Entre amertume des Ukrainiens et confiance forcée des Européens, les déclarations du Hongrois Orban sur la victoire russe détonnent. D’autant que le président américaine, Donald Trump, estime qu’il s’agit d’un “homme très intelligent”. La question d’une levée des sanctions est posée à demi-mots.
C’était il y a quelques jours à la Maison Blanche. Le président américain Donald Trump évoquait le prochain sommet qu’il tiendra le 15 août en Alaska avec son homologue russe, Donald Trump. Évoquant une discussion avec le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, il précisait: “Il me disait que les Ukrainiens ne pourraient pas gagner la guerre. C’est un homme très intelligent.“
Voilà qui augure mal du bras de fer annoncée entre Washington et Moscou, qui pourrait s’apparenter davantage à un rapprochement.
“La Russie a gagné”
L’épisode, à vrai dire, faisait un peu froid dans le dos, à la perspective d’un “deal” favorable aux Russes. D’ailleurs, le même Orban a refusé de soutenir les Vingt-Sept dans leur derrière position ferme. Selon lui, l’Europe serait “ridicule et pathétique”. Selon l’agence Reuters, il a affirmé que “la Russie a gagné cette guerre”, lors d’un entretien avec des médias hongrois.
Voilà donc l’analyse de cet ‘homme très intelligent”. La dernière percée russe dans l’est de l’Ukraine en direction de Dobropilla, avec un encerclement possible de villes stratégiques de la région de Donetsk, donne du crédit à ce narratif et Vladimir Poutine compte bien l’exploiter en Alaska.
Le ministre des Affaires étrangères hongrois, Péter Szijjarto, a tancé le président ukrainien, Volodymyr Zelensky sur X: “La Hongrie prône un cessez-le-feu et des négociations de paix depuis trois ans et demi. L’Ukraine aurait été mieux lotie si Zelensky avait fait de même. Des centaines de milliers de vies auraient pu être sauvées et des millions de personnes auraient pu éviter de fuir leur foyer”.
Un retournement de l’histoire, semblable à celui amenant Donald Trump à dire qu’il ne comprend pas pourquoi Zelensky rejetterait des échanges de territoires, en vertu de sa Constitution, alors qu’il a pu entamer cette guerre.
Ce cynisme n’est-il que de façade?
Une levée des sanctions?
La confiance des propos des dirigeants européens, qui se concertent avec les Américains avant le sommet, serait-elle forcée? “Aujourd’hui, l’Europe, les Etats-Unis et l’Otan ont renforcé leur terrain d’entente pour l’Ukraine, a estimé Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne. Nous resterons en coordination étroite. Personne ne souhaite plus que nous une paix juste et durable”.
Mais les Européens continuent à considérer que les Ukrainiens doivent décider de leur propre sort. Une détermination jugée “insignifiante” par Moscou. Le bras de fer se poursuit et n’est pas près de se terminer: la Russie ne prépare-t-elle pas des manoeuvres militaires… singeant une attaque de l’Europe?
L’Union, à vrai dire, navigue entre confiance et désillusion derrière les grands discours. Elle n’a pas les moyens de sa fermeté verbale. Un cessez-le-feu, même à des conditions défavorables, serait accueilli comme un moindre mal.
La question d’une levée des sanctions à l’égard de la Russie ets déjà évoquée à demi-mots. Les dix-huit paquets de sanctions de l’Union ont fini par affecter l’économie russe, estiment les dirigeants européens. Ils pensent donc pouvoir poser des conditions à leur levée progressive, en gardant la possibilité de les rétablir si Moscou violait un futur accord.
C’est, en quelque sorte, reconnaître une défaite annoncée.
Même les menaces de nouvelles sanctions proférées par Trump en cas d’échec du sommet ne font plus recette à Kiev. “Les gens n’ont pas d’attentes car la grande majorité des Ukrainiens comprennent que cette guerre est existentielle et qu’il ne semble pas que Poutine soit prêt à y mettre fin”, dit au Monde Anton Grouchetsky, directeur de l’institut de sociologie ukrainien KIIS.
Tout serait-il dit?