Lire la chronique d' Amid Faljaoui
A quand le pic de l’inflation ?
La vraie, la seule question que se posent aujourd’hui les citoyens, c’est est-ce que le pic de l’inflation est encore loin? Sauf à jouer Mme Irma, aucun économiste ne peut répondre clairement à cette question pourtant basique.
Même la Bourse, qui est pourtant supposé le mieux anticiper l’avenir de notre économie, n’y répond pas vraiment. Ne serait-ce que parce que la Bourse, malgré les chutes des cours, résiste encore assez bien aux très mauvaises nouvelles qui se sont accumulées depuis quelques mois. Certains observateurs se demandent si ce n’est pas grâce ou à cause de la jeunesse des opérateurs de marché. En clair, les traders actifs en Bourse sont très jeunes et n’ont jamais connu l’inflation. Ils auraient donc tendance à la sous-estimer.
Au-delà de cette tendance, ce qu’il faut garder à l’esprit, c’est qu’en économie rien n’est jamais définitif. Avant, les mêmes acteurs économiques n’avaient pas vu venir l’inflation. Lorsqu’elle était là, ils l’ont nié en disant que c’était momentané. Et aujourd’hui, on a l’impression qu’on va devoir vivre avec une inflation à deux chiffres pendant des siècles. C’est heureusement faux, notamment grâce à la récession qui paradoxalement va nous sauver de l’inflation. D’ailleurs tous les prix des métaux industriels sont en baisse. Que ce soit l’aluminium, le cuivre, le cobalt, le fer ou le nickel, tous redescendent depuis le pic de mars dernier. Le prix du fret de conteneur a aussi chuté de 60% depuis son point haut de septembre 2021. C’est une bouffée d’oxygène pour les industriels grands consommateurs de matières premières ou à tout le moins ce n’est pas une charge financière en plus au moment où la demande mondiale ralentit.
Question : si le pic de l’inflation a lieu d’ici quelques mois, peut-on espérer revenir au monde d’avant, celui où l’inflation était très faible ? Réponse : non. Nous avons décidé collectivement est c’est une très bonne chose de sauver notre planète et de lutter drastiquement contre le réchauffement climatique. Or, la décarbonatation de nos économies va se traduire par des prix plus élevés. Une inflation plus élevée, c’est le prix à payer pour assurer la transition énergétique. Comme l’explique l’économiste Pascal Perri, “lutter contre le changement climatique rendra invariablement la vie plus chère : véhicules électriques, énergies plus rares, alimentation bio, l’économie présumée verte est inflationniste”. Et donc, le choix que l’on nous propose, c’est d’arbitrer entre la fin du mois et la fin du monde. Mais en défendant l’une, on accable l’autre. Prenez le cas des tomates en Belgique. Il est plus que probable qu’elles ne seront pas disponibles cet hiver dans les rayons, car les producteurs belges n’ont pas les moyens de chauffer les serres et de vendre ces tomates Made in Belgium a un prix raisonnable. Le consommateur ne voudra pas payer plus cher alors que son pouvoir d’achat est en baisse. Résultat : le secteur de la distribution va faire venir des tomates du Maroc principalement, et aussi de l’Espagne et d’Israël. Pour le bilan carbone, ce n’est pas top, bien entendu. L’idéal serait donc de se passer de tomates et de manger des produits de saison de chez nous. Mais quel est le ménage qui voudra se priver de tomates en hiver ?
Vous avez compris: en ce moment, il y a deux injonctions contradictoires. On nous demande d’assurer le tournant écologique tout en maintenant le niveau de vie. Bien entendu, c’est impossible. Nos gouvernants le savent bien, et que font-ils ? Ils mettent la poussière sous le tapis. Autrement dit, ils distribuent des aides qui sont en réalité une augmentation de notre dette publique. En faisant cela, on continue d’arroser les plantes mortes pour donner le change.
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