A quoi ressemblerait le programme politique d’une coalition Arizona ?
Après avoir testé l’Arc-en-ciel, la Suédoise, la Vivaldi… le pays pourrait – c’est une hypothèse – avoir une coalition « Arizona ». Elle rassemblerait les libéraux, les sociaux-chrétiens, la N-VA et Vooruit. Avec une telle majorité, à quoi pourrait-on s’attendre sur l’énergie, l’emploi, la fiscalité et les pensions ?
Les jeux sont faits. Après le scrutin de ce dimanche, les gagnants sont la NV-A, les libéraux francophones du MR, les Engagés, Vooruit, avec un CD&V qui recule, mais résiste. Si l’on exclut l’Open Vld (qui veut faire une cure d’opposition) et le PS, difficilement compatible avec la N-VA et le MR et dont Vooruit s’est distancié sur des sujets fondamentaux comme la durée des allocations de chômage, nous aurions donc un gouvernement « Arizona ». En plein centre du drapeau de cet État américain se trouve en effet une étoile orange, qui irradie de rayons rouges et jaunes, la moitié inférieure du drapeau étant constituée d’un fond bleu…
Quelle pourrait être la politique socio-économique d’une telle majorité ?
1. Dans le domaine de l’emploi, ces partis pourraient décider d’une limitation des allocations de chômage dans le temps. Le MR et les Engagés sont pour une limitation à deux ans, la N-VA et le CD&V sont également pour la suppression d’une allocation sans limites de même que, depuis l’an dernier, Vooruit, et c’est une énorme différence avec les socialistes francophones. L’an dernier, celui qui était encore président de Vooruit, Conner Rousseau, avait en effet indiqué qu’un chômeur qui, après deux ans, refuserait une proposition d’emploi perdrait ses allocations.
Un accord serait plus délicat à engranger sur l’indexation automatique des salaires. Vooruit ne semble pas décidé à modifier ce point. Mais le MR non plus, qui est en faveur du maintien de l’indexation automatique des salaires. En revanche, les Engagés plaident pour un « lissage » du système afin qu’il pénalise moins les entreprises. Il devrait donc y avoir débat sur le sujet. Mais les positions semblent conciliables.
2. Sur le plan fiscal, un accord sera plus difficile à atteindre. Tout le monde est d’accord, des libéraux à Vooruit en passant par la N-VA et les sociaux-chrétiens qu’il faut combattre les pièges à l’emploi et instaurer une différence nette de pouvoir d’achat entre ceux qui travaillent et ceux qui vivent d’allocations. Cette différence doit être d’au moins 500 euros, selon par exemple la N-VA. Mais la grande réforme fiscale qui permettrait d’arriver à ce résultat ne sera pas facile à atteindre, car il y a des divergences assez profondes sur la manière d’y arriver. Du côté social-chrétien, on serait plutôt en faveur d’une globalisation des revenus (en excluant, disent les Engagés, les loyers), afin d’aligner la fiscalité du capital sur la fiscalité du travail. La N-VA désire supprimer la cotisation spéciale pour la sécurité sociale, qui est un des instruments de transfert Nord-Sud. Le coût budgétaire de la mesure a été chiffré à 1,2 milliard d’euros par an par le Bureau du Plan. Le MR désire lui préserver la fiscalité du capital, épargnant les plus-values et en abaissant le précompte de 30 à 15%…
3. L’énergie. Sur ce plan, il semble y avoir un consensus des partis de droite et du centre sur la prolongation longue (20 ans) autant que faire se peut des centrales nucléaires Doel4 et Tihange 3, ainsi que sur l’étude de la construction de nouvelles centrales. Ce n’est pas le cas de Vooruit. Son programme mentionne que « l’énergie nucléaire n’est pas aussi durable, mais elle a le grand avantage de vous permettre de produire de l’électricité sans émissions de CO2. En ces temps de réchauffement climatique, elle constitue donc une meilleure alternative que la production à partir de sources fossiles. C’est pourquoi nous maintenons Doel 4 et Tihange 3 ouvertes pendant encore 10 ans, afin de nous assurer que la lumière reste allumée ». Les socialistes flamands ne remettent donc pas en cause la prolongation des centrales, mais investir pour les prolonger davantage ou construire de nouvelles centrales n’est pas à l’ordre du jour. Le débat risque ici d’être sérieux.
4. Les pensions. C’est, avec la fiscalité, le chantier le plus technique et où les diables se cachent dans les détails. La N-VA est en faveur d’un système de points qui donnent droit complet à la pension après 45 ans de travail. Plus question d’âge légal de mise à la pension. Le MR et les Engagés sont aussi en faveur d’un système ne reposant plus sur l’âge, mais la durée de la carrière effective. Pour Vooruit aussi, mais un affilié aurait droit à une pension complète après 42 années de carrière (pour celui qui a commencé à travailler à 18 ans). Un gouvernement Arizona pourrait se mettre d’accord sur un montant minimum de pension (les Engagés le fixe à 1.500 euros, indexés) en échange d’une égalité de traitement entre indépendants et salariés (une revendication libérale).
Finalement, on se rend compte qu’il pourrait y avoir, sur papier, des accords possibles sur la politique de l’emploi et sur les retraites. En revanche, un gouvernement Arizona aura, comme lors des coalitions précédentes, des difficultés à réaliser une grande réforme fiscale et une vraie politique énergétique.
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