La menace directe de Poutine aux Occidentaux, une gesticulation… à prendre au sérieux
Le président russe se dit prêt à frapper les pays occidentaux à la source des tirs à longue portée contre son territoire. Le conflit est “mondial”, dit-il, lui qui a fait venir des soldats nord-coréens. Les experts sont troublés par cette “escalade”.
Le président russe, Vladimir Poutine, a l’habitude des menaces et des expressions martiales. Jeudi, il a utilisé un décor comparable à celui dans lequel il avait annoncé l’invasion de l’Ukraine, en février 2022. Cette fois, il a qualifié le conflit de “mondial” et menacé directement de frapper les pays occidentaux à la source des tirs de missile à longue portée contre son pays.
Joignant le geste à la parole, un missile balistique de moyenne portée d’un genre nouveau, baptisé “Orechnik”, a été tiré sur le territoire ukrainien, non loin de Dnipro. D’une portée de 5000 kilomètres, il était doté de munitions conventionnelles, mais est normalement destiné à porter des têtes nucléaires.
“Bien que les missiles en question emportaient des charges conventionnelles, leur emploi peut être perçu comme une musculation du signalement nucléaire adressé par Moscou à l’attention des Etats de l’OTAN”, souligne Alain De Neve, spécialiste des questions de défense.
Une gesticulation?
S’agit-il d’une gesticulation? Vladimir Poutine cherche avant tout à nous faire peur et à décourager nos opinions publiques, estimaient les experts, jeudi soir. Son attitude physique exprimait également la peur d’un dirigeant acculé dans sa propre logique, estimaient-ils. Objectif: décourager la perspective de nouvelles frappes sur son territoire qui, si elles ne changeraient pas le cours militaire de la guerre, n’en sont pas moins une entrave dans sa volonté d’avancer et une symbolique désastreuse pour son opinion publique. Les “optimistes” voient la Russie s’écrouler en 2025, les réalistes sont plus inquiets.
Gesticulation, vraiment? Attention à la paranoïa manifeste du locataire du Kremlin et à se détermination, précisaient parfois… les mêmes experts. L’invasion de l’Ukraine était jugée peu crédible quelques jours avant qu’elle ne survienne, sauf par les services de renseignement américains. Pourtant, il est passé à l’acte. Pourrait-il en être de même cette fois, avec des frappes contre des sites militaires de l’OTAN?
Entre escalade folle d’un dirigeant sans limites ou déclaration hors-norme d’un dictateur acculé, les analystes hésitent. Tout en reconnaissant… que c’est bien là le discours de la dissuasion et que Poutine l’utilise parfaitement.
Un conflit mondial?
“Le conflit a pris une dimension mondiale”, déclare Vladimir Poutine. Une fameuse escalade pour celui qui, il y a trois ans, parlait d’une “opération militaire spéciale”. Faut-il y voir un indice d’une “troisième guerre mondiale”, qui aurait déjà commencé selon certains, oui qui nous menace comme le signalait Charles Michel, président du Conseil européen?
“Ce n’est pas la première fois que Vladimir Poutine instrumentalise sa dissuasion nucléaire, souligne Sébastien Lecornu, ministre français de la Défense. Le point de départ de l’engrenage de ces dernières semaines, c’est le déploiement de soldats nord-coréens en Russie. La communauté internationale doit continuer à se mobiliser.”
De facto, l’élargissement du conflit est une initiative russe, affirment les occidentaux, avec l’arrivée de quelque 10000 soldats nord-coréens, avant peut-être un nombre dix fois supérieur. Voire avec le soutien direct de l’Iran ou indirect de la Chine.
Si les experts évoquent un conflit “mondialisé”, ils n’utilisent toutefois pas le terme de “troisième guerre mondiale”. Ou alors, disent-ils, elle prend une autre forme. Tout est dans les nuances…
Et Donald Trump?
La montée des tensions actuelle provient bel et bien de l’arrivée des soldats de Corée du Nord qui indispose fortement Washington. En réponse, le président américain Joe Biden a autorisé l’utilisation de frappes sur le territoire russe, ce qu’il avait exclu jusqu’ici. Ce pourrait également être un geste consécutif au contexte politique américain.
Le président élu, Donad Trump, a pour sa part regretté que l’on n’ait “jamais été aussi près de la troisième guerre mondiale que sous Joe Biden”. L’escalade actuelle, faut-il le dire, anticipe son arrivée au pouvoir.
Comment se comportera Donald Trump? Et ce jeu dangereux peut-il déraper avant son initiative pour “régler le conflit en vingt-quatre heures”? D’ici le 20 janvier, date de son arrivée au pouvoir, les gesticulations risquent de se poursuivre.
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