Comment un éventuel Nobel de la Paix à Donald Trump électrise l’opinion

Donald Trump. REUTERS/Ken Cedeno © REUTERS
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le président américain ne cache pas son envie de devenir le prochain prix Nobel de la paix, décerné vendredi à Stockholm. Ses chances sont minces pour cette année. Mais le sujet est sur toutes les lèvres, surtout depuis l’accord signé entre Israël et le Hamas. Il y a les fervents partisans et les détracteurs nuancés.

Lorsque Maxime Prévot (Les Engagés), ministre des Affaires étrangères, est interrogé sur la probabilité que le président américain, Donald Trump, reçoive le prix Nobel de la paix, il botte d’abord en touche. « Je ne suis pas membre du jury », éludait-il sur RTL ce jeudi matin.

Puis Maxime Prévot poursuit : « On doit reconnaître à Monsieur Trump de s’être impliqué dans beaucoup de conflits ces derniers temps. De là à considérer que cela mériterait le prix Nobel de la paix, il y a un pas que je ne franchirai personnellement pas, même si ce n’est pas à moi d’en juger. »

Pourquoi ? « Il liste notamment, parmi ses faits d’armes, le fait d’avoir conclu un accord de paix à l’Est du Congo. Je constate que, depuis que cela a été signé dans le Bureau ovale à Washington, la situation sur le terrain est pire que jamais. Il ne faut pas confondre une initiative porteuse d’espoirs et la mise en œuvre sur le terrain. »

On pourrait également citer ses vaines tentatives de ramener le président russe, Vladimir Poutine, à la raison dans le conflit ukrainien — avec, par moments, un prisme prorusse avéré et une fascination pour les autocraties.

Une campagne insistante, mais…

Depuis des mois, Donald Trump ne cache pas son ambition de conquérir ce prix Nobel obtenu avant lui par son rival Barack Obama, alors qu’il était en exercice et qu’il n’avait pas encore fait de grandes preuves dans le domaine.

« Je devrais recevoir le prix Nobel, tout le monde le dit », déclarait-il le 23 septembre à New York, lors de son discours aux Nations unies. Un leitmotiv répété à de nombreuses reprises, y compris dans des entretiens bilatéraux pour tenter de peser sur le choix.

« Ce serait une grande insulte à notre pays, a-t-il encore proclamé. Je ne le veux pas, je veux que les États-Unis l’obtiennent. » Make America Great Again, on connaît le slogan.

Certains sondages le pointent parmi les favoris, aux côtés du président ukrainien Volodymyr Zelensky ou du réseau de bénévoles soudanais Cellules d’intervention d’urgence (ERR), mis en avant pour son rôle dans un terrible conflit oublié.

Il y a toutefois un « mais » de taille : le Comité Nobel norvégien a tenu sa dernière réunion lundi, a indiqué l’Institut Nobel norvégien, soit quelques jours avant l’accord de paix au Proche-Orient.

« Non, ce ne sera pas Trump cette année, souligne le professeur suédois Peter Wallensteen, spécialiste des questions internationales, à l’AFP. Mais peut-être l’an prochain ? D’ici là, la poussière sera retombée autour de ses diverses initiatives, notamment sur la crise de Gaza. »

Une opinion électrisée

C’est peu dire que le sujet suscite de très nombreux commentaires.

L’entrepreneur et philosophe Drieu Godefridi, partisan du président américain (et ancien candidat N-VA), se lance : « Demain, Donald Trump sera prix Nobel de la paix. S’il ne l’est pas, après avoir mis fin à une demi-douzaine de conflits et de guerres dans le monde, le prix Nobel de la paix cesse d’avoir la moindre signification. Quelle ironie ! Tandis que les “élites” européennes, occupées à détruire l’Europe (Green Deal), le taxaient de fasciste, de nouvel Hitler, Trump s’avère l’ultime pacificateur du XXIᵉ siècle. »

C’est dire combien le discours MAGA consistera, le cas échéant, à faire tomber une institution de plus.

« Donald Trump n’est pas ma tasse de thé, mais il mérite le prix Nobel de la paix », estime lui aussi Robert Ménard, maire divers droite de Béziers et ancien secrétaire général de Reporters sans frontières, aujourd’hui soutenu par le RN.

« Trump n’aura pas le prix Nobel de la paix demain (ou alors je ne comprends plus rien à la manière dont le Comité Nobel norvégien fonctionne), estime le professeur de géopolitique Bruno Tertrais (Fondation pour la recherche stratégique). Mais il est tout de même troublant de constater qu’il a poussé tout le monde à un accord de cessez-le-feu avant vendredi. »

Bruno Tertrais relaie une plongée récente dans les coulisses du Nobel de la paix et cite son vice-président, forcément discret sur le processus en cours :
« Nous ne cherchons pas des saints, assume Asle Toje. Nous évaluons des actions dans leur factualité et nous avons une fenêtre temporelle assez précise pour cela : l’année écoulée. Alors peut-être que les gens attendent du prix Nobel un effet qu’il ne peut produire. »
Trump répond-il à ces critères ?

L’ancien Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin salue l’action de Donald Trump au Proche-Orient, du moins dans un second temps. « Il avait très mal commencé — je pense à la bande de Gaza —, dit-il. Mais aujourd’hui, on est obligé de saluer cette initiative. » Mérite-t-il pour autant ce prix Nobel ? « Absolument pas. Le prix Nobel nécessite une vision humaniste qui n’est pas celle de la radicalité telle que la développe Trump. »

« Au fond, Donald Trump est un spécialiste du marketing, et le prix Nobel de la paix n’est qu’une campagne publicitaire de plus », commente Ryan Skinnell, spécialiste en communication politique, interrogé par le correspondant du Soir aux États-Unis.

Une campagne marketing, suivie souvent d’une grande capacité à décrédibiliser les institutions qui lui résistent ?

Et vous, qu’en pensez-vous ? Rendez-vous ce vendredi 10 octobre.

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