Une voiture sur deux à Bruxelles est un SUV : bientôt surtaxés ou interdits ?

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© Getty Images

Les voitures sont de plus en plus larges et plus lourdes. Une nouvelle voiture sur deux à Bruxelles est un SUV. Cette popularité croissante, encouragée par la fiscalité favorable des voitures de société, a des répercussions économiques, sociales et environnementales. Au point de voir ces véhicules bientôt interdits ou lourdement taxés ?

Les voitures neuves immatriculées à Bruxelles sont de plus en plus grandes et lourdes, une tendance qui complique la gestion de l’espace urbain et alourdit le bilan environnemental de la ville. Une étude récente, commandée par les ministres bruxellois Alain Maron et Elke Van den Brandt, et réalisée par Bruxelles Environnement et Bruxelles Mobilité, propose plusieurs pistes pour contrer les effets de cette “massification” automobile : taxes accrues pour les véhicules lourds et interdictions ciblées dans certaines zones.

Les SUV roi de la route à Bruxelles

En 2023, les SUV ont représenté plus de la moitié des nouvelles immatriculations à Bruxelles. Le poids moyen des véhicules a augmenté de 17 % en dix ans, atteignant 1 681 kilos. Cette tendance est encore plus marquée parmi les flottes d’entreprise, dont les modèles récents dépassent souvent les 1 700 kilos.

Or du point de vue de la sécurité, les experts notent que plus un véhicule est lourd, plus il présente des risques pour les autres usagers, notamment les piétons et les cyclistes. Selon Vias, « un piéton ou un cycliste heurté par une voiture dont le capot est situé à 90 cm de hauteur court un risque de blessures mortelles 30 % plus élevé que s’il est heurté par un véhicule dont le capot est 10 cm plus bas ».

La largeur croissante des SUV, qui dépasse souvent celle des places de stationnement standard, restreint également l’espace disponible, limitant les aménagements urbains comme la végétalisation et la création d’espaces récréatifs.

Une facture indirecte pour la collectivité

Sur le plan environnemental, la généralisation des SUV freine les efforts de réduction des émissions de CO₂. Bien que les motorisations thermiques soient de plus en plus efficaces, l’augmentation de poids neutralise les gains réalisés dans ce domaine. Ce phénomène est en partie favorisé par les normes européennes qui ne prennent pas suffisamment en compte la masse des véhicules dans leurs calculs de CO₂, ainsi que par la fiscalité belge, qui soutient les véhicules de société souvent lourds et haut de gamme. L’essor des SUV électriques, dont les batteries ajoutent jusqu’à 570 kilos supplémentaires, accentue cette tendance.

Mesures fiscales et incitations

Les SUV suscitent une opposition croissante partout en Europe. Paris et Lyon envisagent de lui faire payer plus cher ses places de parking (jusqu’à quatre fois pour Paris). Et cette semaine il y a été question d’une nouvelle loi interdisant les SUV dans les grandes villes française pour des raisons environnementales et sécuritaires. Elle a été proposé par le sénateur Ian Brossat et sera bientôt débattue. En Allemagne aussi les premières mesures sont sorties. Il faut par exemple débourser 450 euros de plus pour une carte de stationnement résidentiel à Fribourg. En Wallonie, les automobilistes sont également découragés dans l’achat d’un tel modèle plus encombrant et polluant via la dernière taxe de mise en circulation qui tient compte notamment du poids du véhicule et de ses émissions de CO2. 

A Bruxelles aussi on envisage plusieurs pistes. L’étude propose de revoir la fiscalité des véhicules en fonction de leur poids. Les voitures légères (jusqu’à 1 500 kilos) bénéficieraient d’avantages fiscaux, tandis que celles pesant entre 1 500 et 2 000 kilos seraient davantage taxées. Pour les véhicules dépassant les 2 tonnes, un seuil d’interdiction pourrait être envisagé dans certaines zones. Afin de tenir compte de la spécificité des véhicules électriques, un seuil supplémentaire de 300 kilos pourrait être ajouté pour eux, et des dérogations seraient proposées pour les familles nombreuses, souvent contraintes d’opter pour des véhicules plus spacieux.

Parmi les autres solutions étudiées, un péage kilométrique intelligent pourrait moduler le coût des déplacements en fonction du poids des véhicules. Une approche qui permettrait de générer des recettes supplémentaires tout en incitant à privilégier des véhicules plus légers et économes en ressources. Et la première chose à faire est peut-être aussi de déterminer ce qu’est exactement un SUV. En effet, entre un crossover, break “surélevé” et un SUV, la différence est parfois bien mince…

Quelques chiffres en résumé
– Les voitures immatriculées en Belgique depuis 2018 dépassent en moyenne les 180cm de large, un gabarit incompatible avec les dimensions de bon nombre de places de stationnement, que ce soit en voirie ou hors voirie.
– Entre 2013 et 2023, la masse des voitures nouvellement immatriculées en Région de Bruxelles-Capitale a augmenté de 10% pour les voitures privées et de 17% pour les voitures immatriculées par des entreprises. Celles-ci sont de plus beaucoup plus lourdes (1.711 kg) que les voitures privées récemment immatriculées (1.463 kg). 
– La masse des nouvelles voitures diesel et essence a augmenté de respectivement 9% et 14% entre 2013 et 2023. Les voitures électriques ont elles connu un alourdissement de 46%. Les voitures électriques récemment immatriculées à Bruxelles pèsent en moyenne 570 kg de plus que les nouvelles voitures essence et diesel.

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