Ukraine, budget, Proche-Orient: un sommet européen “crucial” s’ouvre à Bruxelles
“Un Conseil européen crucial nous attend”. C’est en ces termes que le président du Conseil Charles Michel qualifie le traditionnel sommet d’hiver des chefs d’État et de gouvernement de l’UE, qui s’ouvre ce jeudi en milieu de matinée à Bruxelles et pourrait jouer les prolongations ce week-end, vu les menaces du Premier ministre hongrois Viktor Orban de le faire capoter.
Les sujets à l’ordre du jour sont d’une rare sensibilité: le feu vert à l’ouverture de négociations d’adhésion de l’Ukraine et la Moldavie à l’UE, le renforcement du soutien financier à ce pays, une rallonge au budget pluriannuel de l’UE épuisé par les crises, la guerre au Proche-Orient…
“Un échec serait un sérieux coup dur. Mais celui qui le menace y a-t-il vraiment intérêt?”, questionnaient des sources diplomatiques. Les regards sont tournés vers Budapest, où le dirigeant ultra-nationaliste Viktor Orban, toujours en lien avec Moscou, utilise – bien qu’il s’en défende – la guerre russe en Ukraine pour tenter d’arracher pour son pays des fonds européens toujours suspendus en raison des manquements de son gouvernement à l’État de droit.
Orban restera “inflexible”
Le leader populiste l’a répété mercredi: il restera inflexible dans son opposition à l’ouverture des négociations d’adhésion de l’Ukraine à l’UE, à laquelle il préfère un simple “partenariat stratégique”. Il s’apprête à batailler ferme sur l’approbation d’une “facilité pour l’Ukraine” de 50 milliards d’euros (17 en subventions, 33 en prêts) sur 2024-2027, destinée aux besoins immédiats du pays et à son redressement, sans fermer toutefois complètement la porte.
Alors que le président américain Joe Biden peine à faire approuver un nouveau paquet d’aides de 61 milliards de dollars pour Kiev, le chancelier allemand Olaf Scholz a répété qu’un “soutien financier durable” de l’UE à l’Ukraine constituait une “priorité” pour l’Allemagne, tandis qu’à Paris, le président Emmanuel Macron appelait l’Union européenne à être “au rendez-vous du soutien entier et durable à l’Ukraine”. Présent à Oslo mercredi, en provenance des États-Unis, le président ukrainien Volodymyr Zelensky, bien conscient qu’une défaillance américaine minerait le soutien de ses autres alliés, a réclamé “un signal très fort d’unité” face à “l’agresseur”.
De son côté, la Commission a débloqué, à la veille du sommet, quelque 10 milliards des fonds européens pour la Hongrie, disant prendre en considération certaines avancées dans les réformes judiciaires réclamées. Une tentative d’amadouement dénoncée par les principaux partis du Parlement européen (PPE, S&D, Renew, Verts/ALE), pour qui les réformes attendues du système judiciaire hongrois ne sont pas au rendez-vous.
Difficultés budgétaires
La facilité pour l’Ukraine s’inscrit dans la révision à mi-parcours du budget 2021-2027 de l’UE, une rallonge de 66 milliards demandée par la Commission vu l’épuisement des marges dû aux crises, la hausse des taux d’intérêt grevant le remboursement du grand plan UE de relance post-covid (NextGenerationEU), et la nécessité de financer certains besoins (migration, compétitivité technologique, réponse aux crises…) Les États membres rechignent à mettre la main au portefeuille pour cette rallonge, en période budgétaire compliquée.
Au dernier sommet (octobre), le Premier ministre belge Alexander De Croo a demandé à la Commission d’aller plutôt chercher des marges dans les fonds propres des institutions de l’UE, tout en soulignant vouloir préserver la capacité à soutenir l’Ukraine. Des coupes auraient depuis été envisagées, et les travaux avanceraient dans le bon sens, dès lors qu’il existerait un mécanisme pour rembourser les intérêts de NextGenerationEU, selon une source.
Le Proche-Orient divise
Autre sujet sensible, la guerre au Proche-Orient continue de se traduire par des divergences entre les Vingt-sept, encore constatées lors d’un vote à l’Onu mardi. Quatre Premiers ministres (Belgique, Espagne, Irlande, Malte) ont poussé ce week-end pour que le Conseil appelle à un cessez-le-feu humanitaire durable “pouvant conduire à la fin des hostilités”, “des mesures efficaces et immédiates” pour protéger les civils innocents et l’urgence d’un processus politique fondé sur la mise en œuvre d’une solution à deux États. La Belgique réclame aussi des sanctions européennes contre les colons israéliens extrémistes de Cisjordanie violents envers les Palestiniens, un plaidoyer relayé désormais par la Commission européenne, mais qui ne fait pas l’unanimité parmi les Vingt-sept.
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