La stratégie de Donald Trump: décoller la Russie de la Chine


Toute l’action du président américain serait motivée par son objectif principal: faire barrage à l’expansion chinoise. D’où son attitude face à Vladimir Poutine. Pas sûr, toutefois, que sa ligne agressive ne finisse pas… pas renforcer Pékin.
Cela s’appelle du billard à trois bandes. L’administration Trump, en adoptant une ligne très favorable à la Russie dans le conflit ukrainien, vise en réalité à faire des “deals” économiques avec le président russe, Vladimir Poutine. Mais ce faisant, il espère surtout décoller la Russie de la Chine, le conflit européen ayant jeté Moscou dans les bras de Pékin.
L’Indo-Pacifique est au coeur des intérêts stratégiques américains depuis de nombreuses années et sous plusieurs présidents: Obama, Trump, Biden. La volonté de contenir l’expansion économique de la Chine et ses ambitions géopolitiques motive bien des actes, à Washington.
Désormais, cela induit des mouvements majeurs et déroutants, avec des Etats-Unis votant des textes en compagnie de la Russie, de la Corée du Nord et… de la Chine aux Nations Unies.
“Trump, pas un idiot”
Edouard Philippe, ancien Premier ministre français et candidat déclaré à la prochaine présidentielle, ne disait pas autre chose dans un entretien à LCI cette semaine: “Ce que veut faire le président américain, aujourd’hui, est exclusivement dirigé par son objectif principal: la Chine.“
“En engageant la discussion avec les Russes, en renouant un dialogue politique et en recréant des liens économiques, il entend probablement faire l’envers de ce que Nixon faisait dans les années 1970, prolongeait-il. Nixon, à l’époque, avait tenté de décoller la Chine de l’Empire soviétique. Je n’exclus pas que Trump veuille faire la même chose.”
Une théorie à mille lieux de l’affirmation selon laquelle Donald Trump serait un “agent de Moscou”. “Comment pouvez-vous imaginer que le président américain n’ait pas de stratégie?, demande Edouard Philippe. Je pense que les gens estimant que Trump est un idiot ou qu’il agirait selon des réflexes idéologiques absurdent se trompent.”
Le jeu des alliances
L’économiste Nobert Gaillard ne dit pas autre chose dans une opinion publiée par L’Echo, ce mercredi 26 février. “En 2025, Trump cherche à conclure la paix en Ukraine aux conditions russes, écrut-il. Pour quelle finalité? Soit il s’agit d’affaiblir l’axe Moscou-Pékin pour mieux contrecarrer les ambitions chinoises, soit l’étape suivante est un réchauffement des relations sino-américaines.”
Déscotcher Moscou de Pékin sera toutefois difficile, précise-t-il. L’option “est assez naïve quand on sait que 53% des importantions russes viennent de Chine et que les sanctions occidentales ont rendu Moscou encore plus dépendant de Pékin”. Et si l’objectif était précisément de les lever rapidement?
Et si Pékin… en profitait
En début de semaine, Vladimir Poutine et le président chinois, Xi Jinping, ont eu un long entretien pour s’opposer à cette velléité. Message commun: “la Chine et la Russie sont de bons voisins et de vrais amis qui ont traversé ensemble des hauts et des bas, se sont épaulés et développé ensemble”.
Dans le grand charivari mondial actuel, on entend moins la Chine, et pour cause: le régime de Pékin pourrait profiter du caractère incohérent du locataire de la Maison Blanche pour renforcer sa position de partenaire fiable… y compris pour les Européens.
Plus que jamais, la destruction de l’ordre mondial rebat les cartes, sans que l’on sache comment le jeu se figera à nouveau.
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