Pologne : stop ou encore ?
L’Europe a les yeux rivés sur l’élection présidentielle polonaise car elle pourrait mettre fin à la cohabitation difficile avec un président issu de la droite dure.
La Pologne organisera une élection présidentielle en 2025, probablement en mai. Celle-ci devrait décider de l’avenir du parti populiste et nationaliste Droit et Justice (PiS). Selon Andrzej Bobinski, de Polityka Insight, un think tank basé à Varsovie, le PiS sera “sur une autoroute pour revenir au pouvoir ou bien ce sera la fin du PiS tel que nous le connaissons”. Le parti, fondé en 2001 par Jaroslaw et Lech Kaczynski, les frères jumeaux qui ont conquis la Pologne conservatrice. Son sort constituera un indicateur pour d’autres pays d’Europe, où les partis de la droite dure ont récemment gagné en puissance et en importance.
Droit et Justice a été au pouvoir pendant huit ans, jusqu’en octobre 2023, lorsqu’une coalition tripartite dirigée par la Plateforme citoyenne (PO) centriste de Donald Tusk, ancien président de la Commission européenne, a remporté les élections législatives. Au cours de son mandat, le PiS a pris le contrôle des médias publics. Le parti a aussi rempli le système judiciaire – et en particulier la Cour constitutionnelle – de ses acolytes. Il a également mené d’interminables batailles avec la Commission : au sujet de la refonte radicale du système judiciaire polonais, de son mépris pour l’autorité de la Cour européenne de justice et de son refus d’accepter son quota d’immigrants.
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La présidence est le dernier ancrage de Droit et Justice dans le pouvoir exécutif. Andrzej Duda, le président actuel, issu du PiS, défend ses politiques, bien qu’il se soit apparemment brouillé avec Jaroslaw Kaczynski, l’influent dirigeant du parti. Le président polonais n’a pas les pouvoirs étendus d’un président français, mais il est plus puissant que son homologue allemand, dont le rôle est essentiellement protocolaire. Il peut en outre jouer un rôle extrêmement obstructionniste s’il le souhaite, étant donné qu’il nomme les ambassadeurs, supervise la politique étrangère et, surtout, dispose d’un droit de veto sur les textes législatifs.
La présidence est le dernier ancrage de Droit et Justice dans le pouvoir exécutif polonais.
Quatre choix pour un candidat
Donald Tusk affirme qu’avec Andrzej Duda au palais présidentiel, il a les mains liées et ne peut mettre en œuvre le programme de réformes qu’il a promis à ses électeurs. Le candidat de son parti à la présidence sera probablement Rafal Trzaskowski, le populaire maire de Varsovie, qui a perdu d’un cheveu face à Duda en 2020.
Étant donné qu’Andrzej Duda ne peut se représenter, le PiS doit se choisir un nouveau candidat présidentiel. Les observateurs tablent sur Mariusz Blaszczak, un ancien ministre de la défense de 55 ans qui est un fan de Donald Trump. Un autre candidat possible est Karol Nawrocki, un historien de 41 ans qui dirige l’Institut de la mémoire nationale. La possibilité la plus dure est toutefois celle de Przemyslaw Czarnek, un ancien ministre de l’éducation de 47 ans, connu pour ses critiques envers les droits des homosexuels et des transgenres et pour son soutien aux châtiments corporels appliqués aux enfants. Et puis, il y a un outsider : Slawomir Mentzen, jeune codirigeant de la Confédération, un parti encore plus nationaliste et de droite que le PiS, et qui est très populaire sur les réseaux sociaux, en particulier sur TikTok.
Après la victoire de Droit et Justice aux législatives d’octobre 2016, la Pologne est devenue le seul pays de l’UE où la droite dure contrôle les deux chambres du parlement et la présidence. Les répercussions des huit années de pouvoir du PiS – et la question de savoir s’il va maintenant quitter complètement du pouvoir exécutif – sont donc suivies de près dans toute l’Europe.
Par Vendeline von Bredow, correspondante principale en Allemagne de “The Economist”
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