L’idée d’un impôt européen fait son chemin
Et les ressources proviendraient essentiellement des entreprises.
Sur deux grands sites d’informations européens (Euractiv et Politico), trois ministres ou secrétaires d’État en charge des affaires européennes, l’Allemande Anna Lührmann, la Française Laurence Boone et le Portugais Tiago Antunes plaident ce jeudi pour une rapide mise en place de système de financement propre à l’Europe.
La nécessité d’avoir un instrument de financement propre est plus urgente que jamais et la France, l’Allemagne et le Portugal voudraient donc introduire cet outil pour prochain budget septennal de l’UE, celui de 2028-2035.
Innovation, climat, défense
« Pour maintenir la paix sur notre continent face à la montée des tensions géostratégiques, l’UE doit encore renforcer ses capacités géostratégiques sur les plans politique, économique et militaire, argumentent les trois ministres dans une carte blanche publiée par Euractiv. Dans le même temps, ajoutent-ils, la crise climatique menace notre liberté, notre prospérité et notre sécurité, en particulier celles des générations futures. Les incendies font rage dans nos forêts, les sécheresses et les inondations menacent nos récoltes, nos maisons et nos moyens de subsistance. En outre, les entreprises européennes, nos industries et nos travailleurs sont confrontés à une concurrence mondiale féroce sur les marchés de l’avenir ».
« Nous savons que nous devrons rembourser la prochaine génération d’obligations européennes », a déclaré Laurence Boone à Politico. L’Europe aura également besoin de fonds supplémentaires « pour la reconstruction de l’Ukraine, ainsi que pour les questions de transition climatique et d’interconnexion énergétique qui nous occupent », dit-elle.
Il faut donc investir, dans l’innovation, la croissance, la défense, et songer à rembourser les emprunts émis dans le cadre du plan européen de 700 milliards d’euros baptisés NextGenerationEU. Et pour investir, il faut de l’argent, et pour cela, il faut donc lancer le débat sur l’impôt européen maintenant, parce que nous ne sommes même plus à un an des prochaines élections européennes.
Les propositions de la Commission
On ne part toutefois pas d’une feuille blanche. En juin dernier, la Commission a identifié, pour financer cet impôt européen, quatre sources de financement, toutes en provenance des entreprises.
L’une est fondée sur les recettes tirées du système d’échange de quotas d’émission, une autre s’appuie sur les ressources générées par le projet de mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE, et une troisième se base sur la part des bénéfices résiduels des multinationales qui sera réattribuée aux États membres de l’Union dans le cadre de l’accord de l’OCDE destiné à harmoniser la taxation des profits des multinationales. En juin, la Commission proposait une quatrième ressource, basée sur les profits des entreprises.
Il s’agit de demander aux États membres une contribution égale à 0,5 % de l’assiette fictive des bénéfices des entreprises de l’Union (un indice qui sera calculé par Eurostat). « Il ne s’agit pas d’une taxe sur les entreprises ni d’une augmentation de leurs coûts de mise en conformité, explique la Commission. Il s’agit d’une contribution nationale versée par les États membres sur la base de l’excédent brut d’exploitation des secteurs des sociétés financières et non financières, ce qui contribuerait à équilibrer le panier de ressources propres et à diversifier davantage les sources de revenus de l’UE ».
Pour cette source de financement, qui devrait laisser la place à d’autres mécanismes par la suite, la Commission table sur un rendement de 16 milliards d’euros par an, alors que les quotas d’émissions pourraient rapporter 19 milliards par an à partir de 2028, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières rapporterait 1,5 milliard par an, et quant à la réattribution des profits des multinationales là où ils sont réellement produits, il est difficile de donner une approximation. Mais lorsque l’OCDE avait annoncé cet accord, elle avait estimé que « des droits d’imposition sur plus de 125 milliards de dollars de bénéfices devraient être réattribués chaque année aux juridictions du marché ».
En tout, donc, l’impôt européen pourrait rapporter une cinquantaine de milliards par an.
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