L’un veut forer du pétrole « à tout-va », les autres réclament « vie, liberté et quête du bonheur » : saisi par de jeunes Américains, un tribunal du Montana devra juger si la politique climatosceptique de Donald Trump respecte ou viole ces principes fondateurs des États-Unis.
Devant cet État du nord‑ouest, ce mouvement de la jeunesse entend démontrer à la rentrée que les projets présidentiels, favorables aux combustibles fossiles, non seulement accélèrent le changement climatique, mais violent aussi leurs droits fondamentaux garantis par la Constitution.
« C’est angoissant de penser à mon avenir », confie à l’AFP Eva Lighthiser, qui dirige ce groupe, lors d’une manifestation devant le Congrès à Washington. « Le climat est devenu imprévisible, il est déstabilisé et ce n’est pas près de s’arranger. C’est très difficile à accepter pour quelqu’un qui vient d’entrer dans l’âge adulte », poursuit cette jeune femme de 19 ans, originaire de Livingston (Montana), près du parc national de Yellowstone, classé au patrimoine mondial de l’Unesco.
Avec des cas similaires dans le monde — jusqu’à la Cour internationale de justice qui rendra bientôt un avis — l’affaire Lighthiser contre Trump est l’une des plus médiatisées. Elle s’appuie sur le Cinquième amendement, qui empêche l’État fédéral de priver les citoyens de leurs droits fondamentaux sans procédure régulière.
Des précédents prometteurs… mais un parcours semé d’embûches
L’association Our Children’s Trust représente 22 jeunes, après deux victoires récentes au niveau local : dans le Montana, un juge a jugé en 2023 que les autorités avaient ignoré l’impact environnemental dans l’octroi de permis, et à Hawaï un accord a accéléré la décarbonation des transports. Aujourd’hui, ils contestent les décrets de Trump — il a déclaré « l’urgence énergétique nationale » pour favoriser les fossiles et bloquer les initiatives renouvelables.
Pour Me Mat Dos Santos, représentant Our Children’s Trust, la Cour suprême, bien que conservatrice, pourrait étendre la notion de « droit à la vie » aux enfants, signifiant que chacun a « le droit de profiter de son existence sur Terre ». Fait rare, 19 procureurs locaux ont demandé à intervenir en défense de l’État fédéral, ce qui montre le sérieux de la procédure.
Eva Lighthiser, qui a grandi dans ce « Montana rural » où l’on tient à la nature, évoque une existence déjà marquée par un ciel enfumé, des inondations répétées, et un déménagement forcé pour raisons climatiques — raisons qui l’ont conduite à envisager des études en sciences de l’environnement, tout en souffrant d’anxiété et de dépression.
Joseph Lee, étudiant de 19 ans présent à la manifestation, s’inquiète de son avenir, notamment pour fonder une famille, alors qu’il a grandi près d’une raffinerie en Californie et a souffert d’asthme. Sa famille a déménagé en Caroline du Nord, confrontée aux inondations.
Pour Patrick Parenteau, professeur de droit de l’environnement, cette initiative s’inscrit dans la lignée des combats pour le mariage interracial, la déségrégation ou le droit à l’avortement. Mais il reste réaliste : avec une Cour suprême conservatrice, le chemin sera long. « Ils savent que ce sera un parcours du combattant, mais ils doivent essayer ».
D’autres juristes, comme Jonathan Adler (université William & Mary), estiment qu’il s’agit davantage de militantisme politique, reposant sur une « vision très large et sans fondement » du pouvoir judiciaire. « Le changement climatique est un problème sérieux, mais les stratégies juridiques les plus solides ne sont pas celles qui visent à faire beaucoup de bruit », nuance-t-il à l’AFP.