Karine Lalieux (PS) refuse de voir la responsabilité du PS dans le nouveau scandale du CPAS d’Anderlecht : “Ne généralisons pas !”

Karine Lalieux, ministre des Pensions. Belga Image © belga
Baptiste Lambert

Il a fallu attendre un reportage du magazine Pano sur la VRT, pour connaître l’ampleur des dysfonctionnements au sein du CPAS d’Anderlecht, dirigé par un socialiste. La ministre de tutelle, Karine Lalieux, indique pourtant que le CPAS faisait l’objet d’une attention particulière. La ministre de l’Intégration sociale est attendue à la Chambre ce jeudi, mais elle refuse déjà d’y voir une nouvelle affaire qui porte la marque des socialistes.

Le reportage de Pano est accablant. Deux journalistes se sont fait passer pour Arnaud et Lina et sont parvenus à obtenir chacun 7.000 euros du CPAS d’Anderlecht, alors qu’ils n’habitaient pas Anderlecht et n’avaient évidemment pas droit à une aide sociale. L’enquête montre que les contrôles et les vérifications d’usage sont quasi inexistants.

En outre, il semblerait qu’un passage par le bureau de l’ancien président du CPAS, Mustapha Akouz (PS), aujourd’hui député bruxellois, facilitait les dossiers même si c’est tout à fait illégal. Le mandataire socialiste explique qu’il intervenait en raison d’énormes retards et de la charge de travail des assistants sociaux. Mais il assume pratiquement du clientélisme : “Je peux comprendre que cela indigne certains en Flandre. Mais moi, je suis socialiste. Je suis fier de l’être, d’aider mon prochain. On peut me le reprocher, mais c’est comme ça. Clientéliste ? Je suis fier d’avoir aidé des gens.”

Pas de lien avec la gestion du PS

Interrogée ce matin sur La Première, Karine Lalieux (PS) refuse de voir dans cette nouvelle affaire un quelconque lien avec la gestion politique du Parti socialiste par le passé. “Je refuse qu’on lie l’affaire du Samu social avec celle du CPAS d’Anderlecht. Quand il y a une erreur médicale dans un hôpital, est-ce qu’on ferme l’hôpital ? Est-ce qu’on dit que la qualité des soins en Belgique est mauvaise ? Ici, il y a des erreurs de procédures. Jeter l’opprobre sur l’ensemble des mandataires, des conseillers sociaux et des CPAS, alors qu’ils font un boulot remarquable, je ne l’accepte pas. Ne généralisons pas !”

Karine Lalieux se réfugie derrière la situation socio-économique de la commune d’Anderlecht : “Il faut comprendre que c’est la 3e commune la plus pauvre et qu’il y a 200 dossiers par assistant social. Ils sont effectivement débordés. Des changements sont progressivement implémentés, mais ça prend trop longtemps. C’est pourquoi j’ai demandé de renforcer les contrôles.” Le cabinet Lalieux est en effet au courant des dysfonctionnements au sein du CPAS d’Anderlecht depuis 2021, admet la ministre. Un rapport datant de 2023, émanant de la Région, indiquait des problèmes de gestion. Mais la ministre a véritablement agit après la diffusion du documentaire, mardi.

Technique assez habituelle, la ministre renvoie les responsabilités vers les autres niveaux de pouvoir, “puisque au niveau de la gestion et de l’organisation du CPAS, c’est la Région qui est compétente. J’ai également entendu que le bourgmestre allait diligenter une enquête. Ils prendront aussi leurs responsabilités.” Difficile toutefois de ne pas y voir la main du PS. Le CPAS était dirigé par un socialiste et l’est toujours. La commune d’Anderlecht était et est dirigée par un socialiste, Fabrice Cumps. Et le pouvoir de tutelle au niveau fédéral est donc exercé par une socialiste. Seuls Ecolo et Alain Maron disposaient d’un pouvoir de tutelle au niveau régional, mais le contrôle semble avoir opéré en 2023. Qu’a fait la ministre ?

Une situation généralisée

Alors que Karine Lalieux est attendue à la Chambre, ce jeudi, les députés tenteront certainement de savoir si le cas du CPAS d’Anderlecht est une exception. Pour le député bruxellois de la N-VA Gilles Verstraeten, c’est tout le système qui est gangréné. “Cela se produit probablement dans d’autres communes comme Molenbeek ou Bruxelles-ville, déclare-t-il dans le reportage. Je vous garantis qu’il y a d’autres cadavres dans le placard ailleurs. Il existe une véritable culture de clientélisme où tout peut être arrangé si vous connaissez quelqu’un. »

De telles accusations émanant d’un député nationaliste de l’opposition ne surprendront personne. Mais il est loin d’être le seul à avoir des doutes. Les critiques fusent de l’ensemble des partis. À la Région, au sein de la majorité sortante, le ministre de l’Action sociale, Alain Maron (Ecolo), pointe les défaillances de l’ensemble des CPAS bruxellois, en évitant soigneusement de s’impliquer : “Ces pratiques, inacceptables et scandaleuses, sont révélatrices de la mauvaise gouvernance flagrante de la part des responsables (…). Cette affaire illustre combien, plus que jamais, une réflexion sur une réforme plus globale des CPAS à Bruxelles est indispensable en vue d’améliorer la gouvernance, mais aussi afin de trouver une cohérence entre les différentes politiques sociales des 19 CPAS bruxellois.”

Du côté des libéraux, le président du MR, ajoute logiquement de la pression sur le dossier : “Des responsabilités politiques doivent être déterminées. Sans délai. Le MR prendra des initiatives en ce sens.” Lesquelles ? Premiers éléments de réponse ce jeudi à la Chambre. Voilà en tout cas une affaire qui vient casser la bonne dynamique dans laquelle s’était inscrite le PS, portant une opposition incisive tant au niveau wallon que fédéral.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content