le triste record de 541 jours sans gouvernements, mais la montre joue plutôt en faveur des libéraux. D’abord, parce qu’on le sait, un nombre grandissant d’associations sont en attente de subsides facultatifs, que les ministres sortants ne peuvent plus leur fournir : seules les dépenses structurelles sont renouvelées dans un gouvernement affaires courantes. Ensuite, car certains secteurs publics et non-marchands, comme le Samusocial, voient leurs dépenses augmenter, sans possibilité pour le gouvernement de répondre.

La pression s’accentue. Hier, on apprenait que le tribunal de première instance de Bruxelles gelait tous les projets d’urbanisation de plus de 0,5 hectare dans la Région. De quoi mettre sur pause de nombreux projets immobiliers chers aux socialistes, dont la friche Josaphat (Schaerbeek), le marais Wiels (Forest) ou encore le carré des Chardons (Schaerbeek). Le moratoire vaut jusqu’à la présentation d’un nouveau Plan régional d’aménagement du sol, ce qui est impossible sans nouveau gouvernement.

Une stratégie du pourrissement

De là à y voir une stratégie du pourrissement ? C’est une accusation portée par le PS depuis un certain temps à l’encontre du MR. On doute que le MR récolte quelconque fruit électoral à faire trainer les choses. Par contre, il est indéniable que cette pression exercée sur les partis du gouvernement sortant peut servir de levier à Georges-Louis Bouchez. Le bras de fer est perpétuel entre les libéraux et les socialistes.

À moins que le président du MR joue la montre pour se trouver un successeur comme formateur ? Frederic De Gucht a en tout cas confié à LN24 qu’il pensait que la mission de Bouchez comme formateur était uniquement “un moment de transition”. Le temps de trouver quelqu’un qui a les épaules pour le remplacer dans la capitale, suite au départ de son lieutenant et ami.

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