La valeur des obligations perpétuelles risque de baisser

De nombreux investisseurs ont des obligations perpétuelles en portefeuille. Un choix qui s’inscrit généralement dans leur quête de rendement. Les taux très bas incitent les investisseurs à prendre davantage de risques, et les obligations perpétuelles constituent alors une solution. Par le passé, elles ont souvent été des investissements intéressants. Mais le resteront-elles si les taux remontent ?

Un prêt sans échéance ?

En théorie, une obligation perpétuelle n’a pas d’échéance. Mais la pratique est souvent différente. La plupart des émissions incluent en effet une option call. Les obligations peuvent alors être remboursées anticipativement à des dates et des conditions fixées à l’avance. L’assureur français Groupama l’a récemment fait, dans le sillage d’autres débiteurs comme Crédit Agricole, RBS et 3AB Optique.

Ces obligations ont le statut d’emprunts subordonnés. L’acheteur court donc un risque en cas de faillite de l’émetteur. Il ne sera payé qu’après les créanciers privilégiés (ONSS, INAMI, etc.) et ordinaires. Les règles MIFID classent ainsi les obligations perpétuelles dans la catégorie de risques la plus élevée. Elles se trouvent au même niveau que les actions. MIFID est l’abréviation de Markets in Financial Instruments Directive. Cette directive a notamment pour objectif de protéger les investisseurs.

Les obligations perpétuelles sont émises par des entreprises qui ont une certaine solvabilité. Si les agences de notation modifient (abaissent) leur note, le cours de ces obligations peut beaucoup baisser. C’est un risque que comportent toutes les obligations, mais il est particulièrement présent dans ce type d’émissions.

Les obligations perpétuelles peuvent être intéressantes pour les débiteurs. Elles renforcent en effet leurs fonds propres sans provoquer de dilution du bénéfice, comme une émission d’actions nouvelles. De plus, les intérêts que verse l’émetteur sur l’obligation sont généralement fiscalement déductibles. Ce n’est pas le cas des dividendes sur les actions.

Il subsiste une différence majeure entre les actions et les obligations qui pourra plaire à de nombreux investisseurs. Les émetteurs d’obligations perpétuelles paient souvent un coupon attrayant. Mais, séduits par ces taux, les investisseurs particuliers, surtout, omettent d’analyser les risques en profondeur.

Et si les taux remontent ?

En raison de cette échéance ” infinie “, la valeur des obligations perpétuelles dépend énormément du taux du marché. Leur cours augmente plus rapidement que celui d’une obligation ordinaire en cas de baisse des taux. Et l’inverse est naturellement vrai. Ce qui constitue un risque dans les conditions actuelles. Nous nous habituons peu à peu à des taux très faibles. Mais tout a une fin. On peut s’attendre à un premier léger relèvement des taux au deuxième semestre de l’an prochain. Si ce scénario se confirme, la valeur des perpétuelles va assurément baisser. Les obligations à long terme en général perdront de la valeur.

Vu les risques, les investisseurs ont intérêt à limiter le poids des obligations perpétuelles dans le volet produits à revenus fixes de leur portefeuille de placements. Une diversification sur plusieurs émetteurs et éventuellement plusieurs devises est bien entendu tout aussi recommandable.

Concrètement

Les obligations perpétuelles sont relativement nombreuses sur le marché secondaire. Parmi celles que nous vous avons déjà présentées, citons l’obligation BBB en euro à taux variable de Volkswagen Financial Services (VW). Jusqu’en 2030, le coupon est fixé à 3,50 %. Ensuite, l’obligation peut être remboursée. Sur la base d’un cours de 99,27 % de la valeur nominale et d’un remboursement en 2030, le rendement s’établit à 3,50 %. Il existe des coupures de 1.000 euros. Si VW n’exerce pas le call, le taux d’intérêt devient variable et correspondra au taux euroswap à 15 ans majoré de 3,06 %.

VW propose également une obligation perpétuelle en euro assortie d’un coupon de 3,875 %. En raison de ce coupon plus élevé, elle est également plus chère (102,98). Elle est disponible en coupures de 1.000 euros et est callable, c’est-à-dire remboursable à 100 %, le 4 septembre 2018. Si le débiteur ne procède pas au remboursement, le coupon correspondra à l’EUR SWAP 10Y + 2,70 %. Il sera ensuite relevé à l’EUR SWAP 10Y + 2,95 % à partir du 4 septembre 2023, et même à l’EUR SWAP 10Y + 3,70 % à partir du 4 septembre 2038. L’euro swap à 10 ans s’élève actuellement à 0,90 %.

Ce n’est pas une véritable obligation perpétuelle, mais l’émission est très similaire : l’obligation en euro du Mexique est assortie d’une échéance de 100 ans et d’un coupon de 4 %. Sur la base d’un cours actuel de 93,92 %, le rendement s’établit à 4,26 %. La note BBB+ chez Standard & Poor’s indique une qualité acceptable. Coupures de 100.000 euros.

Il existe également un large assortiment d’obligations perpétuelles en dollar américain. Cosan Overseas est surtout active dans la production de sucre et d’éthanol et dans la distribution de gaz naturel. L’entreprise a émis une obligation perpétuelle assortie d’un coupon de 8,25 % il y a sept ans. Elle est callable au paiement d’une partie du coupon qui est versé quatre fois par an. L’obligation est disponible en coupures de 100.000 dollars et coûte actuellement 102,40 % de la valeur nominale. La note est BB chez Standard & Poor’s.

Les audacieux peuvent se tourner vers l’obligation en USD d’Electricité de France SA, assortie d’une note BB chez Standard & Poor’s, et donc spéculative. Le coupon semestriel s’élève à 5,25 % sur une base annuelle. A un cours de 104,22 %, le rendement atteint un niveau très intéressant de 4,34 %. L’émetteur ne peut la rembourser avant le 29 janvier 2023. S’il ne le fait pas, le coupon sera porté à l’US 10Y + 4,459 %. L’US Government 10 ans s’élève aujourd’hui à 2,44 %.

Les investisseurs ont intérêt à limiter le poids des perpétuelles en portefeuille.

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