Politique budgétaire: la pression monte en Europe

© Getty Images/iStockphoto

La pression fiscale à venir dans l’Union européenne affectera la croissance, la politique et l’Ukraine.

L’UE ne semble pas avoir de problème d’endettement. Avec environ 84% du PIB, le ratio d’endettement public global de ses pays membres est bien inférieur aux 104% de la Grande-Bretagne ou aux 123% des États-Unis, sans parler des 255% du Japon. Même si l’on inclut les quelque 1.000 milliards d’euros de dette collective, comme les obligations de l’UE qui financent son fonds de relance post-pandémique, le ratio ne dépasse pas 90% du PIB. Pourtant, le continent va être confronté à une pression fiscale, en 2025 et au-delà, qui alimentera les divisions et réduira la croissance européenne à presque zéro, et qui pourrait saper ses efforts pour augmenter les dépenses de sécurité et continuer à soutenir l’Ukraine.

La faiblesse de la croissance est l’un des facteurs à l’origine de cette pression. La croissance économique de l’Allemagne est pratiquement nulle. Et il y a peu de chances qu’elle s’améliore avant les élections fédérales de février 2025. La France et l’Italie continuent de croître. Cependant l’OCDE, un club de pays pour la plupart riches, estime que leur croissance ne dépassera guère 1% l’année prochaine. Le ralentissement n’est pas cyclique, mais reflète un faible potentiel de croissance. Cela se traduira par une faible progression des recettes fiscales, tandis que les motifs de dépenses s’accumuleront.

La menace d’une guerre commerciale avec l’Amérique ajoutera aux pressions sur la croissance. Le Vieux continent étant particulièrement vulnérable à de nouvelles frictions commerciales. Les banques d’investissement ont d’ailleurs fortement revu à la baisse leurs estimations de la croissance européenne suite à la victoire de Donald Trump.

Un autre facteur est d’ordre démographique. Le vieillissement des populations européennes alourdit la facture de leurs États, non seulement par le biais des pensions, mais aussi des soins de santé. Une population plus âgée est également moins productive et moins innovante. Enfin, il y a aussi les règles budgétaires auto-imposées de l’UE qui stipulent que les pays présentant des déficits élevés doivent élaborer des plans pour les réduire.

Une croissance encore plus lente que prévu

Conséquence de cette pression fiscale en 2025 : la croissance sera encore plus lente que ce que prévoient actuellement les experts. La Chine continuera à défier l’industrie manufacturière européenne sur les marchés mondiaux, alors même que sa propre faiblesse intérieure nuit aux exportateurs européens. La consommation intérieure de l’Europe est, certes, en hausse, mais l’augmentation de la pression fiscale sapera le peu de croissance qui en résultera. Et elle rendra également la politique européenne plus difficile, avec probablement ceux qui se situent à l’extrême droite de l’échiquier politique comme bénéficiaires. Enfin, il sera tout aussi difficile de se mettre d’accord sur des réformes radicales et sur des dépenses européennes plus communes, comme l’a suggéré Mario Draghi (ex-BCE) dans son rapport historique de septembre 2024.

La principale victime de cette situation pourrait bien être l’Ukraine.

Malgré tout, la principale victime de cette situation pourrait bien être l’Ukraine. La puissance militaire et la santé financière du pays dépendent du soutien américain et européen. Pour 2025, le G7 a convenu d’un plan, qui n’est pas encore finalisé. Ce plan vise à utiliser les bénéfices des actifs gelés de l’État russe pour financer une aide d’environ 50 milliards de dollars, en partie parce qu’il s’est avéré de plus en plus difficile de la financer à partir de ressources nationales. Si cet argent vient à manquer, l’Europe devra procéder à des coupes encore plus importantes pour financer la sécurité de l’Ukraine et la sienne. 

Par Christian Odendahl, rédacteur en chef économie européenne à “The Economist”

Lire plus de:

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content