La “carte dorée” annoncée par Trump, pour VIP fortunés, ne pourra pas être vendue de sitôt

© (Photo by Mandel NGAN / AFP)

Une “carte dorée” à environ cinq millions de dollars, visa de résident permanent aux Etats-Unis destiné aux étrangers fortunés, pourrait selon Donald Trump être vendue dès mars, mais un tel titre ne semble pas pouvoir être créé sans le Congrès, selon des spécialistes en droit de l’immigration.

“Nous avons tout prévu d’un point de vue juridique”, a déclaré le président américain fin février, assurant que cette nouvelle carte serait commercialisée deux semaines plus tard. “Elle sera en vente très très vite”, a-t-il dit au Congrès mardi.

Son administration dispose “d’une autorité importante” pour gérer les programmes de visa existants, mais en élaborer une nouvelle catégorie “nécessiterait une loi du Congrès”, a cependant rappelé Michelle Mittelstadt, du centre de réflexion américain Migration Policy Institute.

Pas sans le Congrès

Un programme similaire à l’idée de “carte dorée” existe déjà aux Etats-Unis. Créé en 1990 pour stimuler l’économie, l’EB-5 permet aux investisseurs étrangers de demander une carte de résident permanent (surnommée carte verte), à condition de placer suffisamment de capitaux dans une entreprise américaine. Autre condition requise: prévoir de créer ou de préserver dix emplois permanents à temps plein et réservés à des salariés américains qualifiés.

Aux Etats-Unis, les résidents permanents peuvent demander la naturalisation américaine généralement au bout de cinq ans. Environ 8.000 personnes ont obtenu un visa EB-5 en 2022, rapporte Mme Mittelstadt.

“Nous allons la remplacer par la carte dorée Trump”, a dit le ministre du Commerce Howard Lutnick, avant de suggérer de modifier ce programme. D’après lui, l’EB-5 génère trop de fraude et représente “un moyen d’obtenir une carte verte à bas coût”.

Cependant, “un programme existant, établi par le Congrès et inscrit dans la loi, ne peut pas être modifié unilatéralement de manière aussi radicale par le simple pouvoir exécutif. Ce ne serait pas légal”, relève Sharvari Dalal-Dheini, de l’Association américaine des avocats spécialisés en droit de l’immigration. En effet, la Constitution américaine confère explicitement au Congrès le pouvoir de légiférer en matière d’immigration, en vertu de la section 8 de l’article 1.

Donald Trump soutient que les Etats-Unis pourraient bénéficier de “la vente peut-être d’un million de ces cartes” afin de réduire la dette du pays. Or, “la législation actuelle n’autorise qu’un maximum de 10.000 visas EB-5 par an”, souligne Mme Dalal-Dheini. Pour modifier ce quota, l’intervention du Congrès serait une fois encore indispensable.

Long processus législatif

“Il est très peu probable que ce programme débute ce mois-ci”, estime ainsi Michelle Mittelstadt. Car même avec une majorité républicaine dans les deux chambres du Congrès, ce type de loi pourrait “nécessiter plus d’une majorité simple pour être adoptée”, ajoute Mme Dalal-Dheini. Le processus législatif s’étalerait alors sur “des semaines, voire des mois, ou ne verrait jamais le jour”.

Il n’est en outre pas certain que le projet “bénéficie d’un réel soutien du Congrès”, relève Sharvari Dalal-Dheini. “Il existe quelques poches de résistance, même dans les cercles conservateurs, à l’idée de vendre la citoyenneté américaine”, abonde Mme Mittelstadt.

Si le Congrès approuve le nouveau visa, il faudra ensuite dans tous les cas “beaucoup de temps aux services américains de la citoyenneté et de l’immigration pour élaborer les formulaires, les consignes et les listes de pièces justificatives”, ajoute enfin la spécialiste du Migration Policy Institute.

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