Croissance sous pression, emploi révisé à la baisse, inflation persistante, recul du tourisme international, instabilité politico-économique : derrière les discours triomphants de Donald Trump, l’économie américaine affiche des fragilités bien réelles. Voici cinq indicateurs clés qui contredisent la narration présidentielle.
Donald Trump a beau distribué des droits de douane comme il donne des mauvais points, la situation économique de son pays se dégrade sur quasiment tous les fronts. Et sa politique commerciale ne devrait pas arranger les choses.
1. Emploi : des chiffres révisés brutalement à la baisse
Le marché du travail américain, vanté comme robuste par Donald Trump, connaît en réalité une nette détérioration. Le rapport officiel du ministère du Travail, publié début août, a corrigé à la baisse les créations d’emplois pour les mois de mai et juin 2025 :
- Mai : 19.000 nouveaux emplois (contre 226.000 initialement annoncés)
- Juin : 14.000 (contre 187.000).
Soit une perte sèche de 258.000 emplois sur deux mois.
Il s’agit des niveaux les plus bas depuis la pandémie. Pour rappel, la moyenne mensuelle sur les six premiers mois de 2024 était de 210.000.
2. Croissance : un rebond trompeur
La croissance du PIB américain a affiché +3,0 % en rythme annualisé au deuxième trimestre 2025, mais cette hausse est largement due à des éléments non durables comme la reconstitution des stocks et les dépenses publiques exceptionnelles.
En réalité :
- Hors stocks, commerce extérieur et dépenses publiques, la croissance du PIB privé domestique final tombe à +1,2 %.
- C’est le rythme le plus faible depuis fin 2022, pour un 2e trimestre.
La consommation des ménages ralentit, les investissements stagnent, et les exportations sont pénalisées par les tensions commerciales. Selon les analystes de Morgan Stanley cités par le Wall Street Journal, ce ralentissement pourrait « s’installer durablement » si la politique tarifaire actuelle persiste.
Rappelons que la croissance était négative (-0,5%) au premier trimestre et qu’elle est attendue à 1,2% pour l’année 2025, contre 2,8% pour toute l’année 2024.
3. Inflation : le fardeau persiste
Alors qu’elle est retombée à 2% en zone euro, l’inflation est encore de 3,2% sur an aux Etats-Unis. Entre autres, l’inflation des services, hors énergie et logement, reste supérieure à 4 %, signalant une dynamique encore vigoureuse des prix sous-jacents.
Malgré la faiblesse de la demande, l’inflation reste tenace. La Fed maintient ses taux, au contraire de la BCE, faute de visibilité sur l’impact des tarifs douaniers. Jerome Powell admet : « Nous avons encore un long chemin pour comprendre exactement comment les tarifs affecteront l’inflation ».
4. Tourisme : la désaffection des étrangers
Le recul du tourisme international constitue un des chocs les plus lourds pour l’économie américaine en 2025. Selon une étude conjointe du World Travel & Tourism Council (WTTC) et de Tourism Economics (Oxford Economics), citée par Forbes, les États-Unis sont le seul pays au monde à enregistrer une baisse des dépenses des visiteurs internationaux cette année.
Les chiffres sont sans appel :
- Le WTTC prévoit une perte directe de 12,5 milliards USD sur l’année.
- Tourism Economics, initialement optimiste (+9 % prévu), anticipe désormais une baisse de 8,2 % des arrivées internationales, soit un manque à gagner de 8,3 milliards USD.
- La fourchette globale des pertes est estimée entre 25 et 29 milliards USD, en intégrant les écarts entre projections et réalité.
La chute est particulièrement marquée chez les Canadiens (-20,2 %) et les Européens de l’Ouest (-4,9 %), des clientèles historiquement fidèles. En mai, les visites canadiennes ont chuté de 38 % par la route et 24 % par avion, pour le cinquième mois consécutif.
Julia Simpson, PDG du WTTC, résume la situation : « Pendant que d’autres pays déroulent le tapis rouge, les États-Unis affichent une pancarte ‘fermé’. »
5. Gouvernance économique : des signaux d’alerte démocratiques
La gestion politique des institutions économiques soulève des inquiétudes croissantes :
- Trump a renvoyé la cheffe du bureau des statistiques à la suite de données d’emploi défavorables.
- Il envisage de nommer un proche au comité directeur de la Fed, après la démission surprise d’une gouverneure, Adriana Kugler.
- Il multiplie les attaques contre Jerome Powell, président de la Réserve fédérale, le pressant de démissionner.
« C’est une tentative de mise au pas des institutions indépendantes », selon Larry Summers, ancien secrétaire au Trésor. Ces tensions alimentent une instabilité perçue négativement par les investisseurs.
Derrière les slogans de « redressement économique » martelés par Donald Trump, les chiffres racontent une tout autre histoire. L’emploi ralentit fortement, la croissance réelle se replie, l’inflation persiste, le tourisme s’effondre et la crédibilité institutionnelle est fragilisée. Une conjoncture bien éloignée du « miracle américain » promis à l’électorat. Et tout ceci avant les effets réels des droits de douane.